Budget de la France : un déficit pour les "gros yeux" de Bruxelles

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Par Antonio RODRIGUEZ - Paris (AFP)
Publié le 23 septembre 2018 - 15:45
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Pierre Moscovici, le 28 mai 2018 à Bruxelles
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© Emmanuel DUNAND / AFP/Archives
Le commissaire européen aux Affaires économiques Pierre Moscovici,le 31 août 2018 à Bruxelles
© Emmanuel DUNAND / AFP/Archives

Sortie de la liste des mauvais élèves de la zone euro, la France pourrait frôler la barre fatidique des 3% de déficit l'an prochain, suscitant probablement "les gros yeux" de l'UE qui s'inquiète du manque d'efforts de réduction de la dette.

A Bruxelles, le message est toujours le même: "Il est important non seulement à l'égard des règles, mais aussi pour la symbolique, que la France reste en deçà de 3%", a rappelé le commissaire Pierre Moscovici, avant la présentation lundi à Bercy du budget 2019.

A Paris, le ministre des Finances Bruno Le Maire se veut rassurant: "Le rétablissement des comptes publics n'est pas négociable, parce c'est bon pour les Français, c'est bon pour la France et c'est bon pour l'Europe", a-t-il affirmé.

La France, officiellement sortie fin juin de la procédure pour déficit excessif ouverte contre elle depuis 2009 par la Commission européenne, devrait afficher un déficit à 2,6% du PIB cette année et de 2,8% pour 2019, selon les chiffres communiqués par Bercy.

Il n'empêche qu'un décrochage plus fort qu'attendu de la croissance l'an prochain pourrait faire franchir à la France la limite de 3% de déficit tolérée par Bruxelles.

Philippe Waechter, économiste chez Ostrum AM, ne s'attend toutefois pas à ce que l'UE s'en prenne avec virulence à la France à l'approche des élections européennes du printemps 2019.

"Bruxelles, quoiqu'il arrive, fera les gros yeux, mais sans pour autant rentrer dans une procédure quelconque", a-t-il assuré à l'AFP, convaincu que l'UE a bien d'autres chats à fouetter, notamment avec la montée des populismes.

"Cela n'ira pas plus loin, parce qu'il y a en Europe d'autres problèmes que celui de la France, des questions politiques comme la Hongrie qui sont autres que celle de savoir si le budget va respecter les engagements qui avaient été pris", a-t-il ajouté.

Dans le budget 2019, le Crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) sera transformé l'an prochain en baisse de charges pérennes, ce qui impliquera pour l'Etat de supporter simultanément le remboursement du CICE pour l'année 2018 et la baisse de cotisations pour 2019 -- avec un impact de 0,9 point de PIB.

"Ce sera vraisemblablement ce que l'on appelle dans le langage bruxellois un +one off+", a expliqué M. Moscovici, en d'autres termes une opération qui ne devrait plus se reproduire et qui ne devrait donc ne pas susciter une préoccupation excessive.

- De nouvelles contraintes -

Après sa sortie de la procédure pour déficit excessif, la France n'est pas pour autant exonérée d'obligations.

Son budget doit répondre à des règles plus strictes que la seule contrainte des 3%, notamment la réduction du déficit structurel, c'est-à-dire le déficit calculé sans les effets de la croissance.

"Il faut qu'il y ait un effort structurel significatif", a rappelé M. Moscovici. Il attend de Paris une réduction de la dette qui frôle les 100% du PIB.

M. Waechter s'inquiète, pour sa part, de voir la réduction du déficit français "portée par la croissance" et non par des réductions de la dépense publique.

"Nous voyons bien que lorsque la croissance ne s'accélère plus, il ne se passe pas grand chose. Cela veut dire que la politique économique qui est derrière manque un peu d'efficacité", a-t-il souligné.

Cette année, par exemple, le défit français sera supérieur au 2,3% prévu dans le programme de stabilité budgétaire envoyé par le gouvernement à Bruxelles en avril, en raison d'une croissance désormais attendue "autour de 1,7%" par M. Le Maire, contre les 2% prévus au printemps.

"Sur les dépenses publiques, nous n'avons pas encore vu ce qui va être fait. Notre recommandation est de prioriser les dépenses et s'assurer qu'elles vont vers l'investissement", a expliqué Laurence Boone, la nouvelle cheffe économiste de l'OCDE.

"Si on baisse la masse des revenus de l’État (via la réduction d'impôts comme la suppression progressive de la taxe d'habitation, NDLR), il faudra regarder les priorités sur les dépenses publiques, parce que l'on n'est pas l'un des meilleurs élèves de la zone euro", a-t-elle ajouté.

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