Le 50e prix Nobel d'économie à deux Américains précurseurs de la croissance verte

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Par AFP - Stockholm
Publié le 08 octobre 2018 - 06:00
Mis à jour le 09 octobre 2018 - 12:34
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Clap de fin lundi pour l'édition 2018 des Nobel, marquée par l'absence de la littérature, avec l'économie, un prix plus sensible à l'air du temps qui pourrait couronner des recherches sur le climat ou
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© Jonathan NACKSTRAND / AFP/Archives
Clap de fin lundi pour l'édition 2018 des Nobel, marquée par l'absence de la littérature, avec l'économie, un prix plus sensible à l'air du temps qui pourrait couronner des recherc
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Allier innovation, climat et économie pour plus de croissance verte: le 50e prix Nobel d'économie a été attribué lundi aux Américains William Nordhaus et Paul Romer qui ont décrit les vertus et nuisances de l'activité économique sur le climat.

Favoris du Nobel depuis plusieurs années, les colauréats "ont mis au point des méthodes qui répondent à des défis parmi les plus fondamentaux et pressants de notre temps: conjuguer croissance durable à long terme de l'économie mondiale et bien-être de la planète", a indiqué l'Académie royale des sciences.

Leurs travaux s'appuient sur ceux du keynésien Robert Solow, prix Nobel d'économie 1987 pour ses travaux concernant l'impact du progrès technique sur la croissance.

L'annonce de ce Nobel coïncide avec la publication d'un rapport alarmiste des experts climat de l'ONU (Giec) qui appellent à des transformations "sans précédent" pour limiter le réchauffement climatique.

Joint au téléphone par l'académie, William Nordhaus a dénoncé "les politiques désastreuses de l'administration Trump", qui a décidé de se retirer de l'accord de Paris sur le climat, en juin 2017.

"Ce degré d'hostilité aux Etats-Unis vis-à-vis des politiques environnementales et climatiques est une anomalie", a-t-il déclaré plus tard, lors d'une conférence de presse organisée à Yale (nord-est des Etats-Unis).

"Tout ce que je peux faire, c'est espérer que nous traversions tout ça (l'administration Trump) sans trop de casse", a dit l'universitaire lors du point de presse, décalé pour lui permettre de donner son cours de macroéconomie habituel du lundi matin, qu'il avait refusé d'annuler.

Paul Romer, chercheur de 62 ans et ancien économiste en chef de la Banque mondiale, est connu pour avoir théorisé "la croissance endogène" dès 1986, montrant comment l'innovation et le progrès technique participent de manière importante à la croissance, modèle adapté, dans les recherches de William Nordhaus, à l'innovation verte et à l'idée d'une croissance durable.

Il a mis en avant le rôle des forces économiques et des régulations dans "l'inclination" des entreprises à innover.

"Nombreux sont ceux qui pensent que la protection de l'environnement est si coûteuse et difficile à mettre en œuvre qu'ils préfèrent ignorer le problème, voire nier son existence", a déclaré à l'académie M. Romer, aujourd'hui enseignant à la Stern School of Business de l'université de New York -qui a d'abord cru à un appel non désiré quand l'académie l'a contacté.

"Vous avez droit à votre opinion, mais pas à vos propres faits", a-t-il affirmé lors d'une conférence de presse organisée à New York.

"Je ne le voulais pas, mais je l'accepte", a-t-il expliqué, dans un sourire, avoir répondu au représentant du comité Nobel qui l'a appelé au petit matin.

Après être passé par les universités de Rochester (New York), Chicago et Berkeley (Californie), Paul Romer a rejoint NYU en 2011 pour travailler sur l'urbanisation et la croissance des villes.

"Le moment où j'ai été content, c'est quand j'ai demandé si quelqu'un d'autre avait reçu le prix" et appris qu'il s'agissait de M. Nordhaus, a poursuivi Paul Romer, "parce que Bill est un collègue et une personne fantastique."

Son compatriote William Nordhaus, 77 ans, professeur à l'université de Yale, s'est spécialisé dans la recherche des conséquences économiques du réchauffement climatique.

Il a été le premier, dans les années 1990, à modéliser le lien entre l'activité économique et le climat en conjuguant les théories et l'expérience tirées de la physique, de la chimie et de l'économie, a expliqué le jury Nobel.

Ces travaux font aujourd'hui autorité et servent à prédire ou quantifier les conséquences des politiques climatiques, par exemple la taxe carbone.

- Réchauffement climatique -

La remise du prix Nobel d'économie coïncide avec la publication d'un rapport de 400 pages par les experts climat de l'ONU (Giec) qui expose les nombreux effets déjà à l’œuvre, et notamment la menace d'emballement au-delà de 1,5°C de réchauffement (par rapport aux niveaux pré-industriels): vagues de chaleur, extinctions d'espèces, ou déstabilisation des calottes polaires, source de montée des océans sur le long terme.

"Nous pouvons vraiment réaliser des progrès substantiels pour protéger l'environnement sans pour autant renoncer à assurer une croissance durable", a affirmé Paul Romer.

William Nordhaus a rappelé lundi que, pour lui, il était nécessaire de donner aux agents économiques, particuliers ou entreprises, des incitations à adopter des comportements vertueux en matière environnementale.

Pour les experts climat, les émissions de CO2 devront chuter drastiquement avant 2030 (-45% d'ici 2030) et le monde atteindre une "neutralité carbone" en 2050 (autrement dit il faudra cesser de mettre dans l'atmosphère plus de CO2 qu'on ne peut en retirer), pour rester à 1,5°C.

"Les mesures que nous devons prendre n'auraient pas été si difficiles si nous avions commencé plus tôt", a déclaré William Nordhaus, qui milite notamment pour une taxe carbone, uniforme et imposée à tous les pays pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l'atmosphère.

Les pays récalcitrants qui ne voudraient pas rejoindre ce "club du climat" seraient sanctionnés via des barrières douanières par exemple.

Le dernier-né des Nobel fête cette année ses cinquante ans. Créé en 1968 pour célébrer les 300 ans de la Banque de Suède, il est la récompense la plus prestigieuse pour un chercheur en économie.

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