Educapital, le pari de deux femmes pour numériser l'école

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Par Juliette RABAT - Paris (AFP)
Publié le 08 mars 2018 - 17:43
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Marie-Christine Levet (D) et Litzie Maarek (G) à Paris, le 5 mars 2018
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© JOEL SAGET / AFP
Marie-Christine Levet (D) et Litzie Maarek (G) à Paris, le 5 mars 2018
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Une direction bicéphale féminine, qui plus est dans le secteur plutôt conservateur de la finance, avait déjà de quoi interpeller. Mais la gageure est d'autant plus grande qu'Educapital, premier fonds d'investissement européen dédié à l'éducation et la formation, investit dans des start-up.

Dans le capital-investissement, "il y a très peu de femmes, nous sommes d'ailleurs le seul fonds avec deux femmes associées en France même s'il existe des femmes associées dans des fonds ou même fondatrices", analyse Marie-Christine Levet, qui est à l'initiative et dirige, avec Litzie Maarek, ce véhicule de financement créé en octobre 2017.

Si le milieu de la finance peut être "très conservateur", celui de la technologie s'avère toutefois plutôt "moins sexiste que certains autres milieux", selon elle.

Pour autant, en 2016, seules 13% des jeunes pousses dans le domaine de la technologie ayant levé des fonds étaient dirigées par des femmes, selon l'édition 2017 du baromètre StartHer KPMG.

Les barrières seraient avant tout psychologiques, les femmes étant moins enclines à prendre des risques mais aussi à suivre des carrières scientifiques ou d'ingénieurs car elles y sont moins incitées, dès l'enfance.

"C'est à l'école de former les filles à faire des choses différentes (...). Quand on offre aux filles des poupées et aux garçons des jeux de construction, on les met dans des cases", estime Mme Levet.

Au fond, "notre secteur est plus masculin que celui dans lequel on investit" avec l'émergence progressive d'une nouvelle génération de jeunes femmes créant leur entreprise dès la fin de leurs études, renchérit Litzie Maarek, forte d'une expérience de dix ans en banque d'affaires et en capital-investissement.

- Plafond de verre -

Côté finance, le tableau est un peu moins encourageant: si le capital-investissement se féminise peu à peu, la proportion de femmes y décroît nettement à mesure de leur progression dans la hiérarchie.

Elles ont ainsi représenté 23% en moyenne des équipes d'investissement en 2016, mais pour tomber à 15% dans les effectifs d'associés, selon l'étude annuelle sur la mixité dans le capital-investissement publiée par l'Afic en novembre 2017.

Aussi, quand Marie-Christine Levet, après avoir passé 20 ans à diriger ou co-diriger des entreprises du web français, décide de créer son propre fonds, elle le fait avec "l'envie de travailler dans un secteur qui fasse du sens", celui de l'éducation.

Mais aussi l'un des rares domaines à échapper encore au grand bouleversement induit par l'arrivée de nouveaux acteurs utilisant la technologie pour proposer des modèles de rupture, à l'instar d'Airbnb dans l'hôtellerie ou de BlaBlaCar dans les transports.

"On s'est dit que si on voulait faire éclore ce secteur, il fallait peut-être avancer de l'argent qui lui soit dédié", comme ce qui se fait déjà aux Etats-Unis et en Chine, les deux poids lourds sur ce marché dit de "l'EdTech", ou éducation par le numérique, qui devrait peser quelque 250 milliards de dollars en 2020, remarque Mme Levet.

"L'école n'a pas changé depuis notre génération, depuis la génération de nos parents, depuis Jules Ferry" alors que les compétences requises par la société du XXIe siècle n'ont jamais évolué aussi vite, constate cette mère de deux enfants de 12 et 10 ans.

"Je trouvais qu'il y avait un fossé entre ce que les enfants font dans leur vie quotidienne et ce qu'ils apprennent à l'école et qu'il fallait un peu rassembler ces deux mondes", explique-t-elle.

"Avec l'arrivée de l'intelligence artificielle, un grand nombre de métiers vont être supprimés, il faut donc mieux former les jeunes à la société de demain et donc aussi transformer l'école et mieux utiliser tout ce que le numérique peut apporter dans l'éducation", argue Mme Levet.

Et pour faire émerger les futurs "champions européens" de l'EdTech, Educapital, qui a réalisé une première levée de fonds de 45 millions d'euros à l'automne, entend financer une quinzaine de jeunes sociétés innovantes, à l'image d'"AppScho", une application mobile mettant en relation les étudiants et leur école.

"C'est en arrivant dans un nouveau secteur qu'on peut faire changer les choses et défricher un marché", conclut Mme Levet, consciente de jouer aussi un rôle de modèle pour des femmes tentées par l'aventure entrepreneuriale.

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