Exercice de transparence salariale dans une PME londonienne

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Par Rosie SCAMMELL - Londres (AFP)
Publié le 01 avril 2018 - 09:00
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Une PME londonienne a mis en place une politique salariale totalement transparente
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© NIKLAS HALLE'N / AFP/Archives
Une PME londonienne a mis en place une politique salariale totalement transparente
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Ils fixent eux-mêmes leurs salaires et savent combien gagnent leurs collègues: pas étonnant que les employés de la PME londonienne Smarkets soutiennent la politique de transparence salariale de leur entreprise.

Ici "la plupart des gens obtiennent ce qu'ils demandent", explique Angeline Mulet-Marquis, ingénieure en informatique dans cette société spécialisée dans les paris en ligne.

"Je crois que ça marche plutôt bien, surtout parce que nous embauchons des gens qui sont très investis dans l'entreprise (...) et qui veulent être bien payés", ajoute-t-elle.

Les jeunes diplômés touchent environ 45.000 livres annuels (51.330 euros) tandis que les salaires des ingénieurs les plus qualifiés atteignent six chiffres.

Et les augmentations de 10 à 30% sont courantes. Angeline a reçu 12% de plus que ce qu'elle demandait, comme ses collègues ont pu le constater sur l'intranet de la société.

Partant du principe que des employés heureux sont plus productifs, l'entreprise met à leur disposition une table de baby-foot, des jeux vidéo, tandis que des cuisiniers viennent chaque jour leur préparer de savoureux petits plats.

Cette politique salariale permet aussi à l'entreprise de disposer d'atouts face à ses concurrents pour attirer et garder les talents, et s'inscrit dans un débat plus large au Royaume-Uni sur la transparence et l'égalité salariale.

- Equité -

Chez Smarkets, Susana Pinto est chargée de superviser les révisions salariales semestrielles. Pour obtenir une augmentation, un employé doit demander à cinq collègues de lui fournir des références et une proposition du salaire qu'il devrait toucher.

L'idée n'est pas de passer la brosse à reluire en disant de son collègue qu'il est "génial", explique Susana. Au contraire, "c'est une véritable enquête".

L'augmentation est décidée après discussion et comparaison avec les entreprises du secteur. Si l'employé n'est pas satisfait, il peut toujours fixer lui-même son propre salaire.

Cette dernière hypothèse reste toutefois exceptionnelle, car les employés sont bien conscients qu'il leur faudra ensuite rendre des comptes à leurs collègues qui avaient proposé un salaire différent.

"Ce qu'il y a de bien avec la transparence salariale, c'est que, par défaut, elle permet l'équité dans l'entreprise", souligne Susana.

A Londres, centre mondial d'affaires et incubateur de startups, Smarkets fait quasi figure d'exception et quantité d'entreprises sont loin d'être aussi vertueuses. A commencer par la BBC.

La vénérable institution médiatique britannique avait été en 2017 contrainte de révéler les salaires de ses dirigeants et présentateurs vedettes, laissant apparaître d'importants écarts de rémunérations, et des inégalités significatives entre hommes et femmes à poste équivalent.

Mais est-il possible de transposer le mode de fonctionnement de Smarkets, qui ne compte qu'une centaine d'employés, dans une entreprise de plus grande taille, ou d'un secteur différent?

Pas évident, répondent plusieurs employés de Smarkets.

Ce type d'organisation peut fonctionner dans des secteurs tels que la vente, où il existe des marqueurs de performance clairs, estime Jordi Blanes i Vidal, professeur de management à la London School of Economics. Mais pas forcément dans ceux "où il n'est pas aussi facile de justifier les différences de rémunération", ajoute-t-il.

- Autres pays, autre moeurs -

Dans d'autres pays, la transparence salariale est plus volontiers acceptée. En Norvège par exemple, les services fiscaux publient en ligne des informations sur les contribuables, leurs revenus et patrimoines.

Il existe des approches similaires en Suède et en Finlande, tandis qu'en Irlande, les employés ont le droit de demander des informations sur les salaires à travail équivalent.

Selon une étude de la Commission européenne, la "sensibilité culturelle" reste l'obstacle le plus courant à la généralisation de la transparence salariale. Au Royaume-Uni, ce sont les coûts administratifs qui seraient liés à cette nouvelle procédure qui posent problème.

Malgré ces difficultés, Angeline Mulet-Marquis ne saurait que trop conseiller aux entreprises de suivre l'exemple de Smarkets, un modèle qui passe selon elle par un effort de communication au sein de l'entreprise.

"Si vos équipes ne communiquent pas bien, ce processus ne fonctionnera probablement pas de toute façon. Vous devez construire sur quelque chose qui est déjà sain", dit-elle.

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