France : les banques de détail se convertissent à l'intelligence artificielle

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Par Julie JAMMOT - Paris (AFP)
Publié le 29 mars 2018 - 09:53
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Les banques françaises s'emparent progressivement des technologies d'intelligence artificielle (IA) comme un moyen de se réinventer, à l'heure où la numérisation transforme leur relation avec les clients.

"Lancer une banque en 2017 sans embarquer l'IA aurait été, de notre point de vue, une faute", assure André Coisne, le directeur général d'Orange Bank, la nouvelle banque en ligne qui a conquis près de 100.000 clients en quatre mois.

Analyse de risque, détection des fraudes, règlementation: l'IA s'est immiscée dans tout le secteur.

Chez Orange Bank, l'IA a pris la forme d’un chatbot, ou robot conversationnel. "Djingo" peut répondre 24h/24 aux questions des clients, même personnalisées, et déclencher certaines actions, comme bloquer une carte bancaire.

Une année a été nécessaire pour rendre le robot opérationnel et il "comprend" aujourd'hui 85% des demandes, contre environ 70% au début. Quelques blocages subsistent, notamment sémantiques: "notre langue française est parfois très nuancée", s’amuse André Coisne.

C'est une des caractéristiques essentielles de l'IA: la capacité de la machine à apprendre. Il ne s'agit plus seulement de coder un logiciel en envisageant toutes les possibilités de façon exhaustive, mais bien de nourrir le programme avec beaucoup, beaucoup de données. L'utilisation devient un moyen de faire progresser la machine.

Au Crédit Mutuel, les 20.000 conseillers bancaires disposent d'assistants virtuels pour trier le courrier électronique, préparer des réponses et fournir plus rapidement des informations personnalisées aux clients sur les produits.

- Watson en embuscade -

Derrière Djingo et ces conseillers "augmentés", une même technologie: Watson, le service d'intelligence artificielle d'IBM. Deux configurations différentes pour un même objectif: rendre la relation avec les clients plus productive.

Car les particuliers réalisent la plupart des opérations courantes en ligne ou sur leur mobile: les banques doivent donc s'assurer que les relations non virtuelles leur apportent de la valeur ajoutée.

"Il faut voir l'IA comme un catalyseur de transformation de la banque", analyse Nicolas Sekkaki, président d'IBM France.

"Les banques doivent réinventer la façon dont elles passent d’une culture +produit+ à une +expérience client+".

Les banques semblent toutes d’accord sur un point: l'IA libère les chargés de clientèle des tâches répétitives au profit des tâches complexes, elles leur permettent de s'impliquer dans de nouveaux domaines - comme l'assurance - et de mieux se consacrer aux clients.

"Watson n'est pas une intelligence déterministe", note Nicolas Sekkaki. "Vous avez en fait un dialogue presque intellectuel avec la machine: vous comprenez son raisonnement, vous comprenez comment elle est arrivée à la conclusion. Et les pièces justificatives ont encore plus de valeur que la conclusion elle-même".

- Evolution des métiers -

Des professionnels plus efficaces mais moins nombreux ?

Sans l'IA, "on aurait dû recruter plus de personnes", reconnaît André Coisne. L'IA pourrait entraîner des pertes d'emplois, mais surtout la transformation des métiers et la recherche de nouvelles compétences, comme les spécialistes des données.

"Les recrutements devraient se concentrer sur des profils qualifiés", note le rapport de France Stratégie sur l'IA et le travail publié mercredi.

"Le robot ne va pas remplacer l'humain", rassure Cédric Curtil, directeur Stratégie et Innovation à la Société générale pour la banque de détail en France. Au sein de la banque, l'IA est utilisée pour la détection de fraude, dans un chatbot en test pour les clients. Mais aussi pour des simulations d'investissements en grand nombre, impossible humainement jusqu'alors.

"C'est comme remplacer l'addition posée à la main par une calculatrice: les outils d'IA permettent au conseiller et au client d’avoir une vision plus juste et plus rapide", explique Cédric Curtil.

"Ce n'est pas aussi révolutionnaire qu'on veut le croire", confirme Jean Ferré, directeur du Boston Consulting Group. "C'est simplement la mise en place, à échelle, du traitement de très grandes masses de données".

Révolution ou pas, aucune banque ne peut s'y soustraire. Le rapport Villani, qui ne retient pas la banque comme chantier prioritaire, note que l'impulsion privée pour le développement de l'IA y est déjà "largement amorcée". Même la Caisse d'épargne, qui met surtout l'accent sur les agences bancaires à proximité de ses clients, a fait des tests d'IA.

"On n'a pas d'algorithme auto-apprenant, on est plus sur de l'exploitation de données, que certains appellent sûrement de l'IA pour frimer", estime Marion Dewagenaere, secrétaire générale de la Caisse d'Epargne Ile-de-France. "Mais on est sans doute plus modeste".

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