A Genève, l'automobile peste contre les politiques européennes

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Par Daniel ARONSSOHN et Yann SCHREIBER - Genève (AFP)
Publié le 05 mars 2019 - 05:00
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Le stand Toyota se prépare à l'ouverture du Salon automobile de Genève, le 4 mars 2019
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© Fabrice COFFRINI / AFP
Le stand Toyota se prépare à l'ouverture du Salon automobile de Genève, le 4 mars 2019
© Fabrice COFFRINI / AFP

Le salon automobile de Genève s'est ouvert à la presse mardi avec quantité de nouveaux modèles électriques, mais les constructeurs ont profité des rencontres avec les médias pour critiquer les contraintes écologiques en Europe, qui menacent selon eux l'emploi dans la filière.

L'automobile s'engage à marche forcée dans l'électrification des motorisations, contrainte de réduire rapidement ses émissions de CO2 pour respecter des limites imposées par l'Union européenne à partir de 2020, et encore durcies à l'horizon 2030, sous peine de pénalités financières.

Les voitures électriques sont "une bonne solution", "il faut qu'on accélère, mais comme toute accélération, il y a une limite et je pense qu'on l'a franchie", a déclaré le patron du constructeur français PSA, Carlos Tavares, qui est aussi le président de l'Association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA).

En 2020, "l'exclusion du marché des voitures les moins performantes en CO2 va se traduire par des arrêts d'usines, tous les constructeurs européens y réfléchissent", a-t-il mis en garde, épinglant "l'amateurisme" de décisions politiques qui prennent "le risque majeur d'amener toute l'industrie dans une impasse".

Harald Krüger, le patron de BMW, a qualifié les objectifs pour 2030 fixés en décembre par l'UE de "défi dramatique" pour la filière.

Les constructeurs ont certes tous développé des modèles 100% électriques mais ils craignent une demande insuffisante en raison du prix trop élevé des batteries, d'origine asiatique, du manque d'infrastructures de recharge et d'une fiscalité insuffisamment incitative dans certains pays.

"C'est sûr que la filière va être sous tension", a reconnu Thierry Bolloré, directeur général de Renault, pionnier du véhicule électrique et leader de ce marché avec son partenaire Nissan en Europe.

Mais "on se réjouit de la compétition qui arrive, on a pris pas mal d'avance, c'est pour cela que nous vendons autant et de façon profitable", a-t-il ajouté, précisant que le 100% électrique représentait déjà 3% du chiffre d'affaires de la marque.

Cette rupture technologique offre une occasion pour des start-up de venir défier les constructeurs historiques, à l'image de Tesla dont la berline Model 3 a commencé à être livrée en Europe en février.

Toni Piëch, arrière-petit-fils de Ferdinand Porsche, fondateur de Porsche et Volkswagen, a ainsi dévoilé mardi un prototype de sportive de luxe électrique. La jeune pousse suédoise Polestar, filiale de Volvo, lui-même propriété du chinois Geely, a présenté une berline électrique, qui sera produite en Chine à partir de 2020.

Genève reste le lieu d'exposition favori des marques de luxe et des véhicules de sport ultraperformants fabriqués en petite série.

Bentley a fait de l'effet avec sa Bentayga Speed, qui revendique le titre de SUV de série le plus rapide du monde (plus de 300 km/h). Tandis que Ferrari a montré sa nouvelle F8 Tributo, dotée d'un moteur essence de 720 chevaux.

Dans un autre registre, celui des citadines de grande diffusion, deux nouveautés françaises tenaient le haut de l'affiche à Genève: la cinquième génération de la Renault Clio et la nouvelle Peugeot 208, avec une déclinaison électrique inédite.

Les patrons de l'automobile ont aussi profité de la tribune du salon pour exprimer leurs inquiétudes sur le retournement du marché mondial depuis l'été 2018, conséquence d'une baisse inattendue en Chine, leur hantise d'un "Brexit" désordonné et leur rejet des guerres commerciales.

Le patron du géant Volkswagen, Herbert Diess, a dit redouter ce scénario mais aussi déploré le conflit commercial entre les Etats-Unis et la Chine, qui a durement touché les constructeurs allemands, et les menaces de barrières douanières brandies par Washington contre les importations européennes.

"Si tout va dans le mauvais sens, ce sera très dur à encaisser, même pour nous", a-t-il déclaré.

Sur les menaces du président Donald Trump visant l'Europe, mais en fait surtout l'Allemagne, le patron de Daimler Dieter Zetsche, a affirmé avoir "des discussions bonnes et très constructives" avec l'administration américaine, "qui réduisent la probabilité de nouveaux droits de douane".

Ces risques qui s'accumulent pourraient bien faire des victimes. Les constructeurs qui auront le mieux passé les obstacles pourraient se positionner en sauveur des entreprises en difficulté.

Carlos Tavares espère faire partie des gagnants avec PSA et a ouvert la porte à des alliances. Fiat Chrysler a également indiqué qu'il étudierait des opportunités.

Après les journées réservées à la presse, le salon ouvrira ses portes jeudi au public. Plus de 660.000 visiteurs sont attendus pour contempler les plus de 900 voitures exposées du 7 au 17 mars.

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