Italie : la croissance en berne complique encore l'équation du gouvernement

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Par Céline CORNU - Milan (AFP)
Publié le 30 octobre 2018 - 14:34
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Le chef du gouvernement Giuseppe Conte, en visite en Inde le 30 octobre 2018
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Le chef du gouvernement Giuseppe Conte, en visite en Inde le 30 octobre 2018
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La croissance économique de l'Italie a marqué une pause au troisième trimestre, compliquant encore l'équation du gouvernement populiste, qui a basé son budget 2019 sur des prévisions très optimistes.

Rome a néanmoins d'ores et déjà affirmé qu'il ne reviendrait pas sur son budget, qui prévoit un déficit à 2,4% du PIB, estimant que celui-ci permettrait au contraire d'inverser cette tendance négative.

Après plus de trois ans de croissance, le PIB (Produit intérieur brut) italien est resté stable au troisième trimestre par rapport au précédent, selon une estimation publiée mardi par l'Institut national des statistiques (Istat).

Sur les neuf premiers mois de l'année, la croissance de la troisième économie de la zone euro atteint 1%.

Les marchés n'ont guère apprécié cette annonce.

Le spread, le très surveillé écart entre les taux d'emprunt allemand et italien à dix ans, a dépassé de nouveau le seuil symbolique des 300 points, s'établissant à 312 points contre 298 la veille au soir. L'indice phare de la Bourse de Milan, le FTSE Mib, a lui perdu 0,22%.

Le chiffre du PIB est "encore plus faible que notre prévision de +0,1%, qui était au-dessus du consensus", a souligné Nicola Nobile, expert à Oxford Economics.

Cette stagnation reflète "la faiblesse persistante de l'activité industrielle (...) à peine contrebalancée par la petite croissance des autres secteurs", a expliqué l'Istat.

- "Mauvaise nouvelle" -

"Ce très faible résultat est une mauvaise nouvelle pour le gouvernement, qui, afin de mettre en œuvre ses choix budgétaires, a établi un objectif de croissance optimiste pour l'an prochain", a noté M. Nobile.

La coalition populiste, formée de la Ligue (extrême droite) et du Mouvement Cinq Etoiles (M5S, antisystème), a conçu son budget --déjà considéré comme "hors des clous" européens-- en tablant sur une croissance de 1,5% en 2019. Soit largement au-dessus de ce que prévoient le reste des observateurs ou agences internationales.

Le Fonds monétaire international (FMI) table sur 1% et la Commission européenne sur 1,1%.

Rome prévoit un déficit à 2,4%, contre 0,8% promis par le précédent gouvernement de centre gauche, mais si la croissance est plus faible que prévu, le déficit risque d'être encore plus important.

La péninsule n'est pas la seule à subir le ralentissement: c'est le cas de l'ensemble de la zone euro (+0,2% de croissance au troisième trimestre), en raison notamment des tensions commerciales au niveau mondial et des négociations sur le Brexit.

Rome a pointé du doigt ce contexte peu favorable et souligné qu'elle refusait de changer le chiffre annoncé.

- "Inverser la tendance" -

"L'arrêt du PIB est conjoncturel, il concerne toute l'économie européenne. Nous l'avions prévu et c'est pour cela que nous avons décidé d'avoir un budget expansif", qui vise "à inverser cette tendance" et éviter une récession, a souligné le chef du gouvernement Giuseppe Conte, en visite en Inde.

"Nous n'avons pas improvisé ce budget" et "les 2,4% demeurent", a-t-il ajouté, tout en répétant que le gouvernement n'entendait pas dépasser ce seuil, même en cas de croissance moindre.

Mais le patronat a déjà tiré la sonnette d'alarme.

"Si la croissance n'est pas là dans les prochains mois, ce sera la responsabilité de ce gouvernement et de lui seul", a souligné le président de la Confindustria, Vincenzo Boccia, se disant à sa disposition "pour lui faire des propositions intelligentes".

La Commission européenne a déjà rejeté le projet de budget italien, fustigeant "une déviation claire, nette et assumée" par rapport aux règles européennes.

Rome a jusqu'au 13 novembre pour lui fournir un budget révisé. Elle s'expose sinon à une "procédure pour déficit excessif", susceptible d'aboutir à des sanctions financières.

L'Italie a parallèlement vu la note de sa dette dégradée par l'agence Moody's, tandis que Standard & Poor's a abaissé vendredi sa perspective, de stable à négative.

"La voie économique et budgétaire planifiée par le gouvernement a érodé la confiance des investisseurs", a souligné S&P.

Depuis mi-mai, date du début des négociations pour la formation de la coalition, la Bourse de Milan a perdu quelque 22%, et le spread a plus que doublé.

Les marchés et la Commission européenne s'inquiètent parce que l'Italie ploie déjà sous une dette colossale de 2.300 milliards d'euros (131% de son PIB).

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