La fièvre du bitcoin enflamme le marché immobilier de Floride

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Par Leila MACOR - Miami (AFP)
Publié le 13 janvier 2018 - 10:22
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Le cours du Bitcoin en dollars en 2017
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© Matthias BOLLMEYER / AFP/Archives
Le cours du Bitcoin en dollars en 2017
© Matthias BOLLMEYER / AFP/Archives

L'embrasement du bitcoin, monnaie virtuelle dont le cours s'est envolé ces derniers mois, a atteint le marché immobilier des Etats-Unis, en particulier en Floride, en permettant aux investisseurs étrangers d'esquiver le contrôle des changes dans leur pays et des sanctions économiques.

Fin 2017, le bitcoin a été utilisé pour payer quelque 75 propriétés sur le sol américain --notamment dans le sud de la Floride et en Californie--, selon la société immobilière Redfin.

"Bitcoin accepté": cette précision se multiplie dans le descriptif des annonces de vente de logements à Miami et ses alentours. Un vendeur a même été plus loin en n'acceptant que cette crypto-devise pour son appartement proposé à 500.000 dollars.

Cela malgré l'extrême volatilité de cette crypto-monnaie. Elle a commencé l'année 2017 autour de 1.000 dollars et a frôlé les 20.000 dollars en fin d'année, après une flambée erratique à l'approche des fêtes. Elle cotait vendredi autour de 15.000 dollars.

Son utilisation dans les transactions immobilières n'en est qu'à ses balbutiements et les acteurs du secteur se montrent sceptiques à cause de sa forte instabilité.

"Je serais épaté si, dans un an, nous constatons qu'il y a des centaines d'opérations immobilières en bitcoin", a commenté Jay Parker, patron pour la Floride du courtier en immobilier Douglas Elliman.

Ces transactions peuvent toutefois être un dérivatif pour les étrangers incapables d'investir aux Etats-Unis de manière classique, a relevé Charles Evans, économiste spécialisé dans le bitcoin à l'université Barry en Floride.

L'évolution du secteur immobilier "semble être tirée par des investisseurs internationaux qui contournent des contrôles bancaires et monétaires inefficaces chez eux et par des amateurs de monnaies virtuelles aux Etats-Unis", a-t-il expliqué à l'AFP.

Ainsi, lorsque des gouvernements limitent le montant des transferts, "le bitcoin permet aux personnes de contourner ces restrictions".

Les étrangers, avant même l'essor fulgurant du bitcoin, pesaient déjà lourd dans le marché immobilier du sud de la Floride.

Près de la moitié de ces acheteurs sont originaires d'Amérique latine. Au cours des cinq dernières années, ils venaient en premier lieu du Venezuela, devant le Brésil et l'Argentine, selon l'Association nationale des biens immobiliers.

- Blanchiment d'argent ? -

Les devises virtuelles offrent un autre avantage à certains étrangers: déjouer les sanctions économiques imposées par Washington.

M. Evans a cité l'exemple du Venezuela qui est soumis à un strict contrôle des changes et a subi une inflation de 2.616% en 2017. La quasi-totalité des membres du gouvernement chaviste du président Nicolas Maduro est également visée par des sanctions américaines.

De plus, a-t-il souligné, "le bitcoin intéresse beaucoup les Iraniens qui sont doublement affectés par des restrictions en Iran et des sanctions internationales".

Le blanchiment d'argent comme tremplin du marché immobilier de Floride est un secret de polichinelle, mais l'arrivée du bitcoin ne devrait pas éradiquer cette pratique répréhensible. Bien au contraire.

"C'est un moyen terrible pour blanchir de l'argent à grande échelle car toutes les transactions en bitcoin sont enregistrées dans le registre public des opérations Blockchain", a relevé M. Evans.

Ce registre "laisse beaucoup d'empreintes digitales donc si vous l'utilisez pour des raisons illégitimes, l'Etat et le gouvernement fédéral devraient disposer de tous les outils pour venir vous chercher", a prévenu Jose Felix Diaz, qui siège à la Chambre des représentants de Floride, dans un récent entretien à Politico.

Il est à l'origine d'une loi adoptée l'an dernier qui a ajouté les crypto-devises à la législation de la Floride contre le blanchiment d'argent.

Même son de cloche du côté de M. Parker car, même avec un paiement en bitcoin, "les propriétaires des immeubles peuvent toujours être retracés".

Il a anticipé que la mode des transactions payées en monnaies virtuelles sera aussi volatile que le cours de ces mêmes monnaies.

"C'est un subterfuge publicitaire. Il n'y a pas beaucoup de risque. Le seul risque, c'est si la monnaie s'effondre avant que vous ayez eu le temps de la liquider", a-t-il souligné. "Je pense que les gens qui utilisent le bitcoin pour essayer de vendre leur propriété le font dans l'idée que (la presse) va écrire dessus et leur offrir une meilleure exposition".

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