Le Japon vit sa plus longue expansion économique en trois décennies

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Par Anne BEADE - Tokyo (AFP)
Publié le 14 février 2018 - 10:21
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Le Mont Fuji, la plus haute montagne du Japon, vu derrière des gratte-ciels dans la région de Shinjuku à Tokyo, le 3 décembre 2017
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© Kazuhiro NOGI / AFP/Archives
Le Mont Fuji, la plus haute montagne du Japon, vu derrière des gratte-ciels dans la région de Shinjuku à Tokyo, le 3 décembre 2017
© Kazuhiro NOGI / AFP/Archives

Le Japon a aligné sur la période octobre-décembre son huitième trimestre positif d'affilée, une série inédite depuis la folle expansion de la bulle immobilière et financière à la fin des années 1980, même si l'élan s'est essoufflé en fin d'année.

Le produit intérieur brut (PIB) a augmenté de 0,1% par rapport aux trois mois précédents, selon les données préliminaires publiées mercredi par le gouvernement.

Le ministre de l'Economie Toshimitsu Motegi s'est aussitôt félicité de ces statistiques, rappelant que c'est la première fois en 28 ans que le Japon enchaîne huit trimestres positifs consécutifs. Il faut remonter aux années 1986 à 1989 pour trouver une phase plus longue (12 trimestres à l'époque).

"Comparé à la période de la bulle, nous jugeons solide l'expansion économique actuelle", a commenté le ministre, selon des propos rapportés par Bloomberg.

La hausse du quatrième trimestre, légèrement inférieure aux attentes des économistes compilées par l'agence Bloomberg (0,2%), représente cependant un net ralentissement après une hausse de 0,3% de janvier à mars, puis de 0,6% d'avril à juin et d'autant de juillet à septembre.

- 'A peine tangible' -

La troisième économie mondiale, qui a dégagé sur l'ensemble de l'année une croissance de 1,6% (après 0,9% en 2016), a réussi in extremis à rester dans le vert fin 2017 grâce à un rebond de la consommation des ménages (+0,5%) et à des investissements des entreprises toujours solides (+0,7%), à la faveur de profits en hausse, d'exportations plus dynamiques et de la nécessité de compenser la pénurie de main-d'oeuvre.

En revanche, les investissements dans l'immobilier résidentiel ont chuté, tout comme la demande publique alors que s'estompe l'effet du colossal plan de relance de 28.000 milliards de yens (210 milliards d'euros au cours actuel) annoncé en 2016 par le gouvernement. Le commerce extérieur a aussi apporté une contribution négative.

"La croissance est à peine tangible", a réagi dans une note Toru Suehiro, économiste de Mizuho Securities.

"Les dépenses des Japonais restent soumises à une constante pression à la baisse du fait de problèmes structurels comme le vieillissement de la population et une augmentation modeste des salaires", a-t-il souligné.

"La question importante est de savoir si la consommation des ménages (60% du PIB) peut durablement augmenter. Du fait de la faible hausse des rémunérations, les perspectives ne sont pas très positives", a renchéri Kowei Iwahara, de Natixis.

Pour autant, même modeste, l'embellie devrait se poursuivre dans un contexte économique mondial favorable et sous l'effet de la stratégie de relance "abenomics" du Premier ministre Shinzo Abe, mise en œuvre depuis fin 2012, pronostiquent les économistes.

- L'ombre d'un yen fort -

"Les entreprises bénéficient de toute une panoplie de mesures fiscales favorables", souligne Junko Nishioka, économiste de la Sumitomo Mitsui Banking Corporation, interrogée par l'AFP.

Après plusieurs années de vaches maigres, même si les "abenomics" ont marqué une avancée en la matière, elle veut croire en un coup de pouce salarial de leur part à l'occasion des négociations du printemps (entre syndicats et employeurs), sur fond de très faible taux de chômage.

Faute de cette impulsion, l'archipel a échoué pour l'heure à vaincre la déflation qui a paralysé son économie après l'éclatement de la bulle, un épisode qualifié de "décennies perdues". Les prix n'ont augmenté que de 0,5% en décembre, loin de l'objectif de la Banque du Japon (BoJ) qui peine à récolter les fruits de sa politique ultra-accommodante.

Son gouverneur Haruhiko Kuroda, choisi début 2013 par M. Abe pour décliner le versant monétaire des "abenomics", a promis de maintenir aussi longtemps que nécessaire le massif programme de rachat d'actifs de l'institution.

Son mandat se termine en avril, mais selon des informations de presse, il devrait être reconduit jusqu'en 2023, un gage de stabilité au moment où les marchés traversent une période mouvementée à la perspective des inflexions monétaires à venir aux Etats-Unis et dans la zone euro.

Wall Street a ainsi été le théâtre la semaine dernière de fortes fluctuations, provoquant par ricochet une chute de l'indice Nikkei de plus de 8% et un net renforcement du yen, valeur refuge. "Si les compagnies font de ces turbulences un prétexte pour renoncer à augmenter les salaires, le scénario pourrait s'assombrir", avertit Takeshi Minami, de l'institut de recherche Norinchukin.

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