Le pourboire au menu d'un vote à Washington

Auteur:
 
Par Inès DE MIRANDA - Washington (AFP)
Publié le 19 juin 2018 - 09:10
Image
Un panneau appelant à voter contre l'"Initiative 77" affiché dans un commerce lors d'une campagne "Save our tips" ("Sauvez nos pourboires") le 18 juin 2018 à Washington
Crédits
© MANDEL NGAN / AFP
Un panneau appelant à voter contre l'"Initiative 77" affiché dans un commerce lors d'une campagne "Save our tips" ("Sauvez nos pourboires") le 18 juin 2018 à Washington
© MANDEL NGAN / AFP

La fin d'un repas dans un restaurant aux Etats-Unis ne consiste pas simplement à sortir sa carte bancaire. Il faut auparavant calculer le pourboire, dont le montant est laissé au libre choix du client mais qui est attendu entre 15% et 20% du total de l'addition.

Un vote organisé mardi dans la capitale fédérale Washington sur un salaire horaire minimum pour les personnes rémunérées au pourboire pourrait cependant avoir des conséquences sur cette pratique, profondément ancrée dans la culture américaine.

Les électeurs doivent en effet se prononcer sur le "Minimum Wage Amendment Act" --ou "Initiative 77" comme la mesure est également appelée--, qui divise tout particulièrement le secteur de la restauration, employés comme propriétaires.

La campagne "Save Our Tips" (Sauvez nos pourboires) a été lancée par les détracteurs de ce texte, avec pléthore d'affiches placardées dans les devantures de restaurants et de bars de la capitale américaine et de prospectus distribués tous azimuts.

Les défenseurs d'un salaire minimum obligatoire de 15 dollars de l'heure d'ici 2025 se sont également mobilisés en distribuant des tracts plaidant pour "One Fair Wage" (Un salaire juste).

Pour l'heure, les employeurs de personnes rémunérées au pourboire sont exemptés du paiement du salaire minimum légal --12,50 dollars par heure actuellement-- et certains serveurs et serveuses ne sont payés que 3,33 dollars de l'heure.

Si les pourboires ne permettent pas d'atteindre le seuil légal, l'employeur est alors tenu de faire le complément.

Mais, souligne Christopher Maggiano, un entrepreneur à Washington et ancien serveur qui soutient l'"Initiative 77, "c'est très difficile à faire appliquer" et il y a un taux élevé de non respect de cette clause.

La mesure soumise au vote mardi vise à étendre à tous les travailleurs de la restauration --recevant pourboires ou non-- un minimum de 15 dollars de l'heure au plus tard en 2025.

Reste que de nombreux employés rémunérés au pourboire sont opposés à ce texte car ils gagnent actuellement davantage que ce minimum proposé et craignent qu'il n'entraîne une baisse drastique des pourboires, et donc de leurs revenus.

- Contre discrimination et harcèlement -

D'autre part, selon eux, les prix sur les menus devraient augmenter pour incorporer ce surcroît de dépense du côté employeur et les clients devraient être moins généreux envers leur serveur face à une addition plus salée. Pénalisant ceux-là même que la mesure doit aider.

Pour la campagne "One Fair Wage", ce minimum obligatoire doit permettre de lutter contre le détournement de revenus, contre la discrimination envers les employés sans contact avec les clients et contre le harcèlement sexuel.

"Dépendre des pourboires signifie subir des avances non sollicitées et des commentaires pour ne pas perdre le pourboire d'une table avec une grosse addition", a relevé M. Maggiano, qui siège au conseil de l'organisation Restaurant Opportunities Centers United.

Malachi Broadnax, investisseur dans la restauration, est contre l'initiative 77 et prévient qu'elle va entraîner une hausse des prix et une diminution des clients. "Nous allons devoir transférer (ce coût) sur le client", explique-t-il, évoquant des prix augmentés ou l'ajout de frais de service.

Pour Natalia Ribera, barmaid dans un établissement de la bouillonnante 14th Street, décourager le versement de pourboires va à coup sûr affecter la qualité du service.

"Je pense que le service est vraiment bon aux Etats-Unis en partie parce que les gens dépendent des pourboires quasiment à 100%", dit la jeune femme de 24 ans. "A l'étranger, le service n'est en général pas aussi bon".

Un avis partagé par M. Broadnax, qui compare les serveurs de la restauration à des vendeurs de voitures payés à la commission.

Woong Chang est un barman de 36 ans ayant grandi en Californie, l'un des sept Etats du pays disposant d'une législation similaire à l'"Initiative 77".

"C'est très variable", dit-il sur la dépendance à l'égard des pourboires. "Certaines semaines vous n'allez pas avoir ce que vous vous attendiez à avoir".

"Tout peut arriver et, soudainement, vous comptez sur votre dernier service avant de payer votre loyer, ou de payer vos factures, mais vous n'allez pas être en mesure de le faire".

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
bayrou
François Bayrou, baladin un jour, renaissant toujours
PORTRAIT CRACHE - François Bayrou, député, maire de Pau et plusieurs fois ministres, est surtout figure d’une opposition opportuniste. Éternel candidat malheureux à la...
20 avril 2024 - 10:45
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.