Adama Traoré : deux ans après sa mort, une marche pour empêcher un "déni de justice"

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Par Eve SZEFTEL et Anne LEC'HVIEN - Beaumont-sur-Oise (France) (AFP)
Publié le 21 juillet 2018 - 20:00
Mis à jour le 22 juillet 2018 - 09:38
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Une personne tient un portrait lors d'une marche, le 21 juillet 2018 à Paris, à la mémoire d'Adama Traoré, décédé il ya deux ans à la suite de son interpellation
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© FRANCOIS GUILLOT / AFP
Une personne tient un portrait lors d'une marche, le 21 juillet 2018 à Paris, à la mémoire d'Adama Traoré, décédé il ya deux ans à la suite de son interpellation
© FRANCOIS GUILLOT / AFP

"On n'oublie pas, on pardonne pas": deux ans après la mort d'Adama Traoré à la suite de son interpellation, quelque 1.500 personnes ont défilé en banlieue parisienne pour dénoncer la lenteur de la justice et exiger des "réponses" de l'Etat.

Fait remarquable, toutes les formations de gauche étaient représentées, du NPA au PCF en passant par la France insoumise (LFI) ou EELV, et jusqu'au Parti socialiste.

"Si on est aux côtés de la famille d'Adama Traoré, c'est pour leur dire que ce qui est arrivé à leur frère ne concerne pas qu'une personne noire issue des quartiers populaires, mais l'ensemble des Françaises et Français", a résumé David Cormand, secrétaire national d'EELV.

Comme l'an passé, la famille Traoré a tenu à rendre hommage à Adama en remontant les rues de la petite ville de Beaumont-sur-Oise (Val-d'Oise), à 30 kilomètres au nord de Paris, jusqu'au quartier HLM de Boyenval, où il a vécu. Il est mort dans la ville mitoyenne de Persan, le 19 juillet 2016, le jour de ses 24 ans.

Mais, cette année, la famille entendait aussi dénoncer avec force la lenteur de la justice, après avoir appris mardi qu'une expertise médicale très attendue - la quatrième - pour faire la lumière sur les causes de sa mort, encore très discutées deux ans après, ne serait pas rendue avant fin septembre.

Son décès - par "asphyxie", comme l'a établi une précédente expertise il y a un an - avait été constaté deux heures après son interpellation par les gendarmes, qui l'avaient maintenu au sol sous le poids de leurs corps, selon la technique du "placage ventral", mais sans lui porter de coups.

Le jeune homme, dont une expertise a révélé une fragilité cardiaque antérieure, avait fait un malaise dans leur véhicule avant de décéder dans la cour de la gendarmerie de Persan, la ville.

- Affaire Benalla -

Le cortège, qui a rassemblé entre 1.400 et 1.500 personnes selon la préfecture, a fait halte devant la caserne. Une minute de silence a été observée, une prière psalmodiée.

"On a tué Adama ce jour-là, dans la cour de cette gendarmerie", a lancé sa soeur aînée Assa Traoré au micro. "Un pays sans justice est un pays en danger", a-t-elle lancé, juchée sur un camion.

"C'est inadmissible ce qui est en train de se passer, on est dans un déni de justice. Les juges ont la volonté clairement d'étouffer l'affaire de mon frère", avait-elle affirmé plus tôt devant la presse.

"Nous allons passer à la vitesse supérieure. Nous allons soulever toute la France, nous allons soulever tous les quartiers (...) et on va aller renverser ce système", a-t-elle assuré.

"Pas de justice, pas de paix", a scandé la foule: un slogan frappé en noir et blanc sur de nombreux t-shirts.

"Ce qui me choque dans cette affaire, c'est que deux ans après, les gendarmes n'ont toujours pas été auditionnés. Pour que la justice passe, il faut la faire avancer à coups de pied au derrière", a dit François Ruffin, député LFI de la Somme.

"Il est temps que ce dossier avance, pour la famille, la mémoire de ce jeune homme, et pour tous les citoyens qui se sentent eux-mêmes injuriés dans le fait que cette affaire n'avance pas", a renchéri Benoît Hamon, fondateur de Générations.

Alors que la famille Traoré dénonce une "bavure policière", l'affaire Benalla, du nom de ce collaborateur d'Emmanuel Macron filmé en train de frapper des manifestants à Paris le 1er mai en se faisant passer pour un policier, est dans toutes les têtes. Sur une pancarte: "L'Etat protège des +Benalla+, nous on veut sauver des Adama".

"Il y a des gens qui sont protégés et d'autres qui n'arrivent même pas à avoir le minimum de justice pour quelqu'un qui est mort. Dans une France démocratique, ça met dans la tête des gens le soupçon, en disant +Est-ce que tous les citoyens sont égaux devant la loi?+", a dit Esther Benbassa, sénatrice EELV.

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