Allégorie aux mille visages, Marianne s'expose à Saint-Amand-les-eaux

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Par Elia VAISSIERE - Saint-Amand-les-Eaux (France) (AFP)
Publié le 28 février 2019 - 08:00
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Des bustes de Marianne exposés au musée de Saint-Amand-les-Eaux, le 27 février 2019 dans le Nord
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© FRANCOIS LO PRESTI / AFP
Des bustes de Marianne exposés au musée de Saint-Amand-les-Eaux, le 27 février 2019 dans le Nord
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Sage en diadème et pudique drapé, survoltée en bonnet phrygien et cocarde, austère, souriante ou fière: à Saint-Amand-les-eaux (Nord), une exposition retrace l'évolution de Marianne, allégorie aux multiples visages d'une République mouvante, reflet des soubresauts de l'histoire.

Depuis sa naissance, au moment de la Révolution, "Marianne s'est régulièrement transformée au gré des changements de régime, des péripéties politiques et évolutions sociétales, mais aussi des créateurs", résume Marianne Grevet, directrice du musée de la Tour abbatiale.

Bustes de plâtre ou de bronze, statuettes, coupures de presse, aquarelles, objets du quotidien: pour concevoir l'exposition "Les Marianne de la République", visible gratuitement jusqu'au 28 avril, la ville a pioché dans les collections de l'Assemblée nationale et du Sénat, du journaliste et collectionneur Pierre Bonte, du spécialiste de la caricature Guillaume Doizy, mais aussi de mairies et bibliothèques de la région.

"L'objectif était de sensibiliser un maximum de personnes à la notion de République, de mêler histoire, art et esthétique", explique Mme Grevet. Une longue frise chronologique "permet justement de replacer ces visages", parfois antagonistes, dans leur contexte.

Marianne est au départ rebelle et subversive. En 1792, au lendemain de la Révolution, la Convention décide de représenter la République sous les traits d'une jeune femme triomphante, vêtue à l'antique et coiffée d'un bonnet phrygien, symbole de liberté car porté dans l'empire romain par des esclaves affranchis. Les origines de son prénom, très répandu au XVIIIe siècle, ne sont cependant pas clairement déterminées.

Sur les gravures et premiers bustes qui se toisent en vitrine, de nombreux symboles sont dessinés ou sculptés, comme des chaînes ou jougs brisés, un faisceau de licteur, une cuirasse ou épée guerrière, une ruche représentant le travail, ou encore une cocarde patriote.

- "Caméléon" -

Mise à l'écart par Napoléon Bonaparte, Marianne réapparaît sous le règne de Louis Philippe, notamment dans la presse satirique, et devient le symbole des opposants républicains, héroïne émancipée des barricades, à demi-nue au milieu des combats.

Sous la IIe République en revanche, elle s'affiche aussi, sous l'influence des républicains modérés, sage et conservatrice, débarrassée de son bonnet et le front ceint d'une couronne végétale composée de laurier, de blé, ou encore d'olivier.

A nouveau contestataire sous le second empire, elle triomphe avec la IIIe République. Mais au pouvoir, Adolphe Thiers, craignant des sursauts révolutionnaires, bannit un temps le fameux bonnet, qu'il trouve trop séditieux.

L'image de Marianne est largement diffusée sous forme de bustes, timbres ou pièces de monnaie à travers la France, dans les mairies, bâtiments et lieux publics. Objet de culte dans les milieux populaires, elle exalte le patriotisme en temps de guerre, devient symbole de Résistance sous l'occupation et reste véhémente en mai 68.

Sorcière, vieillarde sénile, monstre de foire: elle est aussi, tout au long de son histoire, férocement grimée dans les caricatures de l'opposition politique, qui dénonce les travers du régime. "Tel un caméléon", l'allégorie "s'adapte à toutes les sensibilités", explique l'historien Guillaume Doizy sur une pancarte.

Peu à peu banalisée au XXe siècle, elle inspire les artistes et prend des formes nouvelles. Ainsi se côtoient sur les présentoirs des Mariannes "stars", inspirées de Brigitte Bardot, Laetitia Casta ou Catherine Deneuve et d'autres géométriques ou plus stylisées.

Toujours "ancrée dans l'imaginaire", de plus en plus multiculturelle, "elle reparaît régulièrement avec toute sa ferveur, dans les moments d'unité nationale ou les manifestations, comme on l'a vu récemment chez les +gilets jaunes=", et pourrait même endosser un jour les traits de l'ancienne ministre Simone Veil, comme proposé récemment par le parti Agir, rappelle Marianne Grevet. Car "même inconscients de toutes ces facettes, les Français sont très attachés à Marianne, qui incarne leurs valeurs et leur liberté".

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