Anesthésiste alcoolique d'Orthez : 3 ans de prison et interdiction d'exercer requis

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Par Nathalie ALONSO - Pau (AFP)
Publié le 09 octobre 2020 - 16:25
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L'anesthésiste belge Helga Wauters s'entretient avec son avocat à Pau, le 8 octobre 2020. Elle doit répondre d'"homicide involontaire", un délit punissable de trois ans de prison maximum
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© GAIZKA IROZ / AFP
L'anesthésiste belge Helga Wauters s'entretient avec son avocat, Me Antoine Vey, à Pau le 8 octobre 2020
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Trois ans de prison ferme et l'interdiction définitive d'exercer la médecine ont été requis vendredi au tribunal de Pau à l'encontre de l'anesthésiste belge Helga Wauters, pour "avoir piétiné le serment d'Hippocrate" en entrant alcoolisée au bloc le 26 septembre 2014 pour une césarienne qui a tourné au drame.

Après deux jours d'audience marqués par le silence de la prévenue, la procureure Orlane Yaouanq a demandé au tribunal correctionnel de prononcer la peine maximale prévue pour le délit d'"homicide involontaire".

"Je n'ai trouvé aucun texte légal pour dire : +On ne rentre pas alcoolisé dans un bloc+, il n'y a pas de texte car on fait confiance au bon sens", a-t-elle justifié.

Outre cette peine, la magistrate a réclamé "une interdiction d'exercer" la médecine "à titre définitif": l'anesthésiste, toujours dépendante à l'alcool, a "piétiné le serment d'Hippocrate, le serment de soigner", a-t-elle assené. La décision sera rendue le 12 novembre.

Helga Wauters, 51 ans, était jugée pour une série d'erreurs médicales alors qu'elle intervenait, sous l'emprise de l'alcool, sur l'accouchement sous césarienne de Xynthia Hawke, 28 ans, le 26 septembre 2014, à la maternité d'Orthez.

Installée en France, cette Britannique du Somerset était décédée quatre jours plus tard des suites d'un défaut d'oxygène, sans avoir vu son bébé, indemne.

D'après l'enquête, le médecin, en poste depuis une dizaine de jours, avait intubé les voies digestives, au lieu des respiratoires, sans s'en apercevoir. Puis elle avait utilisé un ballon manuel au lieu du respirateur du bloc, qu'elle ne savait pas faire fonctionner, selon des témoins. "Un carnage", selon la procureure.

Devant les enquêteurs, l'anesthésiste reconnaîtra avoir commencé sa journée, "comme tous les jours", par un mélange d'eau et de vodka, et avoir de nouveau bu dans la soirée. Chez elle, les gendarmes avaient retrouvé 14 bouteilles de vokda.

- "Silence méprisant" -

Après une rupture sentimentale en 2005, Helga Wauters, avait entamé un parcours d'"alcoolisation excessive et quotidienne", qui lui avait valu deux licenciements pour faute grave en Belgique, en 2013 et 2014, en dépit de plusieurs tentatives de désintoxication, a rappelé la procureure.

Alors embauchée depuis seulement une dizaine de jours en France, en septembre 2014, parce que "grillée" dans son pays, elle "a cumulé les négligences, imprudences et maladresses" au bloc, a insisté le ministère public.

C'est "la seule responsable", a ajouté la procureure, balayant la responsabilité "collective" des établissements hospitaliers d'Orthez, qui avaient bénéficié d'un non-lieu au cours de l'enquête.

Son passé "n'a en réalité jamais été porté à la connaissance" de la clinique Labat qui mettait ses soignants et ses locaux à disposition du centre hospitalier d'Orthez, et "l'ordre des médecins belge n'en n'avait jamais eu vent".

"Sa responsabilité est pleinement assumée et intégrée", a répondu Me Antoine Vey, l'avocat du médecin. "Elle n'a pas été à la hauteur de la mission qui était la sienne mais elle ne mérite pas d'être traitée comme une moins que rien", a-t-il déclaré.

Mme Wauters, jugée libre, avait lu une déclaration avant d'annoncer qu'elle utiliserait son droit au silence. "Je ne mérite pas la prison", avait-elle dit, sans regard ni mot d'excuse pour les parties civiles.

Un "silence méprisant et irrespectueux", pour Yannick Balthazar, père de l'enfant de Xynthia. "Il sait que sa maman est décédée des suites d’un accident, je préfère ne rien lui cacher (...) je n’ai pas envie qu’il se sente coupable", a-t-il ensuite confié à l'AFP.

En s'avançant à la barre au dernier jour de son procès, l'anesthésiste s'est dite "sincèrement désolée". "Je n'ai pas trouvé les mots pour le dire, je ne sais pas exprimer la douleur", a ajouté la quinquagénaire. Hors audience, elle a voulu parler à la famille Hawke, qui a refusé. "C'est trop tard" pour Iris, la sœur de Xynthia.

"Ma femme et moi, nous sommes venus ici pour apprendre les faits, la vérité, ce qui s'est passé ce soir-là (...) Maintenant nous savons ... et ce n'est pas beau. Nous avons dû attendre six ans avec la douleur tout ce temps", a déclaré à l'AFP Fraser Hawke, père de la victime.

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