Attachés à leur statut, les cheminots prêts à en faire un casus belli

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Par Elisabeth ROLLAND - Paris (AFP)
Publié le 16 février 2018 - 19:19
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Les syndicats de cheminots s'inquiètent de plusieurs points des réformes envisagées à la SNCF
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© Thomas SAMSON / AFP/Archives
Attachés à leur statut, les cheminots prêts à en faire un casus belli
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Acquis social historique ou privilège à revoir, le statut des cheminots, très protecteur, leur garantit notamment l'emploi à vie. Sa remise en cause, avancée par le rapport Spinetta sur le rail, pourrait tourner au casus belli entre le gouvernement et les syndicats.

Issu d'un décret de 1950, le statut génère à la SNCF des "excédents de personnel", juge Jean-Cyril Spinetta. L'ex-patron d'Air France propose l'arrêt du "recrutement au statut" pour les nouveaux embauchés, en préservant les droits des personnels en bénéficiant déjà.

"Il faudra qu'on m'explique en quoi le statut des cheminots est la cause des problèmes et des incidents que rencontrent bon nombre aujourd'hui de voyageurs", a lancé vendredi le leader de la CGT Philippe Martinez, appelant à "s'attaquer au fond des problèmes de la SNCF".

La CGT, premier syndicat à la SNCF, a appelé les cheminots à une "manifestation nationale" le 22 mars pour défendre notamment leur statut. Les trois autres syndicats représentatifs, Unsa, SUD-Rail et CFDT, sont aussi prêts à se mobiliser pour contrer "l'attaque" du rapport Spinetta, remis jeudi au gouvernement.

Consigné dans un document numéroté RH0001, le statut définit le contrat de travail des cheminots. Il concerne actuellement "un peu plus de 90%" des effectifs du groupe public ferroviaire, soit environ 140.000 personnes, selon la SNCF. Le reste du personnel est déjà embauché hors statut.

Parmi les nouveaux recrutés récemment, 75% le sont sous statut et 25% en CDI. Il y a une limite d'âge: il faut avoir moins de 30 ans à l'embauche pour bénéficier du statut.

Le texte définit les bases du contrat de travail et fixe l'essentiel des garanties collectives des cheminots: la rémunération et ses règles d'évolution automatique, le déroulement des carrières, la mobilité, les congés, le droit syndical, etc.

Il offre une garantie d'emploi puisqu'il prévoit seulement trois cas de départ: démission, retraite ou radiation; pas de licenciement économique. Il organise également un régime spécial de prévoyance et de retraite.

L'organisation du temps de travail des personnels roulants et sédentaires est elle régie par le RH0077, qui s'applique aussi bien aux cheminots statutaires qu'aux autres.

- "Samedi, dimanche et jours férié" -

"Une fois qu'on a bien compris la réalité de ce statut, on se rend compte qu'il n'y a pas grand-chose", a dit un ancien conducteur de train, Franck, vendredi sur BFMTV. "Aujourd'hui, quand on fait des recrutements à la SNCF, plus de la moitié des candidats quittent la salle quand on leur parle des conditions de travail, de rémunération et des horaires. Personne n'a envie de vivre en marge d'une vie sociale, parce que vous vivez à part" quand vous êtes conducteur et "ça n'intéresse plus personne".

Sur Twitter, Sylvain, cheminot, ironise sur "la dette de la SNCF" due aux "vilains cheminots et à leurs privilèges", alors qu'ils "se lèvent un coup à 03H45 ou se couchent à 05H00 et qui font ça samedi, dimanche et fériés pour un salaire ridicule".

Mais pour Jean-Cyril Spinetta, le statut gêne la SNCF: il lui faut "plus +d'agilité+" compte tenu de la concurrence à venir, au plus tard en 2023 dans le transport des voyageurs, après la libéralisation du fret en 2006. Ce régime "pèse sur les coûts de l'entreprise, sur son dynamisme" et génère "des pertes de compétitivité", selon le rapport.

Avec le statut, "tout est écrit, noué, figé", déplore une source interne du groupe public.

Pour la CFDTL, le préserver est "indispensable": remettre en cause ce "pacte social" est "une ligne rouge à ne pas franchir". "Un drapeau rouge" pour l'Unsa, tandis que SUD-Rail n'exclut pas une grève pour défendre "le contrat de travail" des cheminots.

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