Au procès des attentats de 2015, les "loupés" de l'identitaire Claude Hermant

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Par Valentin BONTEMPS - Paris (AFP)
Publié le 01 octobre 2020 - 19:44
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La cour au Tribunal de Paris lors du procès des attentats de janvier 2015, le 16 septembre 2020
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© Benoit PEYRUCQ / AFP
La cour au Tribunal de Paris lors du procès des attentats de janvier 2015, le 16 septembre 2020
© Benoit PEYRUCQ / AFP

Une figure d'extrême droite... dans un dossier de terrorisme islamiste. Accusé d'avoir fourni une partie du matériel utilisé par Amédy Coulibaly, le trafiquant d'armes Claude Hermant s'est défendu en évoquant un "ratage" policier, lors du procès des attentats de janvier 2015.

"C'est un énorme loupé, que les choses soient claires. Il n'y a pas une nuit où je n'y pense pas": silhouette massive et crâne rasé, Claude Hermant affiche un air pugnace lorsqu'il évoque devant la cour d'assises spéciale de Paris l'"horreur" des attaques jihadistes.

"Ces armes étaient facilement tracées, les services de police étaient dessus", martèle le quinquagénaire, pantalon à poches kaki, baskets noires et barbe blanche, avant de mettre en cause les enquêteurs. "Je ne comprends pas comment ces attentats n'ont pas pu être arrêtés".

Figure de la mouvance identitaire lilloise et ex-indicateur des douanes et des gendarmes, Claude Hermant est accusé d'avoir fourni huit des armes retrouvées en possession d'Amédy Coulibaly, dont les fusils d'assaut et des pistolets automatiques.

Cet arsenal acquis auprès d'une entreprise slovaque, avait été stocké dans une baraque à frites appartenant à sa compagne, en compagnie de nombreuses autres armes. Elles ont été remises en état de marche puis revendues à des intermédiaires, jusqu'à finir aux mains de Coulibaly.

Un circuit sur lequel Hermant affirme ne rien savoir. "Les huit armes sont bien passées entre mes mains et celles de mon épouse, mais nous ne les avons pas remilitarisées", prétend le quinquagénaire, sans indiquer qui les aurait "déneutralisées".

"Il devrait peut être y avoir d'autres coupables dans ce box mais ce n'est pas moi", soutient l'ancien indicateur, qui affirme avoir participé à ce trafic dans le cadre d'une mission d'"infiltration" et ne connaître "aucun" des accusés jugés devant la cour d'assises.

- "responsabilité morale" -

Malgré son rôle avéré dans la fourniture d'armes, Claude Hermant n'a pas été renvoyé sur le banc des accusés dans le dossier des attentats: il a été jugé et condamné à huit ans de prison dans le cadre d'une procédure disjointe instruite à Lille, portant sur un trafic d'armes plus conséquent.

Un choix déploré par les avocats de la défense, mais aussi -- officiellement -- par le quinquagénaire. "Mon avocat a demandé à cor et à cri que je sois dans le dossier", assure l'ancien indicateur, qui nie avoir bénéficié d'un "traitement privilégié".

N'estime-t-il pas avoir une responsabilité dans le décès de Clarissa Jean-Philippe, tuée dans l'attaque de Montrouge le 8 janvier, et dans ceux des quatre victimes de l'Hyper Cacher ? Face à la désinvolture du témoin, le président Régis de Jorna s'agace:

"- Quel est le but final d'une arme?

- Le but d'une arme, ça dépend de celui qui va s'en servir.

- Vous êtes conscient qu'avec ces armes-là on peut tuer ?

- Pour tuer, on peut se servir d'un hachoir, on peut se servir d'un camion. Regardez l'actualité....

- Si les armes utilisées par Coulibaly n'avaient pas été trafiquées, les faits ne seraient pas arrivés, oui ou non?"

- Je réponds à la demande de milliers de chasseurs, de passionnés de tir...

- Et de terroristes. Les fusils d'assaut, en général, peu de chasseurs s'en servent", ironise le président.

Mis en difficulté, Claude Hermant botte en touche, évoque le "flou juridique" sur l'achat des armes, une "vérité des faits" différente de la "vérité judiciaire". Avant de reconnaître, à la demande des parties civiles, une "responsabilité morale", mais pas "opérationnelle".

"J'ai été surveillé 14 mois par quatre services de police différents, avec des filatures et des bornages", raconte le quinquagénaire, décrit comme "affabulateur" et "manipulateur" par un enquêteur.

"Donc soit je suis très bon, soit ils sont très très cons", ajoute cet ancien du service d'ordre du Front national, connu pour avoir fondé aux début des années 2000 un bar privé réservé aux blancs: "la maison Flamande".

Aujourd'hui sorti de prison, mais soumis à une obligation de "suivi psychologique", le quinquagénaire assure ne plus vendre que des "duvets" et des "couteaux" et avoir coupé les ponts avec son passé d'indicateur. "Pour moi, c'est fini et enterré. Faut que je prenne ma retraite".

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