Grève, Paris et sa couronne dans la jungle des transports

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Par Chloe ROUVEYROLLES-BAZIRE - Paris (AFP)
Publié le 11 décembre 2019 - 16:29
Mis à jour le 12 décembre 2019 - 16:11
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Des cyclistes dans les rues de Paris lors de la grève des transports contre la réforme des retraites, le 10 décembre 2019
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© Philippe LOPEZ / AFP
Des cyclistes dans les rues de Paris lors de la grève des transports contre la réforme des retraites, le 10 décembre 2019
© Philippe LOPEZ / AFP

Coups de sonnettes et de klaxons en pagaille, "pardons" scandés sur tous les tons, et parfois des injures: tous les moyens sont bons pour les Franciliens pour se sortir de la mêlée des transports toujours saturés mercredi, au septième jour de grève.

"Ne me poussez pas, sinon je tape !" prévient Evelyne Bonfill, 57 ans, sur le quai du RER B à la Gare du Nord, la plus grande de la capitale. Le train vient d'arriver, elle tente de retenir les dizaines de voyageurs massés derrière elle en se collant à la porte du wagon.

"D'habitude, entre chez moi et mon travail c'est une ligne directe, mais là elle est fermée, je dois prendre quatre RER et un bus. J'ai l'impression de faire le tour du monde," explique cette gestionnaire administrative.

"Je le prends avec le sourire mais les gens sont des vrais sauvages. C'est très dangereux, on se fait tous bousculer, certains manquent carrément de tomber." Elle relève son défi: elle voyagera assise jusqu'à la station du Châtelet.

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"Tout le monde est à cran" 

Les conditions de déplacement restent très difficiles: neuf lignes de métro sur seize sont fermées, 40% des liaisons en bus sont assurées.

A la Défense, où se croisent chaque jour des milliers d’usagers du métro, du RER ou du tram, même marée humaine.

Pour accéder à la ligne 1, l'une des deux lignes -- automatiques -- à fonctionner normalement, les voyageurs se massent derrière un ruban de chantier maintenu par le personnel de la gare. La foule trépigne mais se laisse guider docilement par les instructions: "on va vous donner accès aux quais, restez calmes."

 

Soupir irrité et regards assassins

Une fois arrivés sur le quai, à destination de l'est parisien, certains pressent le pas et commencent même à courir pour se placer stratégiquement, avant de se faire rappeler à l'ordre: "ça ne sert à rien de courir, vous allez vous faire mal, il y a un train toutes les deux minutes." Soupir irrité et regards assassins des intéressés, qui ralentissent aussitôt.

Certains couloirs de stations ont beau être bondés, des bagarres ont beau éclater, ou les noms d'oiseaux fuser, le gros des voyageurs reste calme.

"Dans le pire des cas, les gens s'énervent parce qu'ils doivent aller bosser, ils poussent et ils crient à l'arrivée du tram mais une fois à bord, ils sont déjà passés à autre chose," s'amuse Alain Brun, 53 ans, brancardier: "Tout le monde sait que c'est la grève, et qu'on peut être en retard."

 

Sur les routes, c'est la même jungle.

"A chaque feu rouge, les gens croient qu'ils sont dans le tour de France et se doublent pour être les premiers à démarrer," note Bérengère Colas, 30 ans, chef de projet.

Habituée à rallier l'est parisien à son bureau dans le centre de Paris, elle regrette "le stress induit par la cohabitation entre des cyclistes chevronnés, équipés, qui tracent pour ne pas perdre une minute et les trottinettes qui roulent côte à côte pour discuter ou les débutants à vélo qui conduisent au milieu de la route, en traînant."

"Tout le monde est à cran sur la route, même à 05H00 quand je commence ma tournée en voiture," explique Françoise Garel, 63 ans, infirmière libérale dans le XIIème arrondissement de Paris.

 

La galère ne se limite pas aux deux roues.

Pour ceux qui ne veulent pas prendre le risque d'être bousculé, il reste plusieurs options mais aucune n'est parfaite.

Ainsi du covoiturage pour Carole, ingénieure de 32 ans. Mais "le soir avec les bouchons, mieux vaut rentrer à pied". Le taxi ou VTC pour Nabil Moussaoui, consultant de 30 ans, mais "quand ça monte à 100 euros, ça énerve."

Nanaëlle Aas, 22 ans, ose les vélos ou trottinettes à louer mais "il faut parfois marcher trente minutes pour en trouver un qui fonctionne."

A 86 ans, Edmée Megnin, n'a pas l'intention de se mettre "aux patins à roulettes". Elle a laissé passer deux autobus pleins à craquer avant de se décider à monter à bord de la ligne 74 et se dit "désolée" pour ceux qui travaillent: "Moi, j'ai un luxe qu'ils n'ont pas, il n'y a que mon chat qui m'attend."

 

 

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