Aux urgences, le personnel au bord de la rupture durant l'été

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Par Thierry TRANCHANT - Paris (AFP)
Publié le 03 août 2018 - 17:17
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Les vagues de chaleur inquiètent le personnel des urgences de l'hôpital Cochin à Paris, qui se trouve affecté fortement par la canicule
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© PHILIPPE LOPEZ / AFP/Archives
Les vagues de chaleur inquiètent le personnel des urgences de l'hôpital Cochin à Paris, qui se trouve affecté fortement par la canicule
© PHILIPPE LOPEZ / AFP/Archives

"J'espère qu'ils vont réussir à tenir." Avec les fermetures de lits et les congés, le personnel des urgences, en sous-effectif, peine à correctement soigner des malades qui perdent leurs nerfs. En découlent stress et grande fatigue, le tout aggravé par la canicule.

Dès les chaleurs du week-end du 14 juillet, "le personnel a commencé à faire des malaises, à plus de 30°, huit heures d'affilée dans un service, on ne peut plus travailler aussi rapidement", raconte à l'AFP une infirmière des urgences de l'hôpital Cochin à Paris.

Quinze jours et deux mails à la direction plus tard, plusieurs ventilateurs ont été installés et une "salle rafraîchissante" a été mise à disposition.

Mais beaucoup ne sont pas encore totalement remis. Avec "cette deuxième vague de chaleur qui arrive, j'espère qu'ils vont réussir à tenir mais je pense que (des membres du personnel) vont être malades et risquent d'être arrêtés", continue l'infirmière.

Outre la chaleur, ce sont les congés qui minent le personnel. "Ils nous ont divisé par deux les personnes remplacées pendant les vacances", explique une infirmière de nuit des urgences de l'hôpital Lariboisière, également à Paris.

La qualité des soins aux patients en pâtit. Dans une salle d'attente qu'elle décrit comme "un chaudron", "il y a des chances qu'(on) ne voit pas quelqu'un dont l'état se dégrade".

Jeudi, la ministre de la Santé Agnès Buzyn affirmait que la situation sanitaire liée à la canicule était "maîtrisée" sur l'essentiel de la France avec cependant "des tensions" dans le Grand Est.

Concernant Lariboisière, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris a, elle, assuré à l'AFP que la "direction du groupe hospitalier s'est notamment engagée à sécuriser les renforts humains (jour et nuit) pour les pics d'activité prévisibles" et "sécuriser les remplacements des absences longues des agents des urgences".

La direction a également effectué plusieurs visites cette semaine, raconte l'infirmière: "Mais c'est toujours la même chose, ils passent la matin. Le matin, c'est plus calme les urgences. Moi, j'aimerais bien qu'ils viennent entre 13h et 1h du matin."

- "Pleurs" et "burn-out" -

Pour pallier le manque d'effectifs, les urgences ont recours aux heures supplémentaires ou à des intérimaires. Mais ces derniers connaissent moins bien les services et leur niveau de compétence est variable, raconte un médecin urgentiste de Granville, en Normandie.

"On a déjà eu des soucis de personnes qui nécessitaient une réanimation avec une intubation, on a été obligé d'attendre le SMUR (Service mobile d'urgence et de réanimation, ndlr) pour que le médecin qui sache intuber revienne", explique-t-il.

Et quand ce n'est pas le personnel, ce sont les lits qui manquent à cause des congés. "Les solutions trouvées paradoxalement, c'est de fermer des services (autres que les urgences, ndlr) plutôt que de remplacer", poursuit l'urgentiste.

Conséquence: c'est une "quarantaine de lits" auxquels pourraient avoir recours les urgences de Granville qui sont indisponibles.

Le manque d'effectif et de lits créent une attente de plusieurs heures pour des malades qui peuvent devenir agressifs lorsqu'ils s'impatientent.

Aux urgences de la Timone à Marseille, les insultes et les agressions sont quotidiennes, souligne une infirmière de nuit en précisant qu'une de ses collègues s'est récemment retrouvée avec une fracture du genou à cause d'une bagarre entre patients: "Les gens en salle d'attente, ils se bagarrent parce qu'ils ne veulent pas attendre, +et pourquoi lui il est passé avant moi?+, +pourquoi on attend quatre, cinq, six heures aux urgences?+."

Un représentant de la direction générale de l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM) a signalé à l'AFP que deux agents de sécurité sont présents aux urgences.

Le personnel de nuit, "en pleurs" et "en burn-out" selon cette infirmière, souffre en plus d'un gros manque d'aides soignantes cet été.

Il est notamment dû à "un absentéisme maladie ordinaire très très élevé depuis juillet", estime l'AP-HM, qui assure avoir débloqué des heures supplémentaires en juillet et commencé à recourir à l'intérim jeudi soir.

Les urgences vont-elles bientôt pouvoir souffler? "Ca fait des années qu'on est en manque d'effectif. Ca n'arrive pas que l'été, ça arrive tout le temps", insiste l'infirmière de Lariboisière.

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