Bioéthique : "ne pas confondre débat et consensus" pour Buzyn, Belloubet et Vidal

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Par Charlotte HILL, Amélie BAUBEAU, Gabriel BOUROVITCH - Paris (AFP)
Publié le 22 septembre 2019 - 17:02
Mis à jour le 23 septembre 2019 - 12:52
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La ministre de la Santé Agnès Buzyn le 10 septembre 2019 à l'Assemblée Nationale
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© ERIC FEFERBERG / AFP/Archives
La ministre de la Santé Agnès Buzyn le 10 septembre 2019 à l'Assemblée Nationale
© ERIC FEFERBERG / AFP/Archives

A la veille d'un débat sensible à l'Assemblée sur le projet de loi bioéthique, les trois ministres en charge du sujet affirment dans un entretien à l'AFP leur "très grande volonté d'aboutir" sans bouleverser les grandes lignes d'un texte qu'elle jugent "très équilibré".

Elles avancent sur une ligne de crête et n'entendent pas en dévier. Parce que sur la bioéthique, "on bascule vite d'un côté ou de l'autre: on ouvre une possibilité, les amendements la ferment, ou inversement", explique la ministre de la Santé Agnès Buzyn.

Et si le gouvernement n'a "pas fermé la porte" à quelques changements en commission, c'est parce qu'ils "ne modifiaient pas profondément la structure du texte", dont l'adoption définitive est souhaitée "avant l'été prochain".

- "Pas un combat" -

Voilà les députés prévenus, alors que l'examen du texte dans l'hémicycle s'annonce agité. "Nous savons que des députés utiliseront ce moment comme une tribune", permettant "à des positions extrêmes d'avoir un moment de parole", ajoute la ministre de la Santé.

Face aux crispations de la droite et du clergé, comme aux revendications de la gauche et des associations, l'exécutif assume sa ligne: "Il ne faut pas confondre la recherche d'un débat où tout le monde peut s'exprimer avec la recherche d'un consensus", prévient Frédérique Vidal.

Pour la ministre de la Recherche, à la fin "la question ne sera pas qui a gagné ou qui a perdu, mais comment se fait l'évolution de notre société".

En l'occurrence, l'opinion a déjà tranché, à en croire Nicole Belloubet: "Quand on regarde les sondages, on voit bien qu'il y a une majorité sur l'ouverture de la PMA aux couples de femmes et sur d'autres thèmes".

Dès lors, pour la garde des Sceaux "ce n'est pas une question de combat, il faut entendre les gens et affirmer nos positions".

- GPA: "pas sa place ici" -

Pas question donc de légiférer sur la GPA (gestation pour autrui), même si l'agenda de la loi se télescope avec le calendrier judiciaire. Une décision de la Cour de cassation sur les enfants nés de GPA à l'étranger est attendue "dans quelques semaines", mais "elle ne trouve pas sa place ici", tranche la ministre de la Justice.

"Il n'y aura dans le texte aucune disposition consacrée à la filiation", hormis pour "tirer les conséquences de l'ouverture de la PMA aux couples de femmes", prévient-elle.

Sur ce point, le gouvernement a revu sa copie en commission pour ne pas prêter le flanc aux accusations de discrimination. Une concession suffisante: "Il ne faut pas que l'arbre cache la forêt. L'essentiel pour nous, c'est cette ouverture de droit" pour les couples de femmes, qui ne sont toutefois "pas exactement dans la même situation face à la procréation qu'un couple hétérosexuel", souligne Mme Belloubet.

Même fermeté sur la PMA post-mortem, qui divise tous les groupes politiques et a été retoquée de justesse en commission. "Des situations rarissimes qui posent des problèmes juridiques et éthiques assez compliqués", résume Mme Buzyn, qui met en avant "l'intérêt supérieur de l'enfant" et le "risque de pressions familiales" sur les veuves.

- "Sagesse" et "ouverture" -

Les ministres sont moins catégoriques sur les enjeux de la recherche et de la génétique. Le diagnostic préimplantatoire (DPI), qui ne peut aujourd'hui être prescrit que pour rechercher une anomalie spécifique à chaque fois (mucoviscidose, myopathie...) est "la décision la plus difficile éthiquement", reconnaît la ministre de la Santé, car "les histoires individuelles sont atroces et le choix sociétal n'est pas anodin".

Le gouvernement, qui privilégie le statu quo, "aura une position de sagesse sur ce sujet" et "la réponse sera issue du débat au Parlement", annonce Mme Vidal.

Sur le cas des enfants "nés avec une ambiguïté sexuelle" (ou "intersexes"), Mme Buzyn confirme une "ouverture" pour "harmoniser les prises en charge", avec "un amendement qui actera dans la loi qu'il faut une attention ou une vigilance particulière".

En complément, Mme Belloubet envisage "un délai pour reporter l'inscription à l'état civil" de ces enfants, de l'ordre de 3 mois.

Quoi qu'il en soit, de nombreuses questions demeureront en suspens jusqu'à la prochaine révision de la loi bioéthique, dans 7 ans et pas plus tôt comme le demandent certains députés et chercheurs.

"La périodicité actuelle nous paraît convenir", juge Mme Vidal. Un rythme qui permet de maintenir des "gardes-fous" face aux avancées de la science, justifie Mme Buzyn: "Ce n'est pas parce que c'est possible que c'est souhaitable".

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