"A bout", les personnels des maisons de retraite en grève

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Par Jessica LOPEZ - Paris (AFP)
Publié le 30 janvier 2018 - 05:55
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Des personnels au chevet des personnes âgées sont en grève mardi pour réclamer davantage de moyens afin de s'occuper "dignement" des aînés, une mobilisation nationale inédite dont l'ampleur est diffic
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© PASCAL LACHENAUD / AFP/Archives
Ils se disent "cassés", "usés", "à bout". Des personnels au chevet des personnes âgées sont en grève mardi pour réclamer davantage de moyens afin de s'occuper "dignement" des aînés, une mobilisation nationale inédite dont l'ampleur est difficile à prévoir
© PASCAL LACHENAUD / AFP/Archives

Ils se disent "cassés", "usés", "à bout". Des personnels au chevet des personnes âgées sont en grève mardi partout en France pour réclamer davantage de moyens afin de s'occuper "dignement" des aînés, une mobilisation inédite soutenue par des familles de résidents des maisons de retraite.

A l'appel d'une large intersyndicale (CGT, CFDT, FO, Unsa, CFTC, CFE-CGC et SUD), avec le soutien de l'association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA) et d'associations de retraités, des débrayages sont prévus dans des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et dans des services d'aide et de soins à domicile.

Des rassemblements sont organisés sur tout le territoire, par exemple à Nantes et Lyon (environ 600 participants dans chacune de ces villes selon la police), à Strasbourg (près de 500), à Limoges (200 à 300), à Marseille (entre 100 et 200), à Nice (une centaine) ou encore à Lille.

Par manque d'effectifs, Sabrina Palagonia, 29 ans, aide-soignante à l’Ehpad de Cimiez (CHU de Nice), a vu les conditions de travail se dégrader depuis son arrivée il y a six ans, avec des répercussions sur les personnes âgées. "Normalement c’est une douche par semaine, mais par manque de personnel certains pensionnaires sont parfois sans prendre de douche pendant deux à trois semaines".

Hella Kherief, ex-aide-soignante à Marseille, dénonce une "maltraitance sournoise" due à "un manque de moyens permanent". "On n'a plus le temps de parler aux gens, on n'arrive plus à avoir de communication".

Serge Dalorso, dont la mère de 86 ans, est résidente d'un Ehpad marseillais, est venu "par solidarité" avec des personnels qui n'ont "pas le temps" de s'occuper de sa mère "avec décence, avec humanité". Tout comme Christian Cabanes, 63 ans, et sa soeur Josette, à Nice, dont la maman de 98 ans "souffre" de ces conditions détériorées.

A Paris, un rassemblement est prévu à 14H00 devant le ministère des Solidarités et de la Santé, où une délégation doit être reçue.

Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, a évoqué mardi "une violence institutionnelle", subie à la fois par les personnes âgées et les personnels des maisons de retraite médicalisées.

- "Situation explosive" -

Depuis plusieurs mois, les personnels réclament "davantage de moyens humains pour plus de dignité". En 2017, une centaine de grèves dans des Ehpad ont été recensées, dont la plus médiatique, aux Opalines à Foucherans (Jura), a duré près de trois mois.

"On a entre 12 et 15 toilettes à faire par matinée, on n'a plus de temps d'écoute, de sorties... Ceux qui peuvent encore marcher, on les met dans un fauteuil, ça va plus vite. Pour faire manger les résidents, c'est un à chaque bras", avait témoigné jeudi Sandrine Ossart (CGT), aide-soignante à Nantes depuis 26 ans, "à bout".

Pour elle, cette journée de mobilisation "attendue depuis dix ans" sera l'occasion "de dire qu'on est cassés, usés". Des témoignages similaires sont apparus sur twitter avec le mot-dièse #balancetonEhpad.

La ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn a assuré mardi matin comprendre la colère et "l'épuisement" des personnels. Ces dernières années, "les besoins en personnel ont augmenté sans que forcément les financements suivent", a-t-elle concédé, rappelant que "les personnes âgées qui arrivent en Ehpad sont de plus en plus dépendantes".

En octobre déjà, des représentants syndicaux avaient adressé une lettre à Emmanuel Macron pour lui signaler une "situation explosive".

Deux revendications dominent: l'application d'un ratio d'un agent par résident, contre 0,6 en moyenne actuellement, et l'abrogation d'une réforme contestée du financement, qui prévoit de faire converger progressivement jusqu'en 2023 les dotations aux Ehpad publics et privés.

Cette dernière va "aggraver davantage la situation financière des Ehpad publics" et conduire à des "suppressions de postes", affirment les grévistes.

Agnès Buzyn avait annoncé la semaine dernière le déblocage de 50 millions d'euros supplémentaires pour les établissements en difficulté, somme jugée insuffisante par les syndicats.

Près de 600.000 personnes vivent aujourd'hui dans l'un des 7.200 Ehpad, selon le ministère de la Santé. 400.000 personnes y travaillent.

La gauche (NPA, PS, Insoumis) ainsi que LR ont apporté leur soutien au mouvement.

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