Commando de Notre-Dame : jusqu'à 30 ans de réclusion requis dans le procès du "jihad au féminin"

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Par Caroline TAIX - Paris (AFP)
Publié le 10 octobre 2019 - 22:19
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Elles sont le "visage du jihad au féminin": des peines allant de 20 à 30 ans de réclusion criminelle ont été requises jeudi devant la cour d'assises spéciale de Paris contre quatre femmes, trois ans après un attentat raté près de Notre-Dame.

Elles ont été "le bras armé" du groupe Etat islamique (EI) et ont montré "une détermination sans faille", démarre l'avocate générale en introduction du réquisitoire. Elle parle de l'"engagement maximal" de ces jihadistes, qui avaient prêté allégeance à l'EI et envoyé des vidéos de revendication d'attentats à venir. "Elles étaient animées par cette volonté de tuer".

Dans la nuit du 3 au 4 septembre 2016, deux d'entre elles --Inès Madani et Ornella Gilligmann-- garaient une voiture remplie de bonbonnes de gaz devant des restaurants près de Notre-Dame et tentaient de l'incendier avec du gasoil. Le choix de ce carburant impossible à enflammer avec une allumette a permis d'éviter une explosion meurtrière.

Après l'échec de cet attentat, Inès Madani s'était retranchée chez Amel Sakaou à Boussy-Saint-Antoine, en Essonne, guidée par Rachid Kassim, propagandiste de l'EI. Toutes deux avaient été rejointes par Sarah Hervouët. Le 8 septembre, se sachant traquées par la police, les trois femmes quittaient l'appartement armées de couteaux de cuisine. Sarah Hervouët avait alors porté un coup de couteau à un policier en civil.

Cette affaire avait révélé le rôle actif des femmes dans le jihad, prêtes à commettre une attaque en France à défaut de partir en Syrie ou en Irak.

"Si les bonbonnes de gaz avaient explosé, si des victimes étaient décédées (...), on ne se poserait pas la question de la sanction : il serait naturel de prononcer la réclusion criminelle à perpétuité", explique l'avocat général Jean-Michel Bourlès. "La sanction ne devra pas être dans le symbole", ajoute-t-il.

Sans surprise, les réquisitions les plus lourdes ciblent Inès Madani: 30 ans avec une période de sûreté des deux tiers. Son âge au moment des faits --19 ans-- est "le seul élément" qui conduit le parquet à ne pas requérir la perpétuité.

Inès Madani "doit savoir que la société croit qu'elle est capable d'évoluer", ajoute Jean-Michel Bourlès dans ce réquisitoire à deux voix.

Sa collègue, qui ne souhaite pas que son nom soit mentionné, la dit "redoutablement intelligente". Entre le 4 et le 8 septembre 2016, "elle ne fera aucune erreur (...). A aucun moment elle ne faiblira ou ne se rendra pour mettre fin à ce périple mortifère". Elle parle d'un "aveuglement total pour cette idéologie" jihadiste.

- Perpétuité requise contre Kassim -

Ornella Gilligmann, qui affirme avoir volontairement fait échouer l'attentat à la voiture piégée, est loin d'avoir convaincu les avocats généraux, qui pointent ses "incohérences". "Elles ont toutes les deux acheté des bonbonnes, et ce n'était pas pour faire un barbecue!", lâche Jean-Michel Bourlès. Vingt-cinq ans de réclusion, avec une période de sûreté de deux tiers, sont requis contre cette mère de trois enfants.

Contre Sarah Hervouët, le parquet réclame 20 ans de réclusion avec une période de sûreté des deux tiers. "Le sang a coulé dans ce dossier et c'est Sarah Hervouët qui en est l'auteur", explique l'avocate générale. "Nous ne pouvons pas faire des paris trop risqués. La preuve du désengagement (de l'islam radical), c'est à Sarah Hervouët de l'apporter".

Même réquisition contre Amel Sakaou, qui a refusé d'assister à son procès depuis son ouverture. Contre Samia Chalel, accusée d'avoir aidé Inès Madani à trouver un point de chute après l'attentat raté, le parquet requiert 10 ans de réclusion.

Deux hommes apparaissent également dans ce dossier. Rachid Kassim, "celui sans lequel rien ne se serait produit", est jugé par défaut, car il serait mort en Irak en 2017. Il a "le rôle le plus important", pour Jean-Michel Bourlès, qui demande la perpétuité.

Mohamed Aberouz, jugé pour non-dénonciation de crime, est par ailleurs soupçonné d'avoir participé au double assassinat jihadiste de policiers à Magnanville en 2016. "C'est le plus dangereux", selon l'avocate générale, qui requiert la peine maximale de 5 ans d'emprisonnement. "Le jihad, c'est sa vie!", conclut-elle.

Le procès, qui a démarré le 23 septembre, se poursuit vendredi avec les plaidoiries de la défense. Verdict attendu lundi ou mardi.

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