ETA : dernier acte de la dissolution au Pays Basque français

Auteur:
 
Par Colette LARRABURU - Cambo-les-Bains (France) (AFP)
Publié le 04 mai 2018 - 06:00
Image
Capture d'une vidéo du 3 avril 2018 montrant à Genève David Harland, directeur exécutif du Centre pour le Dialogue Humanitaire, lisant un communiqué de l'ETA annonçant sa dissolution
Crédits
© Eloi ROUYER / AFP
Capture d'une vidéo du 3 avril 2018 montrant à Genève David Harland, directeur exécutif du Centre pour le Dialogue Humanitaire, lisant un communiqué de l'ETA annonçant sa dissoluti
© Eloi ROUYER / AFP

L'ETA achève vendredi son processus de dissolution lors d'une "conférence" aux allures de cérémonie d'adieux à Cambo-les-Bains, au sud-ouest de la France, où des personnalités internationales viendront se porter garantes de la bonne foi de feu l'organisation indépendantiste basque.

Aboutissement d'une lente scénographie, cette conférence est censée clore toute une série d'annonces qui, depuis plus d'un mois, martèlent le même message via plusieurs canaux médiatiques: ETA --Euskadi Ta Askatasuna, soit "Pays Basque et Liberté"--, créée en 1959, s'autodissout, un an après avoir rendu les armes le 8 avril 2017.

Mercredi, c'était un courrier de l'ETA qui était posté par un journal en ligne espagnol diario.es, annonçant sans ambiguïté que l'organisation a "mis fin à sa fonction".

Jeudi, l'ETA diffusait dans les médias espagnols une "déclaration finale" enregistrée par Jose Antonio Urrutikoetxea, dit "Josu Ternera", chef historique de l'ETA, disparu dans la nature depuis 2002.

Cet homme, poursuivi pour plusieurs assassinats, y annonce en voix off que l'organisation clandestine a "démantelé l'ensemble de ses structures" et mis "fin à toute activité politique".

Cette "déclaration finale" a aussi été lue à Genève par le directeur exécutif du Centre Henry Dunant pour le Dialogue Humanitaire.

Et le dernier acte aux allures de reddition est prévu vendredi à midi pile, à Arnaga, l'immense demeure de l'écrivain français Edmond Rostand (1868-1918), auteur de "Cyrano de Bergerac".

Des personnalités internationales viennent y clore devant les caméras la dernière insurrection armée d'Europe occidentale, avec 829 morts imputés à l'organisation qui, à coups d'enlèvements et d'attentats, a tenté sans succès d'obtenir l'indépendance du Pays Basque et de la Navarre, pour finir décimée par les arrestations de ses chefs, et rejetée par la majorité de la population.

Sur la tribune, on attend le Nord-Irlandais Gerry Adams, ancien dirigeant du Sinn Fein pendant 34 ans, qui milite contre la souveraineté britannique en Ulster; l'ancien Premier ministre irlandais Bertie Ahern, l'homme politique mexicain Cuauhtémoc Cardenas, et Jonathan Powell, diplomate britannique.

Selon la presse espagnole, des représentants du PNV, le parti nationaliste basque, et de Podemos (gauche radicale) seraient aussi attendus.

- "Pas d'impunité" -

Ce cérémonial est calqué sur la conférence d'Aiete en 2011 à Saint-Sébastien (Pays Basque espagnol) qui, sous l'égide de Kofi Annan, ancien secrétaire général de l'ONU et prix Nobel de la Paix, avait débouché sur un cessez-le-feu d'ETA.

Depuis lors, l'ETA a voulu suivre un processus de paix modelé, entre autres, sur celui des FARC de Colombie: désarmement, démobilisation, réintégration. A la différence notable que ce processus n'a été mené que par une seule des parties prenantes au conflit au Pays Basque, ETA.

Madrid a en effet toujours refusé le moindre geste d'apaisement, poussé par les puissantes associations de victimes. "Quoi qu'elle fasse, l'ETA ne trouvera aucune faille et pas d'impunité pour ses crimes", a encore déclaré jeudi le chef du gouvernement conservateur Mariano Rajoy.

Le Collectif des victimes du terrorisme (Covite) a lui exigé que l'ETA condamne la terreur et cesse de rendre des hommages publics à ses militants quand ils sortent de prison. Il attend aussi qu'elle fasse la lumière sur 358 crimes encore inexpliqués.

L'Espagne avait mal accueilli un message diffusé le 20 avril où la faction armée regrettait "les torts causés" mais ne demandait pardon qu'aux victimes qui n'étaient pas parties au "conflit", laissant entendre que les autres, comme les policiers, étaient des cibles légitimes.

Pour clore vendredi le dernier chapitre de son histoire, l'ETA a donc dû choisir le Pays Basque français, son ancienne base arrière, et ni le gouvernement de la Communauté autonome basque ni celui de la Navarre n'ont accepté l'invitation.

Restera encore à Madrid et Paris à régler l'épineux problème des quelque 270 militants incarcérés des deux côtés de la frontière.

A commencer par les "régimes d'exception", qui ont systématiquement éloigné de leurs familles les détenus basques. La France a commencé à faire quelques gestes, mais Madrid ne veut rien entendre.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
Castex
Jean Castex, espèce de “couteau suisse” déconfiné, dont l'accent a pu prêter à la bonhomie
PORTRAIT CRACHE - Longtemps dans l’ombre, à l’Elysée et à Matignon, Jean Castex est apparu comme tout droit venu de son Gers natal, à la façon d’un diable sorti de sa ...
13 avril 2024 - 15:36
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.