Drame du tunnel du Mont-Blanc en 1999 : un tournant en matière de sécurité

Auteur:
 
Par Fanny HARDY - Grenoble (AFP)
Publié le 22 mars 2019 - 12:13
Image
Dans le tunnel du Mont-Blanc le 18 octobre 1999, sept mois après l'incendie
Crédits
© PHILIPPE DESMAZES / AFP/Archives
Dans le tunnel du Mont-Blanc le 18 octobre 1999, sept mois après l'incendie
© PHILIPPE DESMAZES / AFP/Archives

Vingt ans après l'incendie du Tunnel du Mont-Blanc qui avait fait 39 morts, le traumatisme reste vivace dans la vallée mais les procès qui ont suivi et le travail de l'association de victimes ont permis de changer en profondeur l'approche de la sécurité dans les ouvrages souterrains.

Le 24 mars 1999, un camion venant de France et transportant farine et margarine, prenait feu à mi-chemin dans le tunnel long de 11,6 kilomètres entre la France et l'Italie.

53 heures seront nécessaires pour éteindre l'incendie. Et des semaines pour identifier les victimes, pour la plupart mortes par asphyxie.

Rendu trois mois après la catastrophe, le premier rapport d'enquête pointait déjà une série accablante de dysfonctionnements: capacité d'extraction des fumées toxiques limitée, mauvaise utilisation des conduits d'extraction, fonctionnement inadapté des feux de signalisation, absence de galerie de sécurité, mauvaise coordination des postes de commande franco-italiens, consignes de sécurité inadaptées, moyens d'intervention insuffisants...

Depuis, les proches des victimes, qui n'ont jamais abdiqué, se rappellent régulièrement à la mémoire des sociétés concessionnaires.

Quatre fois par an, ils sont invités à un exercice de sécurité dans l'ouvrage souterrain, dont le dernier a eu lieu lundi. Ils y participent avec "le regard du candide", pour "une petite piqûre de rappel", explique Xavier Chantelot, membre d'une famille de victimes.

Quand l'un des membres de l'association remarque un défaut de fonctionnement en empruntant l'ouvrage, celui-ci est tout de suite signalé.

"Il fallait faire ce qu’il faut pour que cela ne se reproduise pas", raconte Pierre-Étienne Denis, un autre proche de disparus.

"Pour qu’ils ne soient pas morts pour rien", souligne celui qui préside maintenant la Fédération nationale des victimes d’attentats et d’accidents collectifs (Fenvac), dont fait partie l'Association de défense des familles des victimes de la catastrophe du tunnel du Mont-Blanc.

Notre rôle est de "ne pas laisser de la place à la routine" dans le fonctionnement du tunnel et de pousser les sociétés concessionnaires française (ATMB) et italienne (SITMB) à "se remettre en question en permanence", explique-t-il.

"L'usager est habituellement vu comme une bête à payer mais quand on a tué 39 personnes, on se sent une dette envers lui", considère Alain Jakubowicz, avocat de la plupart des parties civiles au procès de première instance à Bonneville en 2005, puis en appel à Chambéry deux ans plus tard.

Mise en place dès la phase d'instruction judiciaire, l'association avait obligé la justice à mettre les grands moyens, notamment en demandant la nomination d’un deuxième juge lors d'une manifestation devant l’Élysée.

"Rien ne pouvait nous arrêter et rien ne nous arrêtait", sourit l'avocat lyonnais.

- "Chacun a compris l'autre" -

"Cela montre que quand les familles des victimes sont motivées, quand elles ont des arguments et que la presse leur porte un intérêt, il est possible d’avoir des résultats", note M. Denis.

Les deux procès ont en effet marqué un avant et un après dans la sécurité des tunnels.

Selon François Bessy, qui a présidé le second à Chambéry, la procédure a permis de faire prendre "conscience que les tunnels étaient dangereux". "On a vérifié la sécurité de tous les tunnels ensuite". Avec des centaines de millions d'euros d'investissements à la clef dans tout le pays...

"Ce qui pour moi est important, c’est la comparaison entre le premier jour du procès, au cours duquel la tension était insoutenable, et le dernier, à la fin duquel tout le monde s’est serré la main", se souvient Renaud Le Breton de Vannoise, président du tribunal de grande instance de Bonneville à l'époque.

"Je n’avais jamais vu ça. Le débat judiciaire avait fait son œuvre. Après 57 jours de procès, les parties civiles avaient compris que les prévenus n’étaient pas des assassins, et les prévenus ont vu que les parties civiles souffraient dans leur chair et qu’elles cherchaient des réponses. Chacun a compris l’autre, au-delà de la procédure".

Une cérémonie est prévue dimanche matin au mémorial de Chamonix à l’occasion des 20 ans du drame.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
bayrou
François Bayrou, baladin un jour, renaissant toujours
PORTRAIT CRACHE - François Bayrou, député, maire de Pau et plusieurs fois ministres, est surtout figure d’une opposition opportuniste. Éternel candidat malheureux à la...
20 avril 2024 - 10:45
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.