Échec des discussions avec Renault : Fiat pointe du doigt le gouvernement français

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Par Pierre DONADIEU, Valentin BONTEMPS - Paris (AFP)
Publié le 06 juin 2019 - 11:42
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Le constructeur italo-américain Fiat Chrysler (FCA), qui a retiré dans la nuit de mercredi à jeudi sa proposition de fusion avec le français Renault pour former le numéro 3 mondial de l'automobile, a fait porter la responsabilité de cet échec au gouvernement français qui s'en est vivement défendu.

L'échec des négociations a entraîné une sanction immédiate des deux constructeurs sur les marchés boursiers. Vers 13H15 à Paris, le titre de Renault décrochait de 6,58% à 52,50 euros et celui de FCA, après avoir perdu 3% à l'ouverture à Milan, revenait dans le vert (+0,02% à 11,72 euros).

Sans viser de coupable, Renault s'est contenté d'exprimer, par communiqué, "sa déception de ne pas pouvoir approfondir la proposition de FCA", qui a prouvé, à ses yeux, "l'attractivité" du groupe au losange et de son alliance avec Nissan.

Dès le retrait de son offre, FCA avait été moins diplomate en ciblant nommément l'État français, actionnaire de Renault, estimant que les "conditions politiques" n'étaient pas réunies en France pour "mener à bien un tel rapprochement".

Une source proche du constructeur italo-américain jeudi matin a été encore plus claire: "la position soudaine et incompréhensible de Bercy" se trouve au cœur de l'échec des discussions, selon elle. "De nouvelles exigences du gouvernement français ont conduit à cette situation dommageable pour toutes les parties", a déclaré cette source à l'AFP.

Le ministère français de l'Economie a rétorqué jeudi n'avoir pas eu de nouvelle exigence et avoir uniquement demandé un délai de cinq jours pour permettre à Renault de "s'accorder avec (son) partenaire japonais" Nissan, qui n'avait pas apporté le "soutien explicite" voulu par l'Etat actionnaire pour mener à bien ce rapprochement.

"La raison pour laquelle ce +deal+ ne s'est pas fait est liée à la préservation de l'alliance entre Renault et Nissan, ça n'a rien à voir (...) avec des interventions politiques", a assuré un responsable de Bercy lors d'une conférence téléphonique avec des journalistes.

"Nous avons été très clairs: il nous fallait le soutien explicite de Nissan pour que la fusion se réalise dans le cadre de l'Alliance. On ne pouvait pas mettre en cause la pérennité de l'alliance dans cette opération", a-t-on ajouté.

"Nos positions n'ont pas changé, ils sont gonflés de dire ça chez Fiat", avait rétorqué plus tôt une source gouvernementale. "On aurait aimé que le +deal+ se fasse, mais pas à n'importe quelle condition".

"Dès la présentation de cette offre, l'Etat, actionnaire de Renault à 15,1%, l'a accueilli avec ouverture et a travaillé de manière constructive avec l'ensemble des parties prenantes", a assuré le ministre de l'Economie Bruno le Maire dans un communiqué.

Quatre conditions avaient été fixées par le gouvernement, a-t-il ajouté: la réalisation de cette opération dans le cadre de l'alliance entre Renault et Nissan, la préservation des emplois et des sites industriels en France, le respect dans la gouvernance des équilibres entre Renault et FCA, et la participation de ce futur ensemble à l'initiative des batteries électriques engagée avec l'Allemagne.

Selon Bruno le Maire, un accord avait été trouvé sur trois de ces quatre conditions.

- "Demande de garanties" -

"L'Etat français a demandé des garanties. Il a bien fait. Demander du temps pour un mariage, c'est normal", a renchéri le ministre du Budget, Gérald Darmanin, sur la radio Franceinfo, ne fermant cependant pas la porte à une reprise des négociations. "Aujourd'hui, il faut protéger l'emploi automobile français", a-t-il ajouté.

Cette fusion aurait créé un groupe de plus de 30 milliards d'euros de valorisation boursière, produisant 8,7 millions de véhicules par an. Le projet prévoyait la création d'une holding basée à Amsterdam et détenue à parts égales par les actionnaires de Renault et FCA.

La famille Agnelli, qui possède 29% de Fiat Chrysler, aurait vu sa part mécaniquement diluée à 14,5%, mais serait restée de loin le premier actionnaire, pesant près du double de l'Etat français qui serait tombé à 7,5% du capital.

Mercredi soir, au siège de Renault, selon une source proche du constructeur, l'ensemble des administrateurs s'était pourtant prononcé en faveur de la fusion, sauf un représentant des salariés affilié la CGT qui s'y est opposé, et les deux représentants de Nissan qui comptaient s'abstenir tout en indiquant qu'ils pourraient dire oui "avec un peu plus de temps".

Tenu à l'écart des discussions entre Renault et FCA jusqu'à l'annonce du projet il y a dix jours, Nissan, dont Renault détient 43% du capital, et qui contrôle 15% de Renault, craignait d'être marginalisé dans l'opération, mais y voyait aussi des opportunités en matière de partages de technologies.

Les relations au sein du partenariat franco-japonais se sont considérablement tendues depuis l'arrestation en novembre dernier de l'ancien patron emblématique Carlos Ghosn, mis en examen au Japon pour diverses malversations à la suite de dénonciations par des dirigeants de Nissan.

pid-vab-aro-map-jul/fka/LyS

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