Enseigner "au mieux", sans "culpabiliser" : des enseignants racontent

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Par Anne-Sophie MOREL - Paris (AFP)
Publié le 20 mars 2020 - 13:10
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Un panneau lumineux près d'une école fermée, comme toutes les écoles de France, à Crépy-en-Valois, en mars 2020
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© FRANCOIS NASCIMBENI / AFP/Archives
Un panneau lumineux près d'une école fermée, comme toutes les écoles de France, à Crépy-en-Valois, en mars 2020
© FRANCOIS NASCIMBENI / AFP/Archives

Du "chaos" de la mise en place inédite de la continuité pédagogique en tout début de semaine avec la fermeture des établissements scolaires, à la "solidarité" installée au fil de l'eau entre enseignants, trois d'entre eux témoignent de leur volonté de faire "au mieux", en essayant de ne "pas culpabiliser".

Marie, professeure dans un lycée privé à Tours

"Au début de la semaine, c'était le chaos : j'ai dû répondre à plus de 120 mails d'élèves car ils étaient perdus ou comprenaient les choses de travers...", raconte à l'AFP cette enseignante, par ailleurs mère de quatre enfants âgés de 7 à 13 ans.

L'enseignement à distance pour l'ensemble des 850.000 enseignants français est une première et demande une mise en place chronophage. "Il a fallu préparer tous les documents, tous les supports dont je n'ai pas besoin en classe d'habitude, ce qui fait qu'entre lundi et mercredi soir, j'ai travaillé près de 30 heures, tout en devant gérer les cours à distance des enfants... Plus que pas simple", lance-t-elle.

Heureusement, "petit à petit ça commence à rouler. Mais beaucoup d'élèves au sein de fratrie ne sont pas les seuls à utiliser l'unique ordinateur de la famille et donc tout le travail est décalé...", affirme-t-elle.

Pour assurer la continuité pédagogique après la décision de fermer l'ensemble des écoles, l'Education nationale a annoncé mettre à disposition les ressources du Centre national d'enseignement à distance (Cned): des exercices en ligne adaptés aux programmes et une "classe virtuelle" où le professeur peut faire cours à ses élèves par visioconférence.

Sarah, professeure dans un lycée en Ariège

Sauf que pour certains, la connexion est restée impossible toute la semaine. "Très vite, on s'est rendu compte que le système ne supportait pas autant d'échange de données alors, ça a été la solidarité et l'entraide entre profs, on a cherché et décidé de se tourner vers d'autres outils, hors Education nationale, tant pis", décrit Sarah, qui fait cours à deux classe de Première.

Cette enseignante qui doit elle aussi "gérer toute la famille", décrit une mise en place "difficile" de ce travail à distance. "Tout ça est tout nouveau, on ne sait absolument pas faire et les élèves non plus, certains sont même perdus car ils n'ont plus personne derrière eux", affirme-t-elle.

Alors le mot d'ordre, c'est "de faire au mieux", en tentant qu'aucun élève ne soit lésé. Mais il lui reste "trois élèves qui n'ont pas du tout accès à internet". "Je me suis arrangée à envoyer des cours imprimés au lycée, pour que les parents puissent venir directement les récupérer, mais avec le confinement qui s'annonce plus drastique, par sûr que ça puisse tenir sur la durée", craint-elle.

Jeudi, elle a réussi à réunir 44 de ces 57 élèves sur l'application Whatsapp, "pour faire un point de situation et les encourager" et "ça, ça a fait beaucoup de bien à tout le monde", s'est-elle réjouit.

Claire Alanore, enseignante d'une classe dédoublée de CE1 à Dreux

Au bout de cinq jours de cours à distance, cette institutrice n'a pu entrer en contact "qu'avec neuf parents sur 17". "Mais je comprends que face à cette situation inédite, certains parents avaient d'autres choses à gérer dans l'immédiat que les cours de leurs enfants", explique-t-elle, précisant que "l'objectif reste que les enfants ne soient pas complètement coupés de l'école".

Claire Alanore dit elle aussi "faire au mieux", en tentant "de ne pas culpabiliser mais c'est difficile".

Alors "on gratte sur le net pour trouver des choses ludiques, c'est le système de la débrouille pour proposer à distance des cours et des activités aux parents mais bien évidemment, je n'envisage pas de découverte de notions", précise l'enseignante mère de famille.

"On ne veut pas non plus trop donner de travail, car si les élèves travaillent déjà entre deux et trois heures par jour, ça sera bien", affirme-t-elle.

Elle dépeint "une situation d'enseignement très compliquée" mais se veut optimiste. "Même si ce qui était prévu au tout départ ne pourra pas se faire, on va pouvoir y arriver", se rassure-t-elle.

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