Europacity : En Ile-de-France, l'urbanisation des terres agricoles en débat

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Par Isabel MALSANG - Paris (AFP)
Publié le 23 février 2018 - 07:00
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Manifestation contre le projet EuropaCity, le 21 mai 2017 à Gonesse (Val-d'Oise)
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© Thomas SAMSON / AFP/Archives
Manifestation contre le projet EuropaCity, le 21 mai 2017 à Gonesse (Val-d'Oise)
© Thomas SAMSON / AFP/Archives

Après Notre-Dame-des-Landes, les projets d'infrastructures ou de zones commerciales sur des terres agricoles péri-urbaines, comme Europacity près de Paris, sont contraints de prendre en compte les nouvelles résistances qui s'organisent pour sauvegarder ces terres.

Alors que l'urbanisation des terres est repartie à la hausse en 2016 en France après un mouvement de baisse les années précédentes, Europacity, située près de Roissy, proposait d'implanter d'ici à 2024 un parc d'activités à vocation touristique et culturelle sur 80 hectares de terres encore agricoles du Val-d'Oise, autrefois zones de maraîchage destinées à ravitailler Paris.

Initialement critiqué comme une "dubaïsation" de l'Ile-de-France, en raison des pistes de ski artificiel inscrites dans le projet et de l'abondance de centres commerciaux évoquant l'émirat de Dubaï, le projet est désormais voué aux gémonies en raison du bétonnage prévu de terres qui furent parmi les plus fertiles d'Europe.

Une pétition proposant un projet alternatif baptisé Carmat, bâti autour d'une économie agricole circulaire, mêlant agro-écologie et recyclage, a suscité une riposte des promoteurs d'Europacity, filiale immobilière du groupe Auchan et le groupe chinois Wanda.

- Intérêt général ? -

Parmi les critiques qui qualifient le projet de 3 milliards d'euros de "folie" et demandent de "cultiver le bien commun", figurent des intellectuels, scientifiques, personnalités très diverses, d'Olivier de Schutter, ancien rapporteur spécial pour le droit à l'alimentation du conseil des droits de l'Homme des Nations Unies, à la présidente du premier syndicat agricole français Christiane Lambert, en passant par José Bové et Edgar Morin.

Benoît Chang, directeur-général d'Alliages et territoires, la société chargée de conduire Europacity, répond que le projet évoque un "écosystème urbain exemplaire de transition écologique", créateur d'emplois dans un "nouveau quartier" qui revitalisera des zones de relégation autour de Gonesse.

Malgré son programme de désendettement en cours, l'engagement du groupe chinois Wanda sur ce projet "emblématique" est "total", ainsi que "celui d'Immochan", la filiale d'Auchan, a-t-il assuré à l'AFP.

Il en veut pour preuve que le numéro deux du groupe chinois faisait partie des invités d'Emmanuel Macron à Versailles début janvier au milieu d'autres investisseurs étrangers en France.

Le début de la construction est prévu pour 2019-2020, suivi de quatre ans de chantier, à condition que la ligne 17 du métro du futur Grand Paris Express soit bien maintenue et financée dans les temps. Hélas pour Europacity, le gouvernement vient tout juste d'annoncer un report de trois ans de la construction de la gare desservant le site sur cette ligne.

"Ce retard est une déception" a réagi vendredi David Lebon, directeur du développement dans le Parisien, sans donner de détails sur l'avenir du projet.

- Vitrine de l'agriculture -

D'une manière plus globale, les promoteurs d'Europacity voyaient jusqu'à présent dans leur projet "une question de compromis et d'intérêt général".

"Nous avons des convictions fortes pour l'utilité sociale du projet" censé offrir du loisir et des emplois et ainsi désenclaver l'est du Val-d'Oise, encore marqué par les émeutes de 2007 à Villiers-le-Bel, soulignait M. Chang dans un entretien accordé avant l'annonce sur les transports.

Est-ce l'argument agricole qui a fait mouche ? Ou un récent coup de menton de Nicolas Hulot contre le bétonnage des terres agricoles ? Avant même le report de la construction de la gare, Europacity semblait avoir légèrement fait évoluer son projet.

Durant le salon de l'Agriculture qui ouvre ses portes samedi à Paris, Europacity devait ainsi annoncer son intégration au projet "Happy Vallée", qui se veut une future "vitrine de l'agriculture française" le long de l'autoroute A1 sur l'axe Paris-Roissy.

C'est la filiale Agrosolutions du groupe de coopératives agricoles InVivo qui pilote ce projet "dont la vocation première sera nourricière", avec toutes les technologies agricoles innovantes, assure Invivo.

De quoi couper l'herbe sous les pieds des opposants ?

"Il faut reconnaître que les terres actuelles, occupées par une agriculture conventionnelle ayant utilisé beaucoup d'engrais et d'intrants, n'ont guère d'avenir agricole car les sols sont épuisés", admet un opposant.

Néanmoins, juge-t-il, "si l'on mettait en oeuvre un vrai projet d'agro-écologie, le site d'Europacity pourrait devenir un véritable laboratoire de la transition agricole" en cours.

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