Fraude fiscale et guerre d'héritiers : décision vendredi pour les Wildenstein

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Par Sofia BOUDERBALA - Paris (AFP)
Publié le 27 juin 2018 - 10:00
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Guy Wildenstein arrive au tribunal le 22 septembre 2016
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© Eric FEFERBERG / AFP
Le marchand d'art Guy Wildenstein, fils de Daniel Wildenstein, arrive au palais de justice, le 22 septembre 2016 à Paris
© Eric FEFERBERG / AFP

Ils avaient bénéficié en 2017 d'une spectaculaire relaxe générale: les héritiers du marchand d'art Daniel Wildenstein seront fixés vendredi sur le sort que leur réserve la justice française, qui les a poursuivis en appel pour une fraude fiscale de plusieurs centaines de millions d'euros.

En mars, le ministère public avait demandé devant la cour d'appel de Paris de la prison ferme et une amende de 250 millions d'euros contre le fils de Daniel, Guy Wildenstein, présenté comme le "patriarche" d'un clan qui a "sciemment dissimulé" des milliards au fisc pendant des années.

La défense du principal prévenu avait plaidé la relaxe, la seule réponse possible à une "fiction fiscale", estimant qu'il n'y avait "pas plus d'élément légal que moral permettant de reprocher quoi que ce soit à Guy Wildenstein".

En janvier 2017, en première instance, les héritiers de la famille, leurs conseillers et leurs sociétés financières avaient bénéficié d'une relaxe générale. Le tribunal avait alors prédit que sa décision serait "incomprise du peuple français", alors que le parquet avait réclamé de lourdes sanctions contre la fraude fiscale "la plus longue et la plus sophistiquée" de l'histoire récente en France.

Devant la cour d'appel, le parquet général s'est gardé de toute envolée lyrique. Il s'est attaché à démontrer comment l'empire d'une élite mondialisée a été "soustrait à l'impôt" sur les successions en décortiquant, de manière clinique, le fonctionnement de chacun des "trusts", ces sociétés-écran logées à Guernesey et aux Bahamas qui abritent les actifs du clan: hôtels particuliers, pur-sangs ou tableaux de maître.

Contre Guy Wildenstein, le doyen du clan à 72 ans, l'accusation a requis la plus lourde peine: quatre ans d'emprisonnement dont deux avec sursis, et une énorme amende.

A ses côtés étaient jugés deux autres héritiers: le jeune Alec, qui vit dans un somptueux ranch familial au Kenya, et la sculpteure d'origine russe Liouba Stoupakova, veuve d'Alec senior - le frère de Guy - en rupture avec le clan. Le parquet général a requis contre eux six mois avec sursis, assortis pour la veuve d'une amende de 150.000 euros.

Contre deux avocats et un notaire, les avocats généraux ont demandé des peines comprises entre deux ans d'emprisonnement avec sursis et trois ans dont deux avec sursis, ainsi que des amendes allant de 37.500 euros à un million d'euros.

- "Vecteurs de la fraude" -

Les magistrats ont demandé 187.000 euros, alors l'amende "maximum" pour complicité de fraude fiscale, à l'encontre de Northern Trust Fiduciary Services et Royal Bank of Canada Trust Company, structures gérant les "trusts" des Wildenstein et désignées comme les "instruments de la fraude".

Il est reproché aux Wildenstein d'avoir dissimulé, lors des décès en 2001 puis 2008 du patriarche Daniel puis de son fils aîné Alec, la plus grande partie de leur fortune, dont une petite partie a été révélée lors de violentes querelles de succession.

Le fisc français leur réclame, dans un contentieux parallèle au procès pénal, plus d'un demi-milliard d'euros. Daniel et Alec, très malades, avaient fini leurs jours dans des immeubles luxueux à Paris, où ils avaient leur résidence fiscale.

Mais la propriété de leurs biens, parmi lesquels de fabuleux Fragonard, Caravage ou Bonnard, se perd depuis trois générations dans un entrelacs de "trusts", ces sociétés de droit anglo-saxon, qui abritent des actifs confiés par leur propriétaire à un homme de confiance, le "trustee".

Toute la question est de savoir si les Wildenstein sont toujours propriétaires des avoirs confiés aux trusts. En 2017, le tribunal a estimé n'avoir pas assez d'éléments pour condamner les prévenus. Pour l'accusation, aucun doute: les trusts sont des "vecteurs de la fraude fiscale" et les "trustee" des "hommes de paille".

Au contraire, la défense a relevé que Guy Wildenstein n'avait "jamais créé un trust". "On n'hérite pas d'un crime, d'un délit", a martelé son avocat, Hervé Témime, déplorant qu'on réduise cette famille, qui raconte elle-même une "tranche d'histoire de l'art", à un "trust".

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