Gouvernance, participations croisées : quel avenir pour Renault-Nissan-Mitsubishi ?

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Par Damien GAUDISSART - Paris (AFP)
Publié le 28 novembre 2018 - 14:47
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Le PDG de Renault Carlos Ghosn, le 8 novembre 2018 lors d'une intervention à l'usine Renault à Maubeuge
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© Ludovic MARIN / AFP/Archives
Le PDG de Renault Carlos Ghosn, le 8 novembre 2018 lors d'une intervention à l'usine Renault à Maubeuge
© Ludovic MARIN / AFP/Archives

Des représentants de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi se réunissent jeudi à Amsterdam, selon des sources proches du dossier. Comment fonctionne cette alliance et quels sont les enjeux pour elle après l'arrestation de Carlos Ghosn?

- Qu'est-ce que l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi?

L'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi est devenue en 2017 le premier constructeur automobile mondial, avec 10,6 millions de voitures et utilitaires légers vendus (contre 10,54 millions pour Volkswagen, ancien numéro 1). Elle est dirigée depuis 2005 par Carlos Ghosn, par ailleurs toujours PDG du groupe Renault.

Les trois entreprises partagent des usines, disposent de plateformes d'assemblage communes et font des achats ensemble, des synergies destinées à réduire les coûts de production.

Renault et Nissan ont créé l'alliance en 1999, lorsque le constructeur français a sauvé son concurrent nippon de la faillite. Le groupe français détient aujourd'hui 43,4% des parts de Nissan, tandis que ce dernier possède 15% du capital de Renault. Le directoire de l'alliance se réunit au sein de Renault Nissan BV, une entité juridique implantée à Amsterdam dont les deux entreprises contrôlent chacune la moitié du capital.

Cette société de droit néerlandais rassemble actuellement, outre Carlos Ghosn, quatre dirigeants de Renault et quatre de Nissan, le nombre minimum que chaque constructeur est tenu de nommer au directoire.

En 2016, alors qu'il était empêtré dans une affaire de manipulation des performances énergétiques de ses véhicules menaçant sa survie, Mitsubishi a été sauvé par son compatriote Nissan, et a rejoint l'alliance. Nissan détient désormais 34% du capital de Mitsubishi.

Depuis 2010, Renault et Nissan sont par ailleurs liés à Daimler: un accord de collaboration leur octroie chacun 1,55% du groupe allemand, qui détient en retour 3,1% du groupe Renault et autant de Nissan.

- Dans quel contexte se réunit l'Alliance?

Les accusations de malversations financières visant Carlos Ghosn et l'annonce de son arrestation lundi 19 novembre ont entraîné des changements de gouvernance au sein des membres de l'Alliance – mais pas à sa tête, M. Ghosn demeurant PDG de Renault Nissan BV.

Nissan a ainsi révoqué jeudi le bâtisseur de l'alliance de son poste de président du conseil d'administration sans désigner de remplaçant pour l'instant. Le patron exécutif Hiroto Saikawa reste seul à la barre.

Lundi, c'était au tour de Mitsubishi de limoger M. Ghosn, qui y occupait aussi la présidence du conseil d'administration. Le patron exécutif Osamu Masuko est appelé à prendre sa relève.

Chez Renault, M. Ghosn a conservé ses fonctions de PDG, le conseil d'administration du groupe français estimant ne pas pouvoir se prononcer sur le fond de l'affaire. Le numéro 2 de Renault, Thierry Bolloré, a été désigné pour assurer l'intérim comme directeur exécutif.

Ce dernier s'est engagé jeudi à "préserver (...) la pérennité de l'alliance", dans un message aux salariés.

Même son de cloche chez les ministres français et nippon de l'Économie, qui ont mis en exergue "l'important soutien" des deux gouvernements "à l'alliance formée entre Renault et Nissan".

- Qui sera présent?

L'Alliance n'a pas communiqué officiellement sur la réunion prévue cette semaine. D'après le quotidien Yomiuri Shimbun, cette rencontre prévue de longue date devrait rassembler plusieurs hauts responsables de l'alliance, dont au moins certains membres de son directoire.

Parmi eux, Hiroto Saikawa a prévu de se rendre aux Pays-Bas jeudi.

- Quels sujets seront débattus ?

Étant donné que la réunion était déjà planifiée avant l'arrestation de Carlos Ghosn, l'avenir de l'alliance ne figurait pas parmi les sujets de discussion initialement prévus.

Après les révélations de la semaine dernière, "il semblerait que ces questions vont être soulevées", a confié un élu CGT de Renault à l'AFP, confirmant des informations allant dans le même sens du Yomiuri Shimbun.

- La gouvernance de l'Alliance va-t-elle évoluer ?

Selon le journal Les Échos, "aucune décision cruciale ne sera prise" lors de la réunion de l'Alliance.

Le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire s'est encore opposé mardi à tout changement de gouvernance et dans l'équilibre des pouvoirs dans l'alliance: "Le directeur général de Renault doit rester le président de l'alliance", a-t-il martelé sur LCI. En outre, de l'avis du ministre, "il y a des participations croisées entre Renault et Nissan qui ne doivent pas changer".

Les statuts de l'alliance prévoient que le président du directoire soit nommé par Renault, tandis que le choix du vice-président échoit à Nissan.

Mais cette préséance française, au moment où le chiffre d'affaires de Nissan excède nettement celui de Renault, irrite les membres japonais de l'alliance depuis longtemps.

Tout en promettant de "stabiliser la relation entre les trois entreprises", M. Saikawa a déploré lundi "l'inégalité" dans la structure, tant les pouvoirs étaient jusqu'ici concentrés dans les mains d'un seul homme, ce qui empêchait toute discussion stratégique entre Renault et Nissan.

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