Japon : à Nikko, l'énigme de la disparition d'une Française

Auteur:
 
Par Karyn NISHIMURA-POUPEE - Nikko (Japon) (AFP)
Publié le 23 août 2018 - 15:30
Image
Avis de recherche de la Française Tiphaine Véron à Nikko dans le nord-est du Japon, le 23 août 2018
Crédits
© Kazuhiro NOGI / AFP
Avis de recherche de la Française Tiphaine Véron à Nikko dans le nord-est du Japon, le 23 août 2018
© Kazuhiro NOGI / AFP

Sibylle Véron jette un regard interrogateur et triste sur le paysage montagneux de Nikko, ville du nord-est du Japon où sa soeur a disparu le 29 juillet. Forcée de repartir en France, elle a "l'impression de l'abandonner à son sort".

"On ne sait absolument pas ce qui a pu arriver à Tiphaine. Quand on est arrivé (après avoir appris sa disparition), on s'est dit qu'on allait repartir avec elle au bout de deux jours, qu'on allait la retrouver, dans un hôpital de la région, mais non, rien", se désole-t-elle.

Partout sur les murs, dans les commerces, sur les vitrines des restaurants de Nikko, une cité très touristique réputée pour ses sanctuaires et temples, est placardé un avis de recherche en japonais et en anglais.

Il y a chaque année des dizaines de milliers de disparitions au Japon, mais dans la majeure partie des cas on retrouve rapidement les personnes.

Tiphaine, 36 ans et qui vit à Poitiers dans l'ouest de la France, n'a plus été vue depuis le matin du 29 juillet, quand elle a quitté son hôtel où elle devait en tout passer deux nuits. "Soyez prudente", lui a alors lancé par politesse le gérant, celui-là même qui, ne l'ayant pas vue revenir, a prévenu la police le lendemain.

- "Complètement impuissants" -

A l'entrée de cet établissement modeste, figure l'affiche avec deux photos de la Française. Mais le réceptionniste renvoie poliment les journalistes: "nous ne répondons pas aux médias, il s'agit d'une affaire privée au sujet d'une cliente".

Des étrangers se promènent ici et là, certains sortent un peu des sentiers battus, mais le cas de Tiphaine, qui était seule, les rend parfois plus prudents. "Je suis allée courir mais je suis restée très près des zones habitées à cause de ce fait divers", confie une étrangère de passage.

Alentour, la nature est belle, magnifique même, avec ses monts couverts d'arbres, la rivière qui bruisse, les sanctuaires rouges accessibles par des chemins escarpés. La balade est agréable, mais elle peut être dangereuse: outre la présence de serpents, on a vite fait de buter, de glisser, surtout après la pluie, comme c'était le cas le 29 juillet.

"Est-ce que Tiphaine est tombée dans l'eau, s'est perdue dans la forêt, a été enlevée, agressée, on ne sait rien. On va rentrer en France, reprendre nos vies, mais on se sent complètement impuissant. On a l'impression de l'abandonner à son sort", dit Sibylle, venue à Nikko avec son frère Damien et leur mère.

"La police travaille mais on est tenu à l'écart de l'enquête, au Japon la police est très très vigilante. Le dialogue avec une famille française, ça peut être compliqué", souligne-t-elle à l'issue d'un long entretien avec les enquêteurs, tout en saluant leur professionnalisme et la sollicitude des habitants à leur égard.

- "Coïncidence intrigante" -

Piste accidentelle ou criminelle ? "Les deux sont possibles mais de plus en plus je pencherais pour la seconde hypothèse", juge Taihei Ogawa, ex-inspecteur de police, auteur de plusieurs ouvrages sur le travail d'enquête.

Aux abords du petit et désert sanctuaire Takino, l'un des lieux peu connus que Tiphaine avait prévu de visiter le dimanche 29 (selon le plan qu'elle avait établi et qui a été retrouvé dans ses effets personnels à l'hôtel), figurent des panneaux en japonais: "faites attention, il y a ici quelqu'un qui approche les femmes" et un autre faisant état de "fréquents" incidents.

"Ce genre de mise en garde, c'est quand même une coïncidence intrigante. C'est extrêmement rare au Japon", insiste M. Ogawa, qui estime que l'hypothèse de l'enlèvement doit être sérieusement étudiée.

Selon sa famille, Tiphaine pouvait se montrer très confiante dans un pays réputé très sûr, "pour lequel elle a eu un coup de foudre, où elle se sentait bien".

"Elle a pu être abordée par un Japonais sans se méfier. Malheureusement il y a aussi au Japon des personnes mal intentionnées. Même s'il y a en proportion ici moins de délits que dans nombre d'autres pays, il n'y en a pas zéro", avertit l'ancien policier.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
Castex
Jean Castex, espèce de “couteau suisse” déconfiné, dont l'accent a pu prêter à la bonhomie
PORTRAIT CRACHE - Longtemps dans l’ombre, à l’Elysée et à Matignon, Jean Castex est apparu comme tout droit venu de son Gers natal, à la façon d’un diable sorti de sa ...
13 avril 2024 - 15:36
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.