La classe relais : remettre sur les rails des élèves exclus pour violences

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Par Frédérique PRIS - Beauchamp (Val-d'Oise) (France) (AFP)
Publié le 27 janvier 2019 - 10:06
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Des adolescents passés en conseil de discipline sont scolarisés dans des classes relais
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© CHARLY TRIBALLEAU / AFP/Archives
Des adolescents passés en conseil de discipline sont scolarisés dans des classes relais
© CHARLY TRIBALLEAU / AFP/Archives

Passés plusieurs fois en conseil de discipline pour insultes et violences, souvent exclus, une poignée d'adolescents sont scolarisés quelques semaines dans un collège loin de leur établissement. Avec pour espoir, dit l'un d'eux, de "devenir un élève comme les autres".

Le collège Montesquieu de Beauchamp, un établissement plutôt favorisé du Val-d'Oise, a ouvert il y a quatre ans une classe relais: elle accueille pour des sessions de deux mois des jeunes de 12 à 16 ans du département, dont les comportements à l'école (violences et absentéisme le plus souvent) ont entraîné l'exclusion, temporaire ou définitive.

"Je ne voulais pas venir mais ma mère m'a convaincu. Elle m'a dit que je n'avais pas le choix", explique timidement Mehdi, 13 ans, exclu d'un premier collège. Il a été envoyé là par son nouvel établissement, dans lequel il reviendra après la session.

"J'aimais bien l'idée de venir ici, je savais que je serais avec des fous comme moi. On est tous des voyous ici!", lance, bravache, Bilel, 13 ans. Son voisin de 12 ans, un autre Mehdi, pense que la classe relais "peut être une chance". Mais Naomie, 14 ans, avoue: "je ne vois pas comment je peux changer".

C'est leur 2e jour de classe à Beauchamp. Les six élèves (cinq garçons et une fille) s'interrompent sans cesse, s'agitent sur leur chaise. La professeure de français et coordinatrice du dispositif, Patricia Geay, leur rappelle avec calme et fermeté les règles de la classe.

"Ce groupe est vraiment dur", confiera-t-elle plus tard. La principale, Patricia Hesse, sourit: "elle dit ça à chaque fois. Et à chaque fois, elle a mal au cœur quand ils partent".

"Au début, les élèves sont dans la provoc. Mais ils ont tous une image d'eux-mêmes très dégradée", ajoute la principale, qui croit au bénéfice de la classe relais pour ces enfants "pas forcément très sympathiques au premier abord".

Le but n'est pas une remise à niveau scolaire. "Certains n'ont pas tenu un stylo depuis des mois", précise-t-elle. L'objectif est de les "remettre dans une posture d'élève".

- "Un autre regard" -

"On leur réapprend à respecter les règles de l'institution, comprendre l'intérêt de l'école qu'ils rejettent, écouter les autres, retrouver une meilleure image d'eux-mêmes", ajoute Mme Hesse.

Les cours, assurés par des professeurs du collège volontaires, s'éloignent des programmes. À travers des ateliers d'éloquence, les élèves rejouent les situations qui ont causé leur passage en conseil de discipline et réfléchissent à d'autres comportements possibles.

Ils font aussi de la philosophie, rapporte Mme Geay. "Avec la caverne de Platon, on travaille sur la difficulté à quitter une caverne obscure mais rassurante pour aller vers l'extérieur, où le soleil aveugle dans un premier temps".

Autre but poursuivi par la coordinatrice: "renouer les liens entre l'école et les parents, et entre le jeune et ses parents qui n'ont jamais entendu que du négatif sur leur enfant". En fin de session, les parents sont conviés à la projection d'un film tourné avec les élèves. "J'ai l'impression de voir mon fils pour la première fois", a déclaré un père, très ému, lors d'une précédente session.

Comment évaluer les résultats de ce dispositif ? Il n'y a pas de miracle et il faut rester modeste, souligne l'équipe pédagogique. Si le jeune a renoué le lien avec ses parents, ne passe plus en conseil de discipline, change son comportement à l'école, c'est gagné.

"C'est épuisant mais il ne faut jamais se décourager", indiquent les professeurs. Les effets se font parfois sentir à long terme, comme pour ce garçon, envoyé deux fois en classe relai (ce qui est rare), aujourd'hui lycéen et pompier volontaire.

José Ongenda, l'assistant d'éducation, veille sur le groupe toute la journée, de la salle de classe au terrain de foot en passant par la cantine. Il dit "croire en eux". "Ce sont des enfants. Les choses qu'ils ont faites ne doit pas définir ce qu'ils deviendront".

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