La colère des policiers ne faiblit pas, appel à Macron

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Par Sylvie MALIGORNE, Grégory DANEL et Katell PRIGENT - Paris (AFP)
Publié le 12 juin 2020 - 16:12
Mis à jour le 13 juin 2020 - 01:10
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Des menottes jetées à terre par les policiers devant la Haute Cour de Marseille lors d'un rassemblement, le 11 juin 2020, pour protester contre les dernières annonces du ministre de l'Intérieur
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© CLEMENT MAHOUDEAU / AFP
Des menottes jetées à terre par les policiers devant la Haute Cour de Marseille lors d'un rassemblement, le 11 juin 2020, pour protester contre les dernières annonces du ministre d
© CLEMENT MAHOUDEAU / AFP

Descente des Champs Elysées, menottes jetées à terre... : la colère des policiers n'a pas faibli vendredi contre Christophe Castaner, au point que leurs syndicats ont demandé à être reçus par le chef de l'Etat.

Dans la soirée, Christophe Castaner et son secrétaire d'Etat Laurent Nuñez se sont "félicité des échanges constructifs avec les organisations syndicales", dans un communiqué de presse où ils confirment toutefois la suppression de la technique d'interpellation dite "d'étranglement", qui ne sera plus enseignée.

Des policiers en colère, d'autres présidents ou ministres de l'Intérieur ont dû en affronter par le passé. Mais ce nouvel épisode intervient dans un climat de défiance vis-à-vis de l'exécutif, de rumeurs de remaniement après une longue séquence de manifestations et de sollicitations des forces de l'ordre, des "gilets jaunes" au contrôle du confinement en passant par le mouvement contre la réforme des retraites.

Il survient en outre la veille de nouvelles manifestations contre les violences policières et le racisme et 48 heures avant une allocution du président Emmanuel Macron.

"On est venu dire au président Macron qu'il doit soutenir, respecter, considérer sa police (...) La police n'est pas raciste, la police est républicaine (...), elle ne choisit pas sa délinquance, elle ne choisit pas la couleur de la délinquance (...) et elle sauve des vies quelle que soit la couleur de la peau de l'individu", s'est agacé vendredi Fabien Vanhemelryck, secrétaire général du syndicat Alliance, à deux pas de l'Elysée.

Une vingtaine de voitures siglées des syndicats de police venait de descendre les Champs-Elysées jusqu'à la place Beauvau, devant le ministère de l'Intérieur et à deux pas de l'Elysée, derrière une banderole "pas de police, pas de paix".

Un peu partout en France, depuis jeudi, les policiers organisent des actions diverses et symboliques, comme jeter à terre leurs menottes, pour clamer leur ras-le-bol et leur demande de soutien de la part de l'exécutif.

- Appels à la démission -

Pour Patrice Ribeiro du syndicat Synergie, on "conspue la police". "Pourquoi ? Parce qu'au plus haut niveau de l'Etat, on a peur d'une minorité agissante (...), on voudrait que les politiques, au premier rang desquels le président de la République, nous apportent leur soutien, il doit nous recevoir", a-t-il dit.

La mort aux Etats-Unis de George Floyd sous le genou d'un policier a ravivé en France les accusations de violences policières et de racisme. Des accusations relayées avec force par le comité Adama Traoré, du nom d'un jeune homme noir décédé en juillet 2016 lors d'une interpellation par des gendarmes en région parisienne.

Alors que plusieurs chefs d'Etat et de gouvernement, à l'instar de l'Allemande Angela Merkel ou du Canadien Justin Trudeau, ont condamné la mort de George Floyd, Emmanuel Macron est resté mutique publiquement.

Le succès de la manifestation à l'appel du comité Traoré, qui a rassemblé le 2 juin à Paris 20.000 personnes, a surpris et frappé l'exécutif. Si bien que le président Macron a demandé à Christophe Castaner d'agir et de renforcer les règles de déontologie de la police.

C'est ainsi que lundi le ministre a prôné la "tolérance zéro" envers le racisme dans les rangs de la police et l'interdiction d'une technique d'interpellation sans la mise en oeuvre d'une autre méthode. Ce qui a déclenché la colère des policiers.

Depuis, Edouard Philippe est monté au créneau pour témoigner mercredi au Sénat de sa confiance dans les forces de l'ordre. La garde des Sceaux, Nicole Belloubet a estimé pour sa part au sujet des policiers qu'il s'agissait d'un "mouvement d'humeur qui s'apaisera".

Le président du MoDem, François Bayrou, s'est lui rendu dans un commissariat de sa ville de Pau pour dénoncer "la mise en accusation des forces de sécurité".

Mais, dans l'opposition de droite comme de gauche, les appels à la démission de Christophe Castaner ont afflué. "Un ministre faible qui doit démissionner (Alexis Corbière, LFI); "rupture totale" entre le ministre et la police (Eric Ciotti, LR).

Marine le Pen (RN) a fustigé, quant à elle, "l'abandon récurrent" des policiers et la mise en place "d'une présomption de culpabilité" pour la police.

Dans l'entourage du ministre, on a fait remarquer que les syndicats n'appelaient à aucun moment à sa démission.

Lors de ses rencontres avec les syndicats, Christophe Castaner a reconnu, selon ces derniers, "une connerie", une maladresse de langage quand il a demandé, en cas de "soupçon avéré" de racisme, une suspension du fonctionnaire concerné. Pour le ministre, cette suspension conservatoire ne peut intervenir qu'en cas de faits avérés.

MM. Castaner et Nuñez ont aussi confirmé dans leur communiqué la suppression de la technique "d'étranglement", "jugée dangereuse par le groupe de travail (...) chargé de passer en revue l'intégralité des gestes et techniques d'intervention des forces de l'ordre", écrivent-il.

"Un groupe de travail sera chargé d'ici le 1er septembre de déterminer les techniques et moyens matériels de substitution, auxquels les fonctionnaires seront alors formés", annoncent-ils.

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