La doyenne légale des Français a bientôt 115 ans et elle est Mahoraise

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Par AFP
Publié le 14 octobre 2017 - 12:32
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Tava Colo, alitée dans la maison de l'une de ses petites-filles et entourée des membres de sa famill
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Tava Colo, alitée dans la maison de l'une de ses petites-filles et entourée des membres de sa famille à Mamoudzou le 12 octobre 2017
© Ornella LAMBERTI / AFP

Elle est alitée depuis 2010, mais a toute sa tête et vit dans son village natal entourée des siens: la Mahoraise Tava Colo est née le 22 décembre 1902, selon sa carte d'identité, ce qui en fait la doyenne "légale" des Français à bientôt 115 ans, même si l'état civil mahorais est parfois sujet à caution.

Sa carte d'identité, consultée par une journaliste de l’AFP, l'atteste : Tava Colo détrônerait ainsi la dernière des doyennes connues, Honorine Rondello, née en 1903.

"Je n'avais pas du tout entendu parler d'elle", a reconnu auprès de l'AFP Laurent Toussaint, un féru de statistiques devenu au fil des ans un expert reconnu ès centenaires, mais "c'est possible" qu'elle soit la doyenne. "C'est au moins la doyenne +légale+", puisque sa carte d'identité l'atteste, "mais est-ce que c'est la doyenne véritable?. Il faudrait voir les actes qui ont permis d'établir sa carte d'identité", explique-t-il.

Car, l'état civil de Mayotte est particulier: les premières communes ne sont apparues qu'en 1977 dans l'île. Avant cette date, les registres d'état civil étaient tenus par les cadis (juges musulmans), sur un territoire où la tradition orale prédomine, et la retranscription d'un état civil "coutumier" vers un état civil de droit commun a parfois été compliqué.

Contactée par l'AFP sur l'authenticité des actes de naissance produits entre 1900 et 1910, la directrice des services à la population de la mairie de Mamoudzou en a confirmé la véracité "grâce aux éléments que nous avons à notre disposition, tels que les jugements supplétifs". Une date de naissance peut être attribuée et un état civil enregistré par un jugement supplétif rendu par un tribunal, dans les cas où l'acte de naissance d’une personne est inexistant, perdu ou détruit.

Loin de ces préoccupations, Tava Colo réside actuellement chez une de ses petites-filles à Passamaïnty, son village natal, situé sur la commune de Mamoudzou (chef-lieu de Mayotte).

- 53 arrière-arrière-petits-enfants -

C'est là qu'une conseillère de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, lui a rendu visite fin septembre, comme elle l'a confirmé à l'AFP.

Alitée depuis 2010, l’aînée des Français, n'est jamais seule puisque ses 9 petits-enfants -dont le plus vieux est né en 1949 et la plus jeune en 1971-, ses 40 arrière-petits-enfants et ses 53 arrière-arrière-petits-enfants viennent régulièrement lui rendre visite. Ses deux filles, qu’elle a eues avec son premier mari, sont aujourd’hui décédées.

Ses petites-filles, qui la surnomment affectueusement "coco" ("grand-mère" en shimaoré, la langue locale), racontent que Tava Colo a eu plusieurs maris, qu’elle aurait congédiés lorsque ceux-ci ne s’entendaient pas avec ses enfants.

Car pour la doyenne, qui a passé les longues années de sa vie à s'occuper des siens, en parallèle de son travail aux champs, la famille est "sacrée".

Cette petite femme très mince au visage peu marqué pour son grand âge est toujours lucide et raconte en shimaoré avec émotion des épisodes marquants de sa longue vie, tel ce jour où les habitants de son hameau l’ont réprouvée.

Entre 1958 et 1975, les "soroda" (défenseurs d'une Mayotte française) et les "serrez-la-main" (partisans du rapprochement avec les Comores) s’affrontaient dans un conflit idéologique féroce. A cette époque, Tava Colo, qui appartenait au camp "soroda", s’est rendue au mariage d’un de ses petits-fils épousant une "serrez-la-main", affront que ne lui auraient pas pardonné ses pairs, la destituant de ses fonctions de chef de village.

Quand on demande à la doyenne aux yeux voilés par la cataracte ses secrets de longévité, elle répond simplement "qu’il faut être respectueux de tous, petits et grands, et toujours prendre soin de soi, être très propre".

Au fil des années, Tava Colo trouve que Mayotte a changé : "Avant, il n’y avait pas toutes ces tensions et les gens vivaient du strict nécessaire".

Pour ses petite-filles, Tava Colo est la mémoire de l’île. "A chaque fois qu’une copine vient à la maison, Tava nous raconte qui c’est et quel lien de parenté on a avec elle !", narre, amusée, l’une d’entre elles.

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