Tariq Ramadan, poursuivi pour viols, reste en prison

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Par Mehdi CHERIFIA et Benjamin LEGENDRE - Paris (AFP)
Publié le 22 février 2018 - 07:30
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L'islamologue Tariq Ramadan, lors d'une conférence à Abidjan, le 27 août 2011
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© SIA KAMBOU / AFP/Archives
Tariq Ramadan est en détention depuis le 2 février.
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Tariq Ramadan, mis en examen pour viols, reste en prison: la cour d'appel de Paris a décidé jeudi de maintenir en détention provisoire l'intellectuel musulman, qui demandait sa remise en liberté en invoquant notamment son état de santé.

Ecroué depuis le 2 février, le théologien suisse de 55 ans dit souffrir d'une sclérose en plaques et d'une neuropathie. Avant de se prononcer, la chambre de l'instruction avait désigné un expert médical, qui a jugé lundi que son état est compatible avec son incarcération.

"La chambre de l'instruction vient de confirmer l'ordonnance de mise en détention provisoire de Tariq Ramadan", a indiqué jeudi une source judiciaire.

L'audience s'est tenue à huis clos et en son absence, car il avait refusé de comparaître. La raison de ce refus n'a pas été précisée.

L'intellectuel, qui conteste les accusations portées par deux femmes en France contre lui, est écroué à la prison de Fleury-Mérogis (Essonne).

Sa détention a suscité un vif émoi dans une partie des rangs musulmans, certains dénonçant un "deux poids, deux mesures", voire un "complot" contre une des rares figures médiatiques de l'islam européen.

Environ 80 personnes se sont rassemblées jeudi en fin de journée devant le palais de justice de Paris pour protester contre son maintien en détention, a constaté une journaliste de l'AFP. "Justice pour Tariq Ramadan", pouvait-on lire sur le T-shirt d'une jeune femme. Pour Salma, la cinquantaine, "la présomption d'innocence n'est pas respectée, c'est de la torture psychique et physique".

M. Ramadan a été mis en examen le 2 février pour viols, dont l'un sur personne vulnérable, après les plaintes de deux femmes fin octobre, qui ont débouché sur une information judiciaire confiée à trois juges d'instruction.

Toutes deux ont confié aux enquêteurs l'"emprise mentale" qu'exerçait sur elles ce "maître spirituel". Elles ont décrit des rendez-vous ayant soudainement basculé dans des rapports sexuels d'une grande violence sous la contrainte, dans des hôtels en marge de conférences à succès de l'islamologue, le 9 octobre 2009 à Lyon et en mars-avril 2012 à Paris.

La justice a ordonné son placement en détention provisoire car elle craint une fuite à l'étranger ou d'éventuelles pressions sur les plaignantes ou d'autres femmes ayant témoigné sous X.

Des sources proches du dossier ont expliqué à l'AFP que l'expert médical désigné par la justice a aussi estimé "incertain" le diagnostic antérieur des deux pathologies, mais a recommandé un bilan neurologique complet.

- Demande de dépaysement -

Dans un mémoire transmis à la justice, la défense de M. Ramadan critiquait un examen effectué "sommairement" jeudi dernier et relevait que le médecin ne disposait pas du dossier médical de son client.

Ce dernier, petit-fils du fondateur de la confrérie islamiste des Frères musulmans, avait été hospitalisé le lendemain de cet examen, durant quatre jours, après avoir vu son état de santé se dégrader, selon son entourage.

Les avocats ont également proposé des garanties pour obtenir la libération de Tariq Ramadan: la remise de son passeport suisse, le versement d'une caution de 50.000 euros et une obligation de pointer chaque jour au commissariat.

Ses conseils dénonçaient aussi ce qu'ils considèrent comme des incohérences dans les récits des plaignantes, et l'absence d'investigation sur des éléments présentés comme étant à décharge. Ils ont réclamé un dépaysement de la procédure.

Ils avaient riposté une première fois en novembre, en déposant une plainte contre X pour subornation de témoin, en visant l'essayiste Caroline Fourest, qui combat l'islamologue depuis plusieurs années dans les médias.

L'essayiste, qui a reconnu avoir été en contact avec les deux accusatrices après le dépôt de leur plainte afin de "se soutenir", a annoncé le week-end dernier qu'elle allait porter plainte pour dénonciation calomnieuse.

L'une des plaignantes, Henda Ayari, avait aussi déposé une plainte contre X à la mi-novembre après avoir fait, selon elle, l'objet d'injures et de menaces.

Avant de se rendre à la convocation de la police française le 31 janvier, M. Ramadan n'avait pris publiquement la parole qu'à deux reprises en lien avec cette affaire: sur Facebook, fin octobre, pour dénoncer une "campagne de calomnie" enclenchée par ses "ennemis de toujours", et sur Twitter, début novembre, pour démentir des accusations d'abus sexuels sur mineures publiées par le journal La Tribune de Genève.

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