La politique d'éducation prioritaire n'a pas atteint ses objectifs

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Par Isabelle TOURNÉ - Paris (AFP)
Publié le 17 octobre 2018 - 15:23
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La politique d'éducation prioritaire, qui vise à réduire les écarts scolaires liés aux origines sociales des élèves, n'a pas atteint ses objectifs, estime la Cour des comptes
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© BERTRAND LANGLOIS / AFP/Archives
La politique d'éducation prioritaire, qui vise à réduire les écarts scolaires liés aux origines sociales des élèves, n'a pas atteint ses objectifs, estime la Cour des comptes
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La politique d'éducation prioritaire, qui vise à réduire les écarts scolaires liés aux origines sociales des élèves, n'a pas atteint ses objectifs, estime la Cour des comptes, préconisant de recentrer les efforts sur le primaire et les établissements les plus défavorisés.

Dans un rapport publié mercredi, la Cour dresse un bilan "décevant" de cette politique, sur laquelle s'appuient les gouvernements successifs depuis près de 40 ans pour aider les établissements situés dans des zones socialement défavorisées.

Elle concentre des moyens (1,7 milliard d'euros en 2017) au bénéfice de 20% des élèves dans plus de 1.000 réseaux réunissant collèges et écoles, dont 350 en éducation prioritaire renforcée (REP+), les autres en REP.

Son objectif était de réduire à moins de 10% les écarts de niveau entre les élèves scolarisés en éducation prioritaire et les autres.

Diverses études internationales, notamment Pisa, montrent en effet qu'en France, plus qu'ailleurs, les inégalités sociales pèsent sur les résultats des élèves.

Or, selon la Cour des comptes, qui a débuté ses travaux sur le sujet il y a deux ans, la politique d'éducation prioritaire n'a pas atteint son objectif. L'effet de la scolarisation en éducation prioritaire sur les résultats des élèves est même "très faible".

Ainsi, au collège, si les écarts de performance en mathématiques et en français ne se détériorent plus, ils restent de l'ordre de 20% à 30% selon les disciplines et les années.

La Cour trouve plusieurs explications à ces résultats décevants: l'outil le plus efficace, la réduction de la taille des classes, est resté trop longtemps modeste et pas assez orienté vers les REP+ et le premier degré (maternelle et primaire).

"Ce n'est pas le premier rapport dans lequel nous préconisons de redéployer les moyens de l'éducation nationale en faveur du primaire, ces années-là sont essentielles", a insisté mercredi le premier président de la Cour des Comptes Didier Migaud, en présentant le rapport.

- Deux ans d'ancienneté -

Le ministre de l'Education Jean-Michel Blanquer a lancé depuis l'an dernier le dédoublement des classes de CP et CE1 en REP+ et en REP, ce qui semble correspondre aux recommandations de la Cour. Mais cette dernière préconise de concentrer cette mesure "très coûteuse" à la fois sur les trois premières années des apprentissages fondamentaux (grande section de maternelle, CP, CE1) et sur les zones les plus difficiles.

Un autre "levier à approfondir", selon les auteurs du rapport, serait de renforcer l'attractivité des postes en éducation prioritaire. Les enseignants qui sont affectés dans ces quartiers défavorisés sont souvent les moins expérimentés et l'absentéisme des profs y est plus marqué, avec un recours fréquent à des contractuels.

Jusqu'ici, les différents mesures mises en place pour les stabiliser (primes, points gagnés pour les mutations...) n'ont pas porté leurs fruits, selon la Cour. Les effets de la création d'une nouvelle prime de 1.000 euros par an en REP+ (qui pourrait atteindre à terme 3.000 euros) ne peuvent encore être évalués.

Pour la Cour, il faudrait affecter en éducation prioritaire des enseignants ayant au moins deux ans d'ancienneté et élargir la capacité des chefs d'établissement à recruter "sur profils" pour ces postes particuliers. Une idée qui semble avoir les faveurs de Jean-Michel Blanquer.

La "labellisation" des établissements en REP ou REP+ a aussi pu encourager des stratégies d'évitement de la part de certaines familles, ce qui a réduit encore la mixité sociale, souligne le rapport.

La Cour des Comptes recommande de sortir de cette logique "binaire" et de répartir l'ensemble des établissements en neuf catégories en fonction de l'origine sociale et des résultats scolaires des élèves. Une façon d'allouer différemment les moyens pour mieux tenir compte des 70% d'élèves défavorisés, scolarisés en-dehors de l'éducation prioritaire, tout en accentuant l'effort sur les établissements concentrant le plus de difficultés.

Le gouvernement vient de confier une mission à l’universitaire Pierre Mathiot et à l’inspectrice générale Arianne Azéma pour repenser l’éducation prioritaire, dont les résultats sont attendus pour juin 2019.

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