L'amertume des écologistes, îlots de résistance au moratoire fiscal

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Par Baptiste BECQUART - Paris (AFP)
Publié le 04 décembre 2018 - 19:37
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Yannick Jadot, le 30 mars 2017 à Paris
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© Philippe Lopez / AFP/Archives
Yannick Jadot, le 30 mars 2017 à Paris
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L'écologie "se prend une balle perdue": amers mardi après le moratoire annoncé par le gouvernement, les écologistes, derniers soutiens de la hausse de la taxe sur les carburants, se disent pourtant convaincus mardi que le "réalisme" social est de leur côté.

Après le renoncement à la taxe poids lourds lors du quinquennat Hollande et de la taxe carbone sous Sarkozy, le recul du gouvernement au coeur de la crise des "gilets jaunes" sonne comme un nouveau coup dur aux oreilles des écologistes, un brin fatalistes mardi.

Englué dans une crise qui a atteint un paroxysme samedi avec des scènes de guérilla urbaine à Paris, l'exécutif a présenté un moratoire de six mois sur la hausse de la taxe carbone, un gel des tarifs du gaz et de l'électricité cet hiver et aucun durcissement du contrôle technique automobile avant l'été.

Autant "annoncer un moratoire sur l'écologie en général", peste Yannick Jadot, tête de liste EELV pour les Européennes de mai, auprès de l'AFP. "Pour le gouvernement la fiscalité écologique a été avant tout une fiscalité de rendement afin de financer la fin de l'ISF."

"Ils ont transformé l'écologie en bouc émissaire et c'est elle qui prend une balle perdue, alors que c'est l'ensemble de la politique qui est contestée" par les "gilets jaunes", lance Julien Bayou, porte-parole du parti.

Celui-ci souhaite la convergence à Paris samedi entre les "gilets jaunes" et la marche pour le climat prévue le même jour à l'occasion de la COP24 en Pologne.

Nicolas Hulot, qui a quitté à grand fracas le gouvernement en septembre, a toutefois estimé: "Ce n'est pas le moment (pour cette marche) car c'est un risque de confrontation supplémentaire et de confusion des messages".

La Fondation pour la nature et l'homme qu'il a créée n'en a pas moins redouté, à propos du moratoire, un "renoncement à l'écologie". Nicolas Hulot a expliqué: "Il faut, dans le même temps que l'on monte le prix du carbone, mettre à disposition dans les territoires des outils pour permettre à chaque citoyen d'économiser et de réduire leur consommation durablement".

France Nature Environnement voit pour sa part dans le moratoire "une grave erreur", "une régression" qui sacrifie l'écologie sans répondre aux préoccupations sociales.

- "Bataille culturelle" -

EELV est la seule formation politique à avoir décidé de soutenir la mesure jusqu'au bout, avec Génération écologie de la députée Delphine Batho. Une "cohérence et une constance" qui seront portées à leur crédit, jugent les écologistes en choeur.

D'abord parce que, selon Yannick Jadot, les "gilets jaunes" ne sont pas ennemis de l'écologie, mais vivent une "crise de la vie chère, de la fracture territoriale".

"Il n'y a pas fondamentalement de remise en cause de la transition écologique dans le mouvement", constate de son côté Guillaume Sainteny, qui enseigne le développement durable à Agro Paris Tech : "Les +gilets jaunes+ critiquent simplement (le fait) que la transition écologique ne leur bénéficie pas."

"Nos positions sont marquées du sceau du réalisme économique", dit Yannick Jadot, "parce qu'elles peuvent améliorer la vie, par exemple permettre des factures moins lourdes grâce à la rénovation thermique" des logements.

Mais l'idée, classique chez les écologistes, explique Daniel Boy, spécialiste de l'écologie politique au Cevipof, "est très difficile à imposer chez les gens: le problème social se heurte à l'écologie, qui dans un premier temps leur fait payer davantage".

Les écologistes sont pourtant persuadés de gagner "la bataille culturelle", selon l'expression de David Cormand. Et donc la bataille électorale? "Nous sommes en train de gagner du terrain en Europe", se félicite Yannick Jadot, en référence aux succès récents des écologistes en Allemagne et en Belgique.

EELV commence d'ailleurs à infléchir sa stratégie, Yannick Jadot insistant sur l'"écologie du quotidien qui fonctionne" grâce à des paysans ou des entrepreneurs. Ses yeux sont braqués sur les élections européennes de mai prochain, où il espère atteindre 15% de voix.

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