L'Assemblée relance le débat sur l'interdiction de la fessée

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Par Charlotte HILL - Paris (AFP)
Publié le 29 novembre 2018 - 06:08
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Une gravure représentant une femme administrant une fessée à un enfant.
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@Flickr/Ceatives Commons
Une proposition de loi vise à interdire la fessée.
@Flickr/Ceatives Commons

Faut-il interdire les fessées, tapes ou gifles données aux enfants ? L'Assemblée a entamé jeudi soir des débats sur cette question sensible et récurrente de l'interdiction des "violences éducatives ordinaires", perçue par certains comme une atteinte à la liberté des parents.

Le MoDem défend en première lecture une proposition de loi à la portée largement symbolique, mais qui relance une controverse toujours vive sur les châtiments corporels en France, où le proverbe "qui aime bien châtie bien" a toujours ses partisans.

Selon la Fondation pour l'Enfance, 85% des parents français ont recours à des violences dites éducatives. La proposition MoDem réclame au gouvernement un "état des lieux" sur le sujet avant septembre 2019.

Dès l'ouverture des débats, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a apporté un franc soutien au texte, arguant qu'"on n'éduque pas par la peur". Cette violence "prétendument éducative" a des "conséquences désastreuses sur le développement de l'enfant", a-t-elle affirmé.

"Bien sûr c'est le rôle premier des parents", mais "l’Etat a aussi pour mission de protéger la dignité et l’intégrité des enfants", a estimé la ministre, pour qui le texte n'est pas "exclusivement symbolique" car il permettra "de rompre avec l'appréciation parfois souple de la jurisprudence" d'un "droit de correction".

Le texte ne prévoit pas de nouvelles sanctions pénales car elles existent déjà, et a une "visée pédagogique", de l'aveu même de la rapporteure centriste Maud Petit.

Il s'agit d'inscrire dans le Code civil, à l'article lu lors des mariages, que "les titulaires de l'autorité parentale l'exercent sans violence" et qu'"ils ne doivent pas user à l'encontre de l'enfant de moyens tels que la violence physique, verbale ou psychologique, les châtiments corporels ou l'humiliation".

L'interdiction formelle permettrait à la France d'être en conformité avec les traités internationaux, alors que le pays a été épinglé à plusieurs reprises sur ce sujet, par le Conseil de l'Europe en 2015 ou le comité des enfants de l'ONU l'année suivante.

La France deviendrait ainsi le 55e État à interdire totalement les châtiments corporels, selon l'"Initiative mondiale pour mettre un terme à tous les châtiments corporels sur les enfants", une ONG basée à Londres. La Suède avait légiféré sur le sujet dès 1979.

- "Utilité publique" -

Après plusieurs textes inaboutis, la mesure avait déjà été inscrite dans la loi "Égalité et citoyenneté", mais avait été censurée en janvier 2017 au motif qu'il s'agissait d'un "cavalier législatif", c'est-à-dire sans rapport avec l'objet du projet de loi.

Outre le soutien du gouvernement, le texte MoDem a l'appui de différentes organisations (Fondation pour l'Enfance, Association STOP VEO...) ou du Défenseur des droits, Jacques Toubon qui a défendu "un signal politique fort".

Mais, lors des débats en commission, des élus de droite et d'extrême droite avaient dénoncé une "ingérence" dans la vie des familles et l'"ineptie", voire le "ridicule" de la proposition.

Dans l'hémicycle, Maud Petit a insisté sur le fait que le texte "ne dit pas aux parents comment éduquer leurs enfants" et "ne conduira pas un parent ayant eu un geste malheureux en prison", mais vise à "changer les comportements".

Les premiers intervenants ont déploré, à l'instar de Michèle Victory (PS) la simplification "à outrance de la problématique posée" en résumant ce débat à l'idée d'être pour ou contre la fessée, ou vanté un texte d'"utilité publique" (Bastien Lachaud, LFI).

Alors que le chef de file des élus UDI-Agir Jean-Christophe Lagarde avait raillé un texte "vide d'effet, sinon vide de sens", mais qui sera "très médiatiquement ressenti", son collègue Thierry Benoit a adopté une position moins tranchée en séance. Se disant "rassuré" par les propos de la ministre sur ce sujet "beaucoup plus grave" qu'au premier abord, il a indiqué qu'il ne voterait pas contre.

"A tous ceux qui voudraient ironiser sur le sujet, je les renvoie à ce qu'étaient les violences faites aux femmes il y a une décennie qui étaient accueillies avec les mêmes sourires narquois", avait averti en amont le patron du groupe MoDem Patrick Mignola.

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