Le Conseil constitutionnel valide l'interdiction d'exporter des pesticides prohibés dans l'UE

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Par Emmanuelle TRECOLLE, Amélie BOTTOLLIER-DEPOIS - Paris (AFP)
Publié le 31 janvier 2020 - 13:54
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Un fermier canadien pulvérise ses champs de pesticides, près de Montréal.
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© NORMAND BLOUIN / AFP/Archives
Un fermier canadien pulvérise ses champs de pesticides, près de Montréal.
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Le Conseil constitutionnel français a "pour la première fois" privilégié la protection de l'environnement, en validant vendredi l'interdiction de production en France et d'exportation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances bannies par l'UE.

L'interdiction en 2022 de "la production, du stockage et de la vente de produits phytopharmaceutiques" contenant des substances prohibées par l'UE, et destinés à des pays tiers, figurait dans la loi agriculture et alimentation (Egalim), promulguée le 30 octobre 2018.

L'Union des industries de la protection des plantes (UIPP, entreprises productrices de pesticides), rejointe par l'Union française des semenciers, avait déposé en novembre 2019 une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), soutenant que "l'interdiction d'exportation (...) était, par la gravité de ses conséquences pour les entreprises productrices ou exportatrices, contraire à la liberté d'entreprendre".

Par cette décision, le Conseil constitutionnel affirme, "pour la première fois", qu'il appartient au législateur de concilier "les objectifs de valeur constitutionnelle, de protection de l'environnement et de protection de la santé avec l'exercice de la liberté d'entreprendre".

Il juge donc que "le législateur est fondé à tenir compte des effets que les activités exercées en France peuvent porter à l'environnement à l'étranger".

- Décision unilatérale -

"C'est une très bonne nouvelle, qui donne une force juridique inédite à l'objectif de protection de l'environnement et nous permet d'agir pour l'écologie à l'échelle de la planète", s'est félicitée la ministre de la Transition écologique Elisabeth Borne, dans une déclaration transmise à l'AFP.

"On regrette cette décision unilatérale, car on constate qu'on est le seul pays au monde à avoir une réglementation qui interdise désormais la fabrication et l'exportation de produits non-homologués à destination de pays hors de l'Union européenne", a réagi auprès de l'AFP Jean-Pierre Chevallier, avocat de l'UIPP.

"Les autres Etats membres continueront à fabriquer et exporter ces produits non homologués, ce qui veut dire que ça aura un impact désastreux sur les 2.700 emplois concernés directement et indirectement", a-t-il ajouté.

L'UIPP précise dans un communiqué qu'elle "étudie les voies juridiques possibles".

Les associations de protection de l'environnement ont pour leur part salué une victoire.

"On est très contents parce que, pour nous, c'est important de ne pas faire aux autres ce qu'on se refuse à faire sur notre territoire", a déclaré à l'AFP Sophie Bardet, juriste à France Nature Environnement (FNH), qui avait déposé des observations dans cette affaire devant le Conseil constitutionnel.

- "Pas en avant historique" -

Pour l'association, cette décision permet d'apporter une "petite pierre à l'édifice pour la protection de la santé et de l'environnement en dehors de France", car ça veut dire que ces produits "ne pourront plus être produits en France et exportés vers des pays étrangers, comme l'atrazine par exemple, qu'on retrouve toujours dans l'eau même si c'est interdit".

"Nous assistons peut-être à un tournant décisif dans la hiérarchisation des droits. Pour une fois, l'écologie et le vivant l'emportent sur la recherche de profits et l'intérêt des industriels", a commenté Jean-François Julliard, patron de Greenpeace France, dans un tweet vendredi matin.

Le syndicat agricole majoritaire, la FNSEA, a pour sa part demandé de la "cohérence" au Conseil Constitutionnel.

"Quand on voit qu'effectivement, on peut saisir le conseil constitutionnel et interdire d'exporter des produits qui ne peuvent pas être consommés en France, ma demande, elle est simple, c'est que l'inverse puisse s'appliquer, a déclaré à l'AFP le secrétaire général adjoint du syndicat, Eric Thirouin, en demandant "l'application" de "l'article 44 voté dans la loi Egalim, qui dit que désormais, il ne faut pas pouvoir importer en France des produits destinés à la consommation humaine et animale qui sont interdits d'être produits sur le territoire".

"Aujourd'hui, on peut consommer en France des produits OGM, alors que la production OGM y est interdite", a-t-il donné comme exemple.

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