Le durcissement du contrôle des chômeurs passe mal chez les syndicats

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Par Déborah CLAUDE - Paris (AFP)
Publié le 02 janvier 2019 - 18:28
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Le texte du décret, publié le 30 décembre au JO au milieu d'une série sur la formation professionnelle, a été transmis aux organisations syndicales début décembre
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© JOEL SAGET / AFP/Archives
Le texte du décret, publié le 30 décembre au JO au milieu d'une série sur la formation professionnelle, a été transmis aux organisations syndicales début décembre
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Un durcissement des sanctions contre les chômeurs qui manqueraient à leurs obligations, plus important qu'annoncé par le gouvernement, a fait bondir les syndicats pour qui des demandeurs d'emplois vont être forcés à accepter des "petits boulots" à l'image des "mini-jobs" en Allemagne.

"Sous couvert d'harmonisation, ils ont durci", regrette Michel Beaugas (FO), quand la CGT ironise sur un "petit cadeau de Noël" vu comme un "signal de défiance envers les chômeurs".

Le texte du décret, publié le 30 décembre au JO au milieu d'une série sur la formation professionnelle, a été transmis aux organisations syndicales début décembre, en pleine crise des "gilets jaunes".

Le principe de revoir l'échelle des sanctions en cas de manquement avait été acté par la loi "avenir professionnel" adoptée cet été.

Le renforcement du contrôle des chômeurs, prévu par le candidat Macron pendant la campagne électorale, est présenté depuis le début comme la contrepartie d'une ouverture plus grande du régime d'assurance-chômage à des démissionnaires et à des indépendants.

Mais la réforme est nettement moins ambitieuse que la promesse de campagne d'un régime universel: de 20.000 à 30.000 nouveaux bénéficiaires potentiels par an parmi les démissionnaires, au regard des 70.000 déjà indemnisés chaque année.

En mars, le ministère du Travail avait présenté aux partenaires sociaux la nouvelle échelle de sanctions, certaines allégées, d'autres alourdies, et déjà dénoncées comme sévères par les syndicats. Le décret publié dimanche s'écarte un peu de ce qui avait été annoncé.

Le fait de ne pas se rendre à un rendez-vous avec un conseiller, par exemple, devait être sanctionné de 15 jours de radiation des listes au lieu des deux mois en vigueur. Finalement, le texte prévoit un mois de radiation, deux mois au bout de deux manquements et quatre mois au "troisième manquement".

S'agissant des sanctions concernant l'insuffisance de recherche d'emploi (refus à deux reprises d'une "offre raisonnable d'emploi" par exemple), le gouvernement avait évoqué des sanctions graduelles: "suspension" de l'allocation d'un mois la première fois, et "suppression" de deux mois la deuxième fois et de quatre mois la troisième fois.

- "Juge et partie" -

Le décret supprime l'allocation dès le premier manquement à une obligation (excepté pour le cas d'un rendez-vous raté avec son conseiller) et ne la suspend plus, ce qui permettait de conserver ses droits et de les percevoir ensuite.

"Autant, on était d'accord pour revoir l'échelle de sanctions mais pas pour une suppression au bout d'un mois", regrette M. Beaugas.

Une partie du décret comprend des mesures prévues par la loi, comme le transfert de l'État à Pôle emploi de tout le pouvoir de sanction, ou la redéfinition de ce qu'est une "offre raisonnable d'emploi".

Jusqu'à présent, ce concept était difficilement applicable et n'occasionnait que très peu de sanctions (77 radiations en 2013). Elle sera maintenant discutée avec le conseiller.

Selon une étude mise en ligne cet été par Pôle emploi, 12% des demandeurs d'emploi ne cherchent pas activement un emploi mais ce taux chute à 8% chez les bénéficiaires de l'assurance chômage.

Le contrôle doit se faire via un "journal de bord" numérique, où les demandeurs d'emploi renseigneront tous les mois leurs actes de recherche d'emploi. A partir de mi-2019, ce dispositif doit être expérimenté pendant un an dans deux ou trois régions.

Quant aux équipes de contrôle, elles sont passées de 200 à 600 personnes.

Pour Denis Gravouil (CGT), "Pôle emploi va se retrouver juge et partie". Avec la suppression de la référence au salaire antérieur comme critère d'offre "raisonnable", il craint par ailleurs que cela "force les demandeurs d'emplois "à accepter n'importe quel boulot" à l'instar des "mini-jobs" allemands.

Élu CFDT chez Pôle emploi, David Vallaperta tempère. Le salaire, qui d'ailleurs n'est pas souvent mentionné par les entreprises dans un premier temps, n'est pas le seul critère. "C'est bien plus complexe", explique-t-il, à l'AFP.

Il n'empêche, ces nouvelles règles "mettent le conseiller encore plus en première ligne", constate-t-il, regrettant au passage qu'on "accentue la dimension contrôle et qu'on ne fasse pas grand chose pour donner plus de moyens à l'accompagnement" des chômeurs.

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