Les chœurs de Notre-Dame, ces "orphelins" de la cathédrale

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Par Rana MOUSSAOUI - Paris (AFP)
Publié le 19 avril 2019 - 02:19
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Messe à Saint-Sulpice le 18 avril 2019, avec les choeurs de Notre-Dame, devenus réfugiés après l'incendie
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© JACQUES DEMARTHON / AFP
Messe à Saint-Sulpice le 18 avril 2019, avec les choeurs de Notre-Dame, devenus réfugiés après l'incendie
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Ce Jeudi Saint était un peu particulier cette année à l'église Saint-Sulpice à Paris, qui accueillait les chœurs de Notre-Dame, devenus "réfugiés" après l’incendie. En pleine messe, une jeune chanteuse craque soudain et fond en larmes, submergée par l’émotion.

Pour la première fois depuis des siècles, les choeurs de Notre-Dame, une formation née avec la cathédrale au XIIe siècle, chantaient durant la Semaine sainte en dehors de leur "maison" comme ils l'appellent.

Vers la fin de la messe jeudi soir, les benjamins des chœurs, âgés de 9 à 18 ans, ont reçu un tonnerre d'applaudissements des plus de 2.200 fidèles rassemblés à Saint-Sulpice, la plus grande église de Paris.

Dimanche, ils chantaient encore les Rameaux à la cathédrale, ce qu'ils ne pourront plus faire avant cinq ans, voire plus.

Dans les yeux de Marie Lissilour, 17 ans, le choc de l'incendie se lit encore. Lors d'un morceau d'orgue, elle sort son mouchoir et pleure, avant d'être réconfortée par une amie choriste qui l'entoure de ses bras.

"C'est beaucoup d'émotion de me dire que je ne chanterai plus à Notre-Dame. Là, j'ai réussi à chanter, mais j'ai un peu craqué", dit la jeune fille à la voix très douce.

"Notre-Dame, c'est comme chez nous, on y a nos casiers, nos petites habitudes, on connaît les gens, nos endroits favoris", dit la choriste.

Son endroit favori d'ailleurs n'est autre que les stalles, les sièges d'où ils chantaient. Mardi, elle découvrait avec effroi les photos.

"Elles étaient noires, on ne savait pas si elles étaient brûlées ou pleines de suie. On avait tellement de souvenirs dans ces stalles", poursuit Marie.

- "Notre-Dame, c'est ma vie" -

Cette Parisienne terminait une séance de Badminton lundi vers 19H30 lorsqu'elle apprend la nouvelle. "J'allume mon téléphone et je vois une centaine de messages +Notre-Dame brûle+ et des appels manqués de proches qui me demandaient si j'étais là-bas".

Habitant près de la gare de Lyon, elle a vu en rentrant chez elle la fumée puis, de son 6e étage, les flammes dévorant le toit. "C'était un gros choc; on n'arrive toujours pas à digérer".

Claire Macé, 17 anS également, est dans le choeur de Notre-Dame depuis 10 ans. Elle y allait tous les jours, prenant des cours de chant médiéval, de technique vocale, de solfège, de théâtre.

"J'ai grandi là-bas. Notre-Dame c'est plus qu'un choeur, c'est un foyer. En plus, c'est 1.000 ans de musique derrière nous et dans chaque mur il y a les échos de ces souvenirs", poursuit la jeune brune qui vit près de Bastille.

Comme Marie, elle a cru à une mauvaise blague au début. "Après c'était tellement bouleversant qu'on ne réalise pas en fait, on a des rires nerveux. Ce n'est que mardi que je me suis dit, Notre-Dame, c'est ma vie".

"Je voyais la fumée monter dans le ciel de chez moi, on dirait un champignon de bombe atomique... et je me suis dit +c'est ma maison et elle est en train de partir en flammes+. Je n'avais même pas la force de pleurer", précise Claire qui est allée veiller lundi soir jusqu'à 02H00 du matin près de la cathédrale.

Qu'adviendra-t-il des 160 membres des choeurs, connus sous le nom de la Maîtrise de Notre-Dame?

"La Maîtrise ne va pas du tout s'arrêter; on a le rôle d'ambassadeur de la cathédrale, on est toujours là", explique Henri Chalet, chef de choeur principal, précisant que les répétitions se tiennent toujours dans leurs locaux Boulevard Saint Germain.

Tous les concerts de la Maîtrise, prévus pour l'année seront organisés dans des églises de Paris et de toute la France, selon lui.

"J'ai reçu des centaines d'invitations d'églises à travers la France et de l'étranger, de Copenhague à Venise, en passant par l'Angleterre", se réjouit-il.

"Ça va être l'occasion de faire rayonner la Maîtrise, on est plus vivants que jamais", assure M. Chalet.

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