Les mères de lycéens arrêtés voici un an à Mantes-la-Jolie vent debout contre l'"humiliation"

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Par Céline AGNIEL - Mantes-la-Jolie (AFP)
Publié le 06 décembre 2019 - 14:39
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Jeunes arrêtés par la police le 6 décembre 2018 près du lycée Saint-Exupery à Mantes-la-Jolie après avoir été contraints de rester à genoux et mains sur la tête
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© Céline AGNIEL / AFP/Archives
Jeunes arrêtés par la police le 6 décembre 2018 près du lycée Saint-Exupery à Mantes-la-Jolie après avoir été contraints de rester à genoux et mains sur la tête
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Il y a tout juste un an, l'image de lycéens arrêtés à Mantes-la-Jolie, à genoux mains sur la tête par la police, avait provoqué un tollé. Ayant vécu cela comme "une humiliation", des mères réclament justice, appelant à une marche dimanche à Paris.

Le 6 décembre 2018 au matin, la tension est palpable aux abords de deux lycées de cette ville populaire des Yvelines, après trois jours de heurts et de dégradations en marge du mouvement de protestation lycéen.

Des groupes de jeunes mettent le feu à des poubelles; deux voitures partent en fumée. La police tente de les disperser à coup de LBD et de tirs de gaz lacrymogènes.

Soudain, une charge policière. Un groupe volatil de jeunes gens, élèves sortant de cours et fauteurs de troubles mêlés, est regroupé devant le lycée Saint-Exupéry.

L'image va faire le tour des réseaux sociaux: 151 jeunes, âgés de 12 à 21 ans, à genoux, tête baissée, mains sur la tête, dans un jardin privé et l'arrière-cour d'une association, tenus en respect par des policiers avant d'être dispatchés dans des commissariats.

Une vidéo tournée par un policier avec le commentaire "voilà une classe qui se tient sage", diffusée quelques heures plus tard, achève d'attiser la polémique.

Le fils de Myriam (elle se présente sous son seul prénom) est "resté agenouillé pendant trois heures et demie" avant de passer dans trois commissariats différents puis d'être finalement interrogé. Mais "sans avocat ni être filmé, ce qui annule la procédure normalement", relève la mère de l'adolescent, 16 ans aujourd'hui, qui n'a finalement pas été poursuivi.

"Les gens, quand ils voient les enfants à genoux, ils voient des jeunes de banlieue qui ont cassé. Et quand vous leur dites que ce n'est pas vrai, qu'ils sont ressortis avec des rappels à la loi pour plus de 90% des enfants, ils disent +oui, mais il y a forcément quelque chose qui ne va pas+", peste Myriam.

- "Zizanie" -

Soad Dahoumane, mère d'un lycéen, affirme que "la grosse majorité" sortait du lycée pour déjeuner, comme son fils. "C'est une minorité qui a foutu la zizanie devant le lycée et en fait, tout le monde a pris!".

Sollicitée par l'AFP, la direction de la police des Yvelines n'a pas souhaité s'exprimer, mais le syndicat Unsa Police a tenu à rappeler que "cela faisait plusieurs jours que de nombreux jeunes présents devant les établissements scolaires mettaient en danger leur intégrité physique et celle des habitants".

Pour le syndicat, l'intervention était "nécessaire": "en face de 150 jeunes", les forces de l'ordre ont "figé la situation", pas pour "faire un exemple" mais pour pouvoir ultérieurement "déterminer le degré d'implication de chacun".

La méthode employée choque toujours Yessa Belkhodja, porte-parole du Collectif de défense des jeunes du Mantois, créé au lendemain des interpellations: la position à genoux a été "vécue comme une posture d'humiliation".

Plusieurs familles ont porté plainte pour violences policières, emboîtant le pas au syndicat lycéen UNL, mais l'enquête préliminaire de la police des polices a débouché sur un non-lieu.

L'UNL et le collectif ont décidé de redéposer plainte avec constitution de parties civiles, pour obtenir l'ouverture d'une instruction.

"Trois jeunes seulement ont été auditionnés" par le parquet de Nanterre (où a été dépaysé le dossier à la demande des plaignants), déplore Me Arié Alimi, l'un de leurs avocats. Il demandera, dès qu'un juge d'instruction sera nommé, à ce que l'ensemble des interpellés soient entendus.

Parallèlement, soutenu par quelque 70 partis politiques, syndicats et associations, le collectif appelle à marcher dimanche à Paris du quartier Barbès à la place de la République "contre l'arbitraire policier" et "pour la justice et la dignité".

Une enquête administrative a conclu à l'absence de "comportements déviants de la part des policiers".

L'auteur de la vidéo a été sanctionné administrativement et une action disciplinaire a été sollicitée. Une enquête du Défenseur des droits est toujours en cours.

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