L'hôpital redescend dans la rue, pour quelques milliards de plus

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Par Gabriel BOUROVITCH, Valentin BONTEMPS - Paris (AFP)
Publié le 30 juin 2020 - 06:00
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Des personnels soignants manifestent à Lyon le 16 juin 2020
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© JEFF PACHOUD / AFP/Archives
Des personnels soignants manifestent à Lyon le 16 juin 2020
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A quelques jours de la clôture du "Ségur de la santé", les personnels hospitaliers ont de nouveau manifesté par milliers dans des dizaines de villes mardi, pour obtenir davantage que les 6,3 milliards d'euros déjà mis sur la table par le gouvernement.

Après le succès de leur mobilisation du 16 juin (100.000 à 180.000 manifestants selon les sources), les syndicats et collectifs hospitaliers entendaient maintenir la pression sur l'exécutif, dans la dernière ligne droite du "Ségur de la santé".

La jauge était toutefois nettement inférieure mardi, avec deux fois moins de rassemblements prévus (une centaine dans toute la France selon la CGT) et une participation en recul: au moins 1.900 à Paris, 1.600 à Nantes, 1.200 à Lyon 700 à Montpellier, 550 à Lille, 200 à Clermont-Ferrand et Strasbourg selon les préfectures, mais aussi quelques centaines à Dijon et Grenoble.

Moins nombreux mais pas moins déterminés, à l'image de Sandrine Coudriaud, aide-soignante alsacienne, venue réclamer "un salaire juste pour les guerrières que nous sommes, envoyées au front sans protection" pendant l'épidémie de coronavirus.

"La grille des salaires n'a pas bougé depuis des années, je suis au Smic depuis 14 ans", a déploré Anne-Françoise, aide-soignante dans une clinique privée nantaise.

"On veut surtout des moyens pour bien faire notre métier", a insisté Mylène Rigaud, manipulatrice radio auvergnate, qui "ne veut pas avoir à choisir entre un patient qui est en train de mourir dans le couloir et celui qui est sans surveillance dans un box".

"Aujourd'hui, on est plus des ouvriers du soin que des soignants. Ça devient plus des usines que des hôpitaux, ça suffit", a lancé Philippe Bernard, aide-soignant nordiste.

Le "Ségur de la santé", inauguré fin mai pour concrétiser le "plan massif d'investissement et de revalorisation" promis par Emmanuel Macron, était censé répondre à ces revendications.

Mais les enveloppes proposées par le ministre de la Santé (300 millions pour les médecins hospitaliers, 6 milliards pour les personnels soignants non médicaux), sont très loin des espoirs soulevés par cette vaste concertation.

Pour le lyonnais Stéphane, aide-soignant en cancérologie, "six milliards, c'est pas assez, quand on voit ce qu'ils injectent dans l'aéronautique par exemple, alors que la santé n'a pas de prix".

L'infirmière grenobloise Sophie Michallet a pour sa part dénoncé "des gros chiffres pour impressionner, mais rapporté à l'ensemble des personnels, c'est indigent".

- "le compte n'y est pas" -

Tous ont en mémoire les précédentes annonces du gouvernement, qui n'ont pas enrayé un mouvement social entamé au printemps 2019.

"Ça fait plus d'un an que le personnel soignant manifeste", a rappelé Philippe Martinez, présent au départ de la manifestation parisienne.

Le numéro 1 de la CGT a souhaité "des actes à la hauteur des remerciements" durant la crise sanitaire, en premier lieu "des sous pour le personnel soignant, beaucoup plus que ce qui a été annoncé".

"Le compte n'y est pas", a confirmé son homologue de Force ouvrière, Yves Veyrier, qui considère qu'"on est sur un point de départ, la négociation a démarré".

Mais le temps est compté car le "Ségur de la santé" doit s'achever vendredi, par une ultime réunion sous l'égide de l'ancienne dirigeante de la CFDT, Nicole Notat. Le chef de l'État pourrait ensuite annoncer lui-même ses arbitrages la semaine prochaine.

Interrogé sur une possible rallonge budgétaire, le ministre des Finances Bruno Le Maire a assuré mardi que "le gouvernement" serait "au rendez-vous", sans toutefois avancer de chiffre. "Nous ferons ce qu'il faudra pour les personnels soignants", a-t-il déclaré.

Les attentes sont toutefois très élevées: rien que pour l'augmentation générale de 300 euros net par mois revendiquée par tous les syndicats, il en coûterait près de 7 milliards, selon le secrétaire général de FO-Santé, Didier Birig.

Sans compter la situation des "internes et jeunes médecins qui sont rétribués de façon indécente, ni le différentiel entre les salaires du public et du privé", souligne le Collectif Inter-Hôpitaux.

La CGT regrette pour sa part que "la question des recrutements de personnels" ne soit "pas abordée" dans le cadre du "Ségur".

Le gouvernement s'est en revanche engagé à débloquer des moyens pour l'investissement, en plus de la reprise déjà programmée d'un tiers de la dette hospitalière par la Sécu. Reste à connaître le montant de cette enveloppe budgétaire.

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