Manon et Léna, militantes antispécistes : pas de "hiérarchie" dans les "oppressions"

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Par Zoé LEROY - Lille (AFP)
Publié le 04 novembre 2018 - 10:10
Mis à jour le 05 novembre 2018 - 12:18
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Manon et Léna font font partie de l'association "269 libération animale", qui lutte contre le spécisme par des actions choc, comme le 25 octobre 2014 où des militants manifesté à Paris en portant une
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© FRANCOIS GUILLOT / AFP/Archives
Manon et Léna font font partie de l'association "269 libération animale", qui lutte contre le spécisme par des actions choc, comme le 25 octobre 2014 où des militants manifesté à P
© FRANCOIS GUILLOT / AFP/Archives

Soupçonnée d'avoir vandalisé une boucherie, un restaurant et une poissonnerie à Lille, Manon -son prénom a été modifié-, antispéciste, sera jugée en décembre pour "dégradation". Avec Léna, elle milite pour que des "droits fondamentaux" soient accordés aux animaux.

Les deux jeunes activistes sont devenues vegans à "l'été 2016" après avoir visionné des vidéos de maltraitance animale sur les réseaux sociaux.

"On s'est rendu compte qu'il y avait des animaux oppressés, exploités, qui subissaient des grandes souffrances. On n'avait plus envie de participer à ce massacre", explique Léna, 20 ans, attablée dans un café d'un quartier populaire de Lille.

Elles changent alors leur façon de consommer, cessent de manger des "animaux morts", des "produits d'origine animale" mais aussi "d'aller au cirque", au "zoo" ou "d'acheter du cuir". "Antispécistes", elles s'opposent à toute hiérarchie "entre l'être humain et les autres animaux". "L'antispécisme est une lutte" tandis qu'être vegan est seulement "un mode de consommation", résume Manon, 21 ans.

Les deux militantes font partie de l'association "269 Libération animale", qui se définit comme une "organisation" luttant "contre le spécisme en pratiquant l'action directe offensive contre les institutions de domination".

Elles ont arrêté leurs études après le lycée et affirment se consacrer désormais exclusivement à cette lutte. Un combat "difficile": face à "l'industrie spéciste richissime", "surpuissante", "ce n'est pas en militant seulement le week-end qu'on fera avancer les choses", dit Léna.

Elle poursuit: "depuis 30 ans, des personnes tractent dans la rue pour sensibiliser au véganisme et la situation des animaux n'a pas changé... Nous ne sommes pas contre la pédagogie mais alors, il faut expliquer ce que subissent les animaux et non pas dire +par quoi remplacer le fromage et les oeufs ?+".

"On ne changera pas le monde en achetant des burgers vegans !", ironise Manon.

- "Injustice" -

Les deux jeunes femmes multiplient les "actions directes": blocage d'abattoirs, libération d'animaux, occupation de sièges sociaux "spécistes"... "Le but n'est plus de sensibiliser mais d'engager un rapport de force" avec les autorités, explique Manon.

L'une de leur dernières actions: le 5 juillet, avec des dizaines d'activistes, elles ont bloqué un abattoir de cochons à Tielt en Belgique. Elles y ont "libéré" "Charlotte", une truie, qui vit désormais dans un "sanctuaire privé", et se sont enchaînées pendant plusieurs heures dans le "couloir de la mort", raconte Manon.

Cette dernière, placée sous contrôle judiciaire, sera jugée le 14 décembre pour "dégradations volontaires en réunion". Elle est soupçonnée d’avoir dégradé trois commerces alimentaires du centre-ville de Lille. Des actions de nuit, à visage caché, avec lesquelles elle assure n'avoir "rien à voir".

Elle a été interpellée chez sa mère: "ils ont perquisitionné l'appartement, j'ai été placée 48 heures en garde à vue", raconte-t-elle, dénonçant des moyens "disproportionnés".

"Les chasseurs, les bouchers, les poissonniers font partie de la chaîne spéciste. Alors, s'ils sont touchés, ce n'est pas un problème pour nous, ils ont le choix de changer de métier", dit Léna, qui affirme toutefois ne pas participer à ce type d'actions.

"S'attaquer aux lobbies, c'est mieux et c'est notre but, mais c'est plus complexe. Les dégradations sur ces commerces ont permis d'attirer l'attention des médias et de l'Etat", ajoute-t-elle.

Les boucheries de la ville sont désormais protégées par des vigiles. Léna lève les yeux au ciel : "Ce sont des oppresseurs qui vivent de la vente d'animaux morts et ils essaient de renverser les rôles en se faisant passer pour victimes !"

"A force de se radicaliser dans la lutte", les deux amies ne comptent plus, parmi leurs proches, que peu de "spécistes". "C'est comme si on discutait avec des personnes sexistes, racistes ou homophobes, il n'y a pas de hiérarchisation des oppressions", lance Léna.

Et d'affirmer : "être antispéciste n'est pas un choix de vie, il y a une injustice et des victimes derrière".

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