A Marseille, le casse-tête du dédoublement des classes

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Par Estelle EMONET - Marseille (AFP)
Publié le 01 septembre 2018 - 10:00
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La mise en oeuvre du dédoublement des classes de CP et CE1 se heurte à divers  écueils
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© FRED TANNEAU / AFP/Archives
La mise en oeuvre du dédoublement des classes de CP et CE1 se heurte à divers  écueils
© FRED TANNEAU / AFP/Archives

A Marseille, l'une des villes qui a le plus d'écoles en quartier défavorisé, la mise en oeuvre du dédoublement des classes de CP et CE1 se heurte à divers écueils, même si le principe de la baisse du nombre d'élèves par classe est accueilli positivement.

A cause de la pénurie de locaux, un tiers des quelque 670 CP et CE1 de la cité phocéenne, situés en Réseau d'éducation prioritaire (REP) ou REP+, ne pourra pas, comme le prévoit la réforme, être dédoublé physiquement à la rentrée. La mesure sera remplacée par du co-enseignement avec deux maîtres par classe.

Elle est d'autant plus difficile à mettre en place que "50% des élèves marseillais dans les écoles publiques sont scolarisés dans l'un de ces REP ou REP+", explique le rectorat.

"Certaines écoles ont connu des difficultés, mais nous avons fait le maximum", affirme l'inspecteur d'académie des Bouches-du-Rhône Dominique Beck, qui salue "les efforts" de la mairie qui a annoncé la construction de 34 établissements scolaires. La municipalité est régulièrement critiquée pour le délabrement de ses écoles publiques.

Dans les écoles, on fait avec les moyens du bord. "Nous avons créé une petite salle de bric et de broc pour les cours de math et de français en petits groupes et réquisitionné la salle informatique ainsi que la bibliothèque car nous n'avions pas assez de place pour les autres classes", témoigne Cathy, enseignante de CP dans un quartier du centre-ville, considéré comme le plus pauvre de France.

Une autre école, celle de La Busserade, dans le nord de la ville, installée depuis 2010 dans des préfabriqués, a dû transformer en classe une salle servant à entreposer du matériel de sport.

Mais plus que le manque de place, Frédéric Bertet, le directeur de La Busserade, déplore "l'iniquité" de la mesure qui a pour conséquence le manque d'enseignants dans les autres classes, du CE2 au CM2, et la disparition d'enseignants spécialisés.

- "Manque de moyens"-

"A la rentrée dernière, on a eu des CM1/CM2 à double niveau avec 26 à 27 élèves et des professeurs novices, car les plus chevronnés étaient affectés en priorité aux classes dédoublées", critique également Claire Billès, secrétaire départementale du SNUIpp des Bouches-du-Rhône.

En outre, les enseignants absents n'ont pas toujours été remplacés. "Les enseignants des +brigades+ départementales censés assurer les remplacements avaient été redéployés dans ces classes dédoublées, ce qui a posé de graves problèmes", relève Frédéric Bertet.

Lors de journées de formation des enseignants programmées de longue date, il a dû "répartir les enfants dans d'autres classes ou les renvoyer chez eux".

"Avec la mise en place rapide de la réforme il a bien fallu trouver une solution, mais les +brigades+ ont été réapprovisionnées d'une trentaine de postes pour cette rentrée", rassure l'inspecteur d'académie. M. Beck rappelle que la réforme a été accompagnée dans le département par la "création de quelque 400 postes supplémentaires" orientés vers les classes de quartiers difficiles.

Le principe du dédoublement des classes est pourtant salué. "Le travail en petits groupes a beaucoup apporté aux élèves, même en co-enseignement, c'est indéniable", observe M. Bertet. "Cela a permis aux enseignants de consacrer plus de temps à ceux en difficulté et d'échanger les points de vue", poursuit-il.

"L'idée est bonne", reconnaît Michel, qui va expérimenter à la rentrée le co-enseignement avec une classe de CE1 de 22 élèves, après avoir exercé seul dans sa classe pendant vingt ans mais il déplore "le manque de moyens".

"Ce n'est pas évident, on tâtonne pour l'organisation et cela demande beaucoup de travail et de réunions informelles entre nous qui sont complètement invisibles pour l'administration", souligne l'enseignant, toutefois ravi d'apprendre de nouvelles méthodes et de partager son expérience avec un collègue.

Pour la syndicaliste Claire Billès, "la co-intervention ne s'improvise pas, ça s'apprend et malheureusement, aucun moment pour la concertation entre les enseignants n'est prévu dans leur emploi du temps. Il faudrait une vraie formation y compris pour les enseignants chevronnés".

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