Pénuries de médicaments : plus d'information, plus de coordination, mais pas de sanctions

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Par Amélie BAUBEAU - Paris (AFP)
Publié le 08 juillet 2019 - 14:32
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Des boîtes de médicaments dans les rayonnages d'une pharmacie, le 27 novembre 2017 à Paris
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© STEPHANE DE SAKUTIN / AFP/Archives
Le gouvernement a dévoilé ses pistes pour lutter contre la pénurie de médicaments
© STEPHANE DE SAKUTIN / AFP/Archives

Mieux partager l'information, mieux gérer le "circuit du médicament" de l'usine jusqu'à la pharmacie... Le gouvernement a dévoilé lundi ses pistes pour lutter contre la pénurie de médicaments, mais les associations y voient "très peu de mesures concrètes et dissuasives".

Les tensions d'approvisionnement des médicaments se sont amplifiées ces dernières années, en raison de multiples facteurs: hausse de la demande mondiale, prix de vente de certains traitements jugés peu attrayants par les laboratoires ou les intermédiaires mais aussi politique de "flux tendu" visant à limiter les stocks, forte concentration des sites de production, parfois situés à grande distance, en Inde ou en Chine...

Un quart des Français s'est déjà vu refuser la délivrance d'un médicament ou d'un vaccin pour cause de pénurie, selon une enquête publiée en janvier à l'initiative de France Assos Santé.

Pour "améliorer la disponibilité des médicaments pour tous les Français", la ministre de la Santé Agnès Buzyn a présenté lundi aux acteurs concernés une "feuille de route provisoire", qui sera enrichie des propositions de ces derniers pour aboutir à un plan définitif en septembre.

Le premier axe de ce plan vise à "promouvoir la transparence et la qualité de l'information". Il prévoit ainsi de généraliser en 2020 la plateforme qui permet aux pharmaciens de signaler les ruptures d'approvisionnement au laboratoire concerné et, en sens inverse, de fournir une information de meilleure qualité aux pharmaciens pour qu'ils puissent par exemple donner aux patients la "date approximative" de la prochaine disponibilité d'un médicament.

La loi Santé, qui devrait être adoptée d'ici fin juillet, permettra par ailleurs aux pharmaciens de remplacer le médicament indisponible initialement prescrit, s'il s'agit d'un "médicament d'intérêt thérapeutique majeur" (MITM).

La feuille de route propose aussi de "sécuriser l'approvisionnement" de ces MITM à fort risque de pénurie, notamment les anticancéreux, en élaborant "une cartographie des sites de production" de matières premières pharmaceutiques et de médicaments et en améliorant les procédures d'achat hospitalier.

Elle prône également davantage de "coopération européenne", en poursuivant "les discussions sur l'achat groupé notamment de vaccins essentiels au niveau européen" et un "partage d'information concernant les situations et les causes des pénuries à l'échelle de l'Europe".

- Vaccins, anticancéreux, corticoïdes... -

Un comité de pilotage sera créé pour assurer la mise en oeuvre de ces mesures, associant l'Agence du médicament (ANSM) et les laboratoires pharmaceutiques, grossistes, associations de patients, etc.

"Cette feuille de route ministérielle, si elle témoigne d'une volonté louable des pouvoirs publics de s'attaquer au problème, ne présente en l'état que très peu de mesures concrètes et dissuasives pour lutter contre ces dérives", estime toutefois France Assos Santé, fédération d'associations de patients.

"Industriels et grossistes répartiteurs sont les principaux responsables de cette situation: stratégies financières contestables, exportation des stocks vers des pays +qui paient mieux+, désengagement sur certains médicaments, ou trop forte concentration des sites de production font partie des causes identifiées de longue date", estime-t-elle.

Davantage de contraintes "n'est pas une réponse", juge toutefois le Leem, qui fédère les industriels du médicament.

Il y a déjà en France "beaucoup de possibilités de sanctions et de mesures réglementaires qui contraignent l'industrie du médicament" et si on les renforce, "certains producteurs ne seront plus disposés à vendre leurs médicaments sur le marché français", estime Thomas Borel, directeur scientifique du Leem, interrogé par l'AFP.

Le dirigeant a toutefois ajouté que l'initiative du ministère allait "dans le bon sens", jugeant "important" qu'il y ait "un pilotage" public "d'un certain nombre d'actions à mettre en oeuvre".

Selon les projections de l'ANSM, plus de 1.200 traitements ou vaccins seront concernés par des situations de rupture ou tensions d'approvisionnement sur l'ensemble de l'année 2019. C'est 60% de plus qu'en 2018 et 30 fois plus qu'en 2008, souligne France Assos Santé.

Le sujet est devenu très médiatisé, en raison de ruptures portant sur des produits d'utilisation courante ou de première importance, comme des antibiotiques, des vaccins, des anticancéreux ou encore des traitements contre la maladie de Parkinson.

Ces dernières semaines, ce sont des difficultés d'approvisionnement concernant les corticoïdes qui ont provoqué l'inquiétude de médecins et de patients.

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