Périgord : un projet de contournement routier suscite la colère

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Par Julie FRAYSSE et Benoït PETIT - Beynac-et-Cazenac (France) (AFP)
Publié le 21 novembre 2018 - 18:26
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Jérémie Kerdraon, opposant au projet de déviation routière, perché sur une grue à Beynac-et-Cazenac en Dordogne, le 21 novembre 2018
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© GEORGES GOBET / AFP
Jérémie Kerdraon, opposant au projet de déviation routière, perché sur une grue à Beynac-et-Cazenac en Dordogne, le 21 novembre 2018
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Un homme seul perché en haut d'une grue depuis cinq jours symbolise la forte opposition que suscite un projet pharaonique de déviation routière lancé par une petite ville de Dordogne dans l'une des vallées les plus touristiques du Périgord.

Avec son budget de plus de 30 millions d'euros pour construire une déviation routière de 3,2 km et deux ponts, le projet de "contournement de Beynac", est censé résorber les bouchons qui paralysent le centre-ville durant la saison estivale.

Mais il cristallise depuis des années l'opposition des défenseurs de l'environnement comme ceux du patrimoine.

Au point de provoquer la colère de Stéphane Bern, qui a tweeté une attaque en règle contre l'initiateur du projet, Germinal Peiro, président PS du conseil départemental, traité par le Monsieur Patrimoine national de "Ceauscecu de la Dordogne" et d'"amoureux du béton".

"Les projets se décident dans les assemblées élues et pas sur les plateaux de télévision", a rétorqué l'élu.

Un argument qui n'a pas convaincu Yann Arthus-Bertrand ou Noël Mamère, qui soutiennent l'opposition à un projet qui traverse une vallée d'exception, comptant cinq châteaux.

En septembre, la colère est encore montée d'un cran quand les bulldozers ont endommagé un grand bassin d'un sanctuaire gallo-romain vieux de plus de 2.000 ans.

Perché depuis vendredi à une dizaine de mètres du sol sur sa grue, Jérémie Kerdraon, 32 ans, "SDF et protecteur de la nature", a pris l'affaire en main.

"Je veux dénoncer ce genre de projet qui détruit la nature", crie-t-il mercredi à l'AFP restée au sol. "Je vais rester là tant qu'il faudra et tant que mon corps tiendra... J'ai de quoi tenir au moins une semaine en me rationnant". "Pour la nuit, j'ai un filet de sécurité, un hamac, un bon duvet".

La route prévue, déclarée d'utilité publique en 2001, doit passer à environ 150 mètres du château classé de Feyrac (XVe/XVIe siècles) et non loin de ceux de Marqueyssac et des Milandes, dernière demeure de la chanteuse Joséphine Baker.

- "Onéreux et obsolète" -

Le collectif "Sauvons la vallée de la Dordogne" a lancé plusieurs recours devant le tribunal administratif de Bordeaux, demandant la suspension de l'arrêté préfectoral de janvier autorisant les travaux. Deux ont été jugés recevables par le conseil d'État.

Célèbre pour son château fort du XIIe siècle, Beynac est coincé contre la falaise. C'est "un goulet d'étranglement" qui pose des problèmes de "fluidité de trafic, de sécurité et d'environnement", explique M. Peiro, déterminé à mener à bien son projet de contournement, dont la mise en service est prévue pour le printemps 2020.

"En 2017, nous avons fait des travaux pour élargir la route et le trottoir, désormais, au niveau de la circulation, deux poids lourds se croisent, il n'y a plus de blocages, seulement des ralentissements", rétorque Alain Passerieux, le maire de Beynac pour qui une telle déviation est devenue "inutile".

"C'est un projet personnel, onéreux et obsolète", tempête Michel André président de la Société pour l'étude, la protection et l'aménagement de la nature dans le Sud-Ouest (Sepanso) de la Dordogne, un département déjà très endetté.

Un argument réfuté par M. Peiro qui, photos à l'appui, montre que "ces aménagements n'ont rien réglé, deux camions ne peuvent toujours pas se croiser ce qui est inacceptable lors de la période estivale".

"Le capital de cette région est son patrimoine naturel et culturel et la déviation va impacter assez sérieusement tout cela", affirme Bernard Bousquet écologue du collectif, rappelant que le site est classé Natura 2000 et réserve de biosphère par l'Unesco.

Quelque 25.000 arbres et végétaux seront replantés et des bras morts recréés, se défend M. Peiro. "Le contournement longera au plus près le tracé de la ligne de chemin de fer déjà existante, il se fondra dans le paysage et sera très peu visible", assure-t-il.

Il balaie d'un revers de main la possibilité que le chantier soir suspendu par une décision de justice.

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