Procès Séréna : à 8 ans, l'autonomie d'une enfant de 2 ou 3 ans

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Par AFP - Limoges
Publié le 10 octobre 2019 - 21:26
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La salle du tribunal où se déroule le procès de Rosa da Cruz en appel, le 7 octobre 2019 à Limoges
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© MEHDI FEDOUACH / AFP/Archives
La salle du tribunal où se déroule le procès de Rosa da Cruz en appel, le 7 octobre 2019 à Limoges
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La petite Séréna, dont la mère est jugée en appel pour lui avoir infligé deux ans de confinement et de négligence, est aujourd'hui une fillette de 8 ans qui requiert "une attention de tous les instants", aussi peu autonome qu'"une enfant de 2-3 ans".

Pendant les trois premiers jours d'audience, la cour d'assises d'appel de Haute Vienne avait tenté de percer les ressorts psychiques qui ont conduit Rosa da Cruz, "bonne mère" de trois enfants, à soustraire aux yeux du monde sa quatrième, née au terme d'un déni de grossesse.

Jeudi, les témoignages d'un pédiatre et de l'aide sociale ont dressé le portrait de Séréna, une enfant atteinte aujourd'hui de syndromes autistiques "vraisemblablement irréversibles" après 23 premiers mois de privation sensorielle et de stimuli.

Séréna, qui aura 8 ans en novembre, "a besoin d’un accompagnement comme un enfant de 2-3 ans pour l’aider à manger, se laver, aller aux toilettes. A tous les instants, elle est sous surveillance chez l’assistante familiale (sa famille d'accueil) ou à l’IME (Institut médico-éducatif)", où elle va plusieurs jours par semaine, a témoigné Sophie Quériaud, directrice de l'Aide sociale à l'enfance (ASE) de Corrèze à l'époque des faits, qui a délégation d'autorité parentale.

"Séréna est une enfant très angoissée dès qu’elle sort de son quotidien", a-t-elle poursuivi. "Au départ, elle était très angoissée quand elle n’avait pas l’assistante familiale dans son champ de vision. Quand il y a une autre personne dans son quotidien, elle actionne un système de succion (de langue) très fort, qu’elle reproduit chaque fois qu’elle est angoissée".

L'enfant, qui présentait des symptômes de rachitisme à sa découverte en novembre 2013 dans un coffre de voiture, est désormais "physiquement dans la courbe. Un peu petite, mais elle est dans la courbe", a précisé le Dr Anne Sabouraud, pédiatre du service de protection infantile du département de la Corrèze, qui la suit régulièrement.

- "Pas capable de verbaliser" -

"D'un point de vue physique, moteur, le retard est léger, pas notable", explique à l'AFP une avocate de l'ASE. "Mais d'un point de vue intellectuel, dans la relation avec l'autre, avec son environnement, elle a le développement d'un enfant de 2-3 ans".

"S'il y a eu entre 3 et 5 ans un bon développement, par contre ses compétences cognitives se sont creusées. Au démarrage il y avait beaucoup de progrès mais les retards sont devenus de plus en plus importants", a tempéré le Dr Sabouraud. "Les petites compétences qui émergeaient n’étaient dues qu’à la stimulation, elles n’étaient pas spontanées".

Ainsi l'enfant n'est pas "capable de verbaliser" spontanément. "Lors de la dernière expertise, elle dit 50 mots mais sur sollicitation de l'entourage". Quand le vocabulaire moyen pour un enfant de 2 ans est estimé à 250 mots, selon des documents pédagogiques officiels.

L'avenir de Séréna, surtout, reste incertain. "Nous savons que l'adolescence pourra être un moment difficile", a admis Mme Quériaud. Avec, expliquait une partie civile, un risque réel de "régression" quand se diluera à la majorité l'attention constante d'aujourd'hui. Et au-delà, la quasi-certitude "d'une vie adulte dans une institution". "Pour l’instant le projet est de continuer ce qui est mis en place", a commenté Mme Quériaud.

Dans le box, Rosa da Cruz, très fatiguée depuis une journée difficile mercredi, écoutait, avec une émotion visible, la description de l'enfant. Condamnée à deux ans ferme en première instance, elle encourt 20 ans de réclusion.

Le procès dure jusqu'au 16 octobre.

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