Rennes expérimente le loyer unique, "la fausse bonne idée" de la mixité ?

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Par Wafaa ESSALHI - Rennes (AFP)
Publié le 12 septembre 2018 - 11:49
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Rennes Métropole a instauré un loyer unique pour ses nouveaux locataires du parc social
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© THOMAS BREGARDIS / AFP/Archives
Rennes Métropole a instauré un loyer unique pour ses nouveaux locataires du parc social
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Afin de privilégier la mixité sociale, Rennes Métropole a instauré un loyer unique pour ses nouveaux locataires du parc social, une expérimentation inédite saluée au départ par l'ensemble des acteurs qui aujourd'hui s'inquiètent notamment de l'augmentation des loyers qu'elle va générer à court terme.

Depuis septembre, le loyer d'un nouveau locataire est identique pour un T3 dans le centre-ville de Rennes, à Chartres-de-Bretagne, ou dans les 43 communes que compte cette métropole aux 30.000 logements sociaux.

Objectif? briser l'hétérogénéité des loyers car à Rennes comme dans l'ensemble du parc HLM français, "il existe de grandes disparités", explique la maire PS de Rennes, Nathalie Appéré, et stopper la concentration des populations aux très bas revenus vers certains quartiers.

"Plus un ménage a des revenus faibles, plus il va être orienté vers Maurepas, Villejean ou Le Blosne qui sont des quartiers pour lesquels il y a déjà des difficultés importantes et donc on arrive à des quartiers monotypés où on ne peut plus assurer cette mixité dont ils ont besoin pour fonctionner", justifie Mme Appéré.

Ces quartiers sont des "assignations à résidence" où "80% des attributions se font à des gens qui touchent la moité du seuil de pauvreté", poursuit l'édile.

Mais le dispositif de "loyer unique", inscrit dans la loi Égalité et citoyenne (2016), est "une fausse bonne idée", déclarent à l'unisson, les associations Consommation Logement Cadre de vie (CLCV) et la Confédération nationale du logement (CNL).

"Pour pouvoir avoir un loyer unique, il va y avoir des immeubles dont le loyer va baisser dans le centre-ville, pour permettre à toutes les populations d'y accéder mais les bailleurs ne voudront pas perdre le manque à gagner et vont augmenter des loyers qui sont plus bas", dénonce Yasmina Héligon, vice-présidente de CLCV de Rennes.

Rennes Métropole reconnaît qu'il y aura une hausse des loyers, mais précise qu'elle sera contenue et qu'elle évitera l'augmentation que le bailleur est libre d'appliquer à chaque relocation, jusqu'à 5%.

- Dispositif à long terme -

"Nous sommes d'accord pour la mixité mais ce ne sont pas aux locataires les moins pauvres, de payer pour les plus pauvres, pour que les plus pauvres puissent accéder à tout type de logement", s'insurge Mme Héligon. "La solidarité doit être nationale".

La seconde préoccupation des associations concerne l'avenir des aides au logement. "Le loyer unique est fixé sur le maximum du plafond des APL. Avec la décision du gouvernement de baisser les APL, qui va payer la différence ? Jamais la Métropole ne va rebaisser les loyers", avertit Maguy Gaillard, présidente de la CLN 35.

La maire de Rennes reconnaît la limite et précise que "ce n'est pas qu'avec le loyer unique que la mixité va advenir. Il faut rester humble". "Le processus va prendre énormément de temps", 5 à 10 ans, "le temps de rotation du parc HLM".

"On veut casser le mécanisme où si je suis une femme seule, sans revenu avec mes deux enfants, on va me proposer un quartier où je vais me retrouver avec d'autres mêmes femmes", insiste Mme Appéré, également présidente de l'Office public de l'habitat. Et de préciser que "le loyer est un obstacle pour accéder à certains logements mais n'est pas pour autant un gage d’attractivité".

Pour attirer les locataires sur l'ensemble de son parc de logement social, y compris dans les quartiers bénéficiant actuellement d'une mauvaise image, la ville s'est donc lancée dans un plan de rénovation urbaine dont la facture s'élève à 516 millions euros, partagée avec les bailleurs sociaux. Et la commune s'est engagée à construire 1.000 logements sociaux neufs sur la période 2015-2020.

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