Retraites : ambiance chahutée à l'Assemblée pour le début d'une longue bataille

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Par Charlotte HILL - Paris (AFP)
Publié le 17 février 2020 - 21:08
Mis à jour le 18 février 2020 - 00:44
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Le long marathon des retraites a démarré lundi dans l'hémicycle de l'Assemblée dans une atmosphère déjà électrique, entre le gouvernement qui vante une "ambition immense" et une opposition qui torpille une réforme jugée "illisible" et injuste", avec une nuée d'amendements.

Les députés ont achevé cette première journée sur les retraites vers 23H20, sans commencer à examiner les 41.000 amendements que compte le volet ordinaire de la réforme.

En ouverture des débats, dans l'après-midi, le tout nouveau ministre de la Santé Olivier Véran a défendu un projet annoncé "de longue date" qui "a la légitimité d'un programme présidentiel". Le "marcheur" vient de succéder à Agnès Buzyn qui a pris la tête de la campagne LREM pour Paris, après l'affaire Griveaux.

Son discours, précédant celui du secrétaire d'Etat Laurent Pietraszewski, a vite été interrompu par des cris de l'opposition. "Ne commencez pas, vous aurez des heures, des jours et des nuits pour vous ébrouer dans la démocratie", a lancé Richard Ferrand (LREM) depuis le perchoir.

Après des semaines de contestation de la réforme dans la rue, l'appel à une "journée morte" dans les transports a été peu suivi lundi. Plusieurs centaines de personnes ont pris part à une manifestation "symbolique" et une "Assemblée populaire" de gauche s'est tenue aux abords du Palais Bourbon, en attendant une nouvelle journée interprofessionnelle jeudi.

Pour l'heure, quinze jours de débats sont prévus dans l'hémicycle, soit 84 heures. Face à un calendrier jugé "intenable", le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand a proposé un "temps programmé" de 100 heures sur trois semaines, mais les députés LFI et PCF ont refusé.

Les responsables de la majorité martèlent qu'un recours au 49-3 - arme de la Constitution qui permet l'adoption sans vote - "n'est pas l'objectif", mais des "marcheurs" ne l'excluent pas si le débat est "clairement impossible".

Le gouvernement table toujours sur une adoption en première lecture avant les municipales dans un mois et espère un feu vert définitif "d'ici l'été".

Mais avec autant d'amendements, "le président (de l'Assemblée Richard) Ferrand a calculé que ca ferait 365 jours à raison de dix heures par jour. Ce n'est pas très réaliste, même si nous enjambions ou mordions sur la trêve des municipales, nous n'y arriverions pas", a souri lundi soir Gilles Le Gendre, le chef de file des députés LREM.

Mais "il se peut aussi que nos oppositions fassent preuve d'un esprit de responsabilité", glisse-t-il, en assurant que la "volonté unanime du gouvernement et de la majorité reste d'éviter" un 49-3.

- "Tranchée" -

Malgré quelques interrogations en interne, la majorité veut faire aboutir cette réforme "de progrès social", "contre vents d'obstruction et marées d'amendements". Droite comme gauche dénoncent, elles, un "mépris" du Parlement et un projet "nébuleux" et "à trous", avec notamment la trentaine d'ordonnances programmées.

Les trois groupes de gauche - PS, PCF et LFI - tablent en plus des amendements (près de 37.000 à eux trois) sur une motion de censure à une date qui reste à déterminer. Ils ont aussi tenté en vain lundi une "motion référendaire", qui sert à demander au président de la République un référendum. Elle a été rejetée par 160 voix contre 70. Autant de "manoeuvres dilatoires" pour le gouvernement.

Le patron des insoumis Jean-Luc Mélenchon a promis de tenir "la tranchée" jusqu'à "la victoire" contre "la plus terrible régression sociale de toute la Ve République".

Les députés communistes, qui arboraient des t-shirts "Référendum" dans les couloirs de l'Assemblée, ont aussi défendu une motion de rejet (repoussée par 145 voix contre 68). Leur porte-parole Pierre Dharréville a fustigé un projet "monstrueux" et invité le gouvernement à mettre fin au "supplice".

"Vous n'êtes pas à la hauteur de l'histoire sociale de ce pays", a répliqué le patron de LREM Stanislas Guerini, en jugeant que "la gauche qui s'oppose à tout, elle ne sert à rien du tout".

Quant au groupe LR, qui entend incarner "une troisième voie", il fustige comme la gauche l'"amateurisme" du gouvernement, en particulier sur la question du financement. Le président de la commission des Finances Eric Woerth a écrit au Premier ministre pour réclamer "documents et données factuels" sur ce point. "Rien n'est clair, tout est à revoir", a lancé le député des Vosges Stéphane Viry (LR), en défendant lui aussi une motion de rejet (retoquée par 145 voix contre 94).

"Le gouvernement refuse de donner la parole au peuple à travers un référendum", dénonce pour sa part le RN Ludovic Pajot, qui y voit "un mépris manifeste pour le peuple".

parl-chl-adc/cb

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