Retraites : le conflit suspendu aux annonces du gouvernement, les opposants dans la rue

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Par Marie-Pierre FEREY - Paris (AFP) et France Soir
Publié le 11 janvier 2020 - 17:29
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Des manifestants dans des nuages de gaz lacrymogène lors de la manifestation parisienne contre la réforme des retraites, le 11 janvier 2020
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© LIONEL BONAVENTURE / AFP
Des manifestants dans des nuages de gaz lacrymogène lors de la manifestation parisienne contre la réforme des retraites, le 11 janvier 2020
© LIONEL BONAVENTURE / AFP

Le conflit des retraites était suspendu samedi aux annonces du gouvernement, promises par le Premier ministre, alors que les opposants étaient à nouveau dans la rue partout en France pour cette 38e journée de grève.

Plusieurs milliers de manifestants ont commencé à défiler en début d'après-midi dans la capitale entre Nation et République. Devant le cortège syndical bon enfant, plusieurs centaines de manifestants, dont certains masqués ou cagoulés, ont brisé des vitrines et jeté des projectiles en direction des forces de l'ordre, qui ont répliqué par des tirs de gaz lacrymogène.

Sacha Lantas, avocat au barreau de Paris, défile avec ses collègues en robe contre "la hausse des cotisations prévue par la réforme, qu'on devra répercuter dans les honoraires et qui va priver d'accès au droit les clients les plus démunis".

Céline, 43 ans, enseigne les lettres dans un lycée classé "politique de la ville" du 94 et est "doublement mobilisée, pour les retraites et contre la réforme du bac qui va pénaliser les lycées de banlieue."

Les féministes se taillent un franc succès dans le défilé parisien avec une chorégraphie en bleu de travail et une chanson clamant "la chute des pensions pour Fatou et Marion, à cause de Macron".

D'autres manifestations avaient lieu partout en France. A Toulouse dans la matinée, la police avait compté 3.000 manifestants (20.000 pour la CGT). Au moins 2.000 personnes défilaient à Rennes, avec des pancartes proclamant "Je ne ferai pas les poubelles pour manger à la retraite" ou "soignante, je veux des lendemains qui chantent".

Un millier de "gilets jaunes" et 2.000 à 3.000 manifestants ont commencé à manifester avec retard à Marseille après un vif épisode de tension entre les premiers et un membre du service d'ordre de la CGT. A Bordeaux, les manifestants étaient plusieurs milliers, et près de 2.000 à Lille, selon des journalistes de l'AFP.

A Nantes, des black blocks ont attaqué la préfecture avec des projectiles. Ils ont été repoussés par les forces de l'ordre qui ont fait usage de grenades lacrymogènes et de canons à eau, a constaté un photographe de l'AFP.

Edouard Philippe s'est engagé vendredi, au terme d'une nouvelle journée marathon de bilatérales avec les partenaires sociaux, à leur adresser samedi "par écrit des propositions concrètes" qui pourraient former "la base d'un compromis".

Philippe Martinez (CGT), en pointe dans la mobilisation contre la réforme, a redit que son organisation n'avait "pas changé d'avis" après 5 semaines de conflit et fustigé un projet de loi que "personne ne comprend" et dont beaucoup d'aspects "seront réglés par des décrets".

- Incidents -

Si "on nous annonce un recul en tout ou partie sur l'âge pivot, ce sera le produit de la mobilisation, cela ne peut que nous conforter", a noté Yves Veyrier (FO), qualifiant la réforme des retraites de "pire idée de ce quinquennat".

Le gouvernement est très attendu sur l'âge pivot qui doit progressivement inciter les Français à partir à 64 ans sous peine de se voir infliger un malus.

La CFDT, favorable au régime par points mais fermement opposée à l'âge pivot, organisait ses propres rassemblements samedi, dont un à Paris dans la matinée. "C'est une mesure aveugle qui n'a pas lieu d'être dans le projet de loi", a redit vendredi son dirigeant Laurent Berger.

Le leader de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, présent dans la manifestation parisienne, a estimé qu'il n'y avait "rien" à attendre de la lettre du Premier ministre, qui "va faire des saupoudrages, de la politicaille à l'ancienne: on fait des phrases ambiguës, on cède des choses sans les céder".

Le Premier ministre a redit vendredi "la détermination du gouvernement" à présenter ce projet de système universel de retraite le 24 janvier en Conseil des ministres et de le soumettre à l'examen en séance publique à l'Assemblée nationale à compter du 17 février pour qu'il puisse être adopté avant l'été.

Un éventuel compromis ne se traduira pas forcément par l'arrêt des perturbations dans les transports car la CGT, FO et Solidaires réclament pour leur part le retrait pur et simple du projet.

Le trafic SNCF reste perturbé ce week-end avec 80% des TGV, un TER sur deux et 40% des Transilien, tandis que la RATP évoque une "nette amélioration" par rapports aux derniers week-ends.

Jeudi, 452.000 manifestants étaient déjà descendus dans la rue contre le projet de réforme, selon le ministère de l'Intérieur, dont 56.000 dans la capitale. Selon la CGT, ils étaient 1,7 million, dont 370.000 à Paris.

L'intersyndicale a appelé à poursuivre le mouvement avec une "journée de grève et de convergence interprofessionnelle" mardi, et des "initiatives déclinées sous toutes les formes" mercredi et jeudi.

Flavien, agent RATP sur la ligne 2, en grève depuis 38 jours, qui manifestait à Paris s'interroge sur la suite de la grève: "ça va être compliqué, on ne sent pas un réel engagement national, on ne va pas tenir éternellement".

La CGT a appelé à maintenir le blocage des expéditions de carburants des raffineries jusqu'au 16 janvier inclus, et a déposé un préavis de grève "reconductible bloquante" à partir du 13 dans deux centres de la Banque de France qui traitent plus du quart des billets du pays.

La grève historique continuait samedi à l'Opéra de Paris, avec l'annulation de la représentation du Barbier de Séville, et à Radio France, qui en est à son 40e jour de grève.

burs-mpf-cel/swi

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