Ruissellements toxiques de la mine d'or de Salsigne : l'inquiétude gagne la vallée

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Par Hervé GAVARD - Salsigne (France) (AFP)
Publié le 02 avril 2019 - 17:46
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Le site de l'ancienne usine d'or et d'arsenic de Salsigne, le 4 mars 2019
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© ERIC CABANIS / AFP
Le site de l'ancienne usine d'or et d'arsenic de Salsigne, le 4 mars 2019
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La mine d'or et d'arsenic de Salsigne, sur les contreforts de la Montagne Noire, a apporté de la richesse pendant près de 100 ans. Mais son legs toxique inquiète aujourd'hui jusque dans la vallée de l'Aude, des kilomètres en contrebas.

Après les inondations d'octobre 2018 et les ruissellements qu'elles ont provoqués, "il y a une inquiétude grandissante de nos concitoyens" quant à la pollution des sols, assure le président de l'Agglomération de Carcassonne, Régis Banquet.

"Grandissante ? Le terme est excessif", tempère le maire de Trèbes, Eric Ménassi, désireux d'écarter toute "phobie".

Mais lui aussi admet que sa population, déjà choquée par les terribles orages de la nuit du 14 au 15 octobre 2018 dans l'Aude, a désormais un autre motif de préoccupation.

Des analyses de différents experts ont de fait révélé des taux de pollution, notamment à l'arsenic, anormalement élevés dans les sols de la vallée.

Les dernières en date ont été réalisées à la demande d'habitants exploitant des jardins ouvriers à Trèbes, où la culture a été suspendue selon "le principe de précaution", souligne le maire Eric Ménassi.

Déjà, en décembre, un expert indépendant, Philippe Behra, avait mis au jour la présence d'arsenic à des taux supérieurs à la norme admise dans l'eau potable, soit 10 microgrammes par litre.

Ainsi, ce professeur des universités à l'Institut National Polytechnique de Toulouse avait enregistré jusqu'à 87 microgrammes d'arsenic dans un ruisseau, confluent de l'Orbiel. Cette rivière récolte les eaux issues du bassin de Salsigne et se jette plus bas dans l'Aude, à Trèbes, en passant par les communes de Limousis et de Conques-sur-Orbiel.

- "Débâcle complète" -

Cause de tous ces soucis: la mine de Salsigne, la plus importante mine d'or d'Europe occidentale et première mine d'arsenic du monde, exploitée pendant près d'un siècle jusqu'en 2004.

Cette mine a fait vivre des centaines de familles et "apporté la richesse", témoigne Max Brail, le maire de Lastours.

Mais elle a légué en héritage des millions de tonnes de déchets, chargés de composés toxiques, soufre, arsenic et autres métaux, stockés sur 5 sites alentour, décrit Guy Augé, président de l'Association de défense des riverains de Salsigne.

Avec le temps, certains ont peu à peu "perdu leur étanchéité", comme le site de Montredon, qui renferme à lui seul 2,5 MT de résidus. Un autre est toujours laissé à l'air libre, dénonce M. Augé.

"Alors qu'on pouvait s'attendre à ce que ces sites aient été mis en sécurité après l'exploitation, tempête Guy Augé, on s'aperçoit que 10-15 ans plus tard, c'est la débâcle complète".

"Le fautif, c'est le système où l’État a été producteur d'arsenic et maintenant, c'est lui qui donne les autorisations pour la mise en sécurité qu'il paye. Ca ne lui rapporte rien, donc il fait le minimum", assure M. Augè.

- Volonté de "transparence" -

La pollution des cours d'eau causée par les précipitations d'octobre dernier "n'est que la partie immergée" du problème, prévient pour sa part M. Behra.

"Le plus important, ce sont les sédiments" pollués, stockés dans le lit de la rivière et transportés vers l'aval.

La préfecture de l'Aude a elle aussi fait faire des analyses. Les valeurs d'arsenic relevées par le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) "sont cohérentes avec celles" relevées par M. Behra, affirme Laurent Denis, de la Direction régionale de l'Environnement (Dreale).

Dans l'attente d'éventuelles nouvelles analyses, la préfecture a réitéré les recommandations sanitaires en vigueur autour du site depuis la fin de l'exploitation et étendu leur zone d'application: une alimentation variée et pas de consommation exclusive de légumes cultivés dans les jardins.

A ce jour, il n'y a pas de remontée de problèmes sanitaires de la part des médecins de la vallée, assure M. Denis, qui souligne la volonté de "transparence" de la part des services de l’État.

Une transparence réclamée par les maires et les associations, pour que renaisse "la confiance" avec les services de l’État, après des années de relations compliquées.

Pour cela, tous réclament une cartographie précise des sites pollués et des polluants pour que "les gens puissent au moins se protéger", dit M. Augé.

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