Santé : les libéraux et la Sécu ouvrent une négociation sous pression

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Par Gabriel BOUROVITCH, Aurélie CARABIN - Paris (AFP)
Publié le 16 janvier 2019 - 09:30
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La ministre de la Santé Agnès Buzyn, le 10 décembre 2018
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© ludovic MARIN / AFP/Archives
La ministre de la Santé Agnès Buzyn à son arrivée à l'Elysée le 10 décembre 2018
© ludovic MARIN / AFP/Archives

Pour pousser les professionnels de santé libéraux à se grouper en "communautés territoriales", le gouvernement a demandé à l'Assurance maladie de leur faire signer un accord: une négociation s'est ouverte mercredi et doit aboutir d'ici fin avril, faute de quoi l'exécutif légifèrera par ordonnances.

De gré ou de force, ils devront travailler ensemble. Médecins, dentistes, pharmaciens sages-femmes, infirmiers, kinés, biologistes, centres de santé... Une cinquantaine de syndicats et fédérations se sont retrouvées à 15H00 au siège de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) à Paris.

Objet du raout: les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), sorte de réseaux locaux de santé associant des libéraux autour de projets définis en commun, tels que la vaccination ou le maintien à domicile de personnes âgées.

Il existe environ 200 CPTS aujourd'hui. Le gouvernement en veut plus de 1.000 d'ici 2022 afin de garantir partout "l'accès des citoyens à un médecin traitant" et "la prise en charge des soins non programmés en ville", selon la lettre de cadrage envoyée par Agnès Buzyn à la Cnam fin décembre.

La ministre de la Santé a laissé aux négociateurs jusqu'à "fin avril" pour conclure un "accord conventionnel interprofessionnel" incluant "un socle commun de missions" et un modèle de "financement pérenne" pour ces structures.

Dès la séance d'ouverture, la Cnam a proposé "qu'aucune forme juridique ne soit imposée pour la constitution des CPTS", selon le document remis aux négociateurs et dont l'AFP a obtenu copie.

L'Assurance maladie envisage par ailleurs que ses aides financières soient calculées "en fonction du nombre de professionnels de santé et du nombre d'habitants couverts", mais aussi "au regard de l'atteinte d'objectifs en lien avec les missions réalisées".

Cinq autres dates sont déjà programmées jusqu'au 4 avril. En cas d'échec, Mme Buzyn a prévenu qu'elle se donnerait "la possibilité d'inscrire dans la loi santé" une mesure instaurant "un socle juridique pour financer ces CPTS".

La première mouture du projet de loi sur "l'organisation et la transformation du système de santé" prévoit d'autoriser le gouvernement à légiférer par ordonnances afin de "favoriser le développement de l'exercice coordonné au sein des CPTS".

- "Chantage" et interférences -

Simple précaution ou vrai coup de pression? Pour certains syndicats, l'affaire est entendue. Chez les médecins, le président du SML Philippe Vermesch affirme que "la ministre menace de passer par la loi pour couper les vivres des professionnels de santé qui n'iront pas dans les CPTS".

Son homologue de la CSMF, Jean-Paul Ortiz, met en garde: "Nous ne pourrons accepter un cadre obligatoire contraint, bureaucratique, dans lequel tous les médecins devraient s'engager pour bénéficier des soutiens à leurs efforts".

Plus virulents, les infirmiers de la FNI jugent "inacceptable qu'une négociation puisse se mener sous la menace et le chantage à la contrainte".

Deux autres dossiers vont interférer avec les pourparlers sur les CPTS.

Les médecins débuteront la semaine prochaine une négociation sur les 4.000 "assistants médicaux", mi-secrétaires, mi-aides-soignants, qu'Emmanuel Macron leur a promis dans son plan santé dévoilé en septembre. Reste à préciser, "d'ici fin avril", quels praticiens pourront en bénéficier et quelle subvention leur sera versée, Mme Buzyn ayant déjà prévenu qu'elle "devra être dégressive".

De leur côté, les infirmiers espèrent conclure un accord d'ici fin février, après un an d'âpres tractations, sur leurs règles d'installation, la création de nouveaux actes ou encore le plafonnement de leurs indemnités kilométriques.

Déçus d'avoir été "oubliés" dans le plan santé, leurs syndicats avaient organisé une journée de manifestation en novembre, qualifiant la création des "assistants médicaux" de "véritable provocation".

Pour dénouer cette situation inextricable, les partisans de la réforme espèrent que la Cnam mettra les grands moyens. "L'ambition politique affichée doit être suivie d'une volonté à la hauteur des enjeux", a prévenu Jacques Battistoni, président du syndicat MG France, dans une tribune publiée par Le Monde.

Pour le premier syndicat de médecins généralistes, "le travail en équipe ne se décrète pas".

Plus radical, son confrère de la FMF, Jean-Paul Hamon, prédit que sans "un financement massif et pérenne", l'exécutif "porterait seul (la responsabilité de) l'aggravation de la désertification" médicale.

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